09 mai 2024

Queer theory, une histoire graphique

de Meg-John Barker et Jules Scheele

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Alors je le dis tout de suite, comme ça ce sera fait et on n'y reviendra plus: Je déteste la couverture que je trouve racoleuse et sans rapport avec le contenu. Mauvais choix de dessin à mon avis. La couverture originale est bien meilleure. C'est dit. Tournons-la vite.

"Queer: est-ce une identité de genre? une orientation sexuelle? un mouvement politique? une théorie académique?" 

J'ai vu passer cet ouvrage sur internet, je ne me souviens plus où et si la blogueuse se reconnaît, qu'elle me fasse signe, ça me ferait plaisir d'échanger nos liens. J'ai vu que c'était un document-graphique, je m'étais dit: "ça doit être plus simple et moins ennuyeux qu'un ouvrage classique", et comme je n'arrivais pas à savoir clairement ce que "queer" signifiait et que je n’arrêtais pas de rencontrer ce mot, j'ai pensé qu'il serait sans doute judicieux de me documenter un peu. Moins ennuyeux, sûrement, ça l'a été et tant mieux parce que je n'aurais pas lu tout cela en texte rédigé. Plus simple, non. Car il s'avère que la "théorie queer" est beaucoup de choses, mais en tout cas, pas simple.

J'ai lu ce livre d'un bout à l'autre sans en omettre une ligne ou un dessin, c'est dire qu'il m'a intéressée, mais je dois dire que j'ai failli le refermer et le rendre à la bibli dès la première page, en me disant que j'allais plutôt essayer de trouver l'ouvrage de quelqu'un qui veut bien expliquer et essayer de définir.

Mais j'ai surmonté ce mouvement de mauvaise humeur et me suis lancée dans ma lecture, et j'ai bien fait, parce qu'arrivée à la fin, si je relis cette première page, elle ne m'étonne plus et ne me dérange plus non plus, et à la question de départ, je répondrais: "Tout cela". Ne jamais oublier que le mantra de base de la théorie Queer, c'est "Non binaire". Donc, il faut arrêter de diviser les choses en deux camps, ce qu'elles sont et ce qu'elles ne sont pas. Quel que soit l'objet de la réflexion, il faut élargir sa conception à toutes les nuances que l'on peut trouver dans l'éventail. Il ne faut pas obligatoirement qu'une porte soit ouverte ou fermée, elle peut être ouverte à n'importe lequel des 180°, elle peut être juste poussée, enclenchée, fermée à clef, munie de différents degrés de verrouillages, et ces situations ne sont pas identiques.

Pour lire cet ouvrage, j'ai dû abandonner très vite mon mode de lecture habituel de gauche à droite, de haut en bas. Chaque page comprend un ou plusieurs dessins entourés de textes et de bulles. Je me suis mise à attaquer la page par le dessin central puis à élargir par les phylactères et les cartouches d'abord, pour finir par lire le texte supplémentaire s'il y en avait un, ce qui était le plus souvent le cas. Cette tactique m'a donné toute satisfaction. C'est une lecture qui de toute façon sera assez longue car il y a 175 pages et beaucoup d’idées et de notion nouvelles pour moi et, il faut bien le dire, qui donnent énormément à réfléchir.

J'ai ainsi pu découvrir que c'est au 19ème siècle que la sexualité a cessé d’être quelque chose que l'on fait pour devenir quelque chose que l'on est, eh bien, dans la théorie Queer, elle est toujours faire, pas être.

Et encore :

"Personne n'aurait à faire son coming out si l'hétérosexualité n'était pas la norme". On ferait mieux de s'interroger sur l'ordre social et le pouvoir qui s'appuie sur l'hétérosexualité et, pour tout dire en a besoin, et la présente donc comme une "évidence naturelle" sans toutefois interroger plus avant ce fait. Le monde qui s'organiserait autour d'une conception non binaire ne pourrait pas être le même.


Poursuivant sa conception non binaire et mouvante, la théorie Queer s'est de façon inattendue, heurtée au féminisme (comment être féministe si les notions d'homme et de femme sont contestées) et de même aux trans-genres. Mais de ce "heurt" non binaire naît forcément une vision enrichie et non sclérosée des choses...

Alors, simple? A partir du moment où vous vous référez aux pensées de Michel Foucault, Derrida, Lacan, G. Rubin, J. Butler, et que vous en faites la base de vos réflexions, votre théorie ou votre livre, ne peut pas être simple, ni facile . Il va falloir faire un effort, mais ce n'est pas un gros mot.


"Il faut toujours se demander ce qui est fermé et ce qui est ouvert par un discours donné" (Foucault)

Bref, je ne peux pas évoquer tous les points soulevés car ils sont nombreux. Vraiment, vous devriez aller muscler vos petites cellules grises là-dessus. Le sujet est riche et captivant. Cet ouvrage est une bonne façon d'ouvrir beaucoup de nouvelles portes…

Vous serez convaincu ou pas, mais c’est très intéressant en tout cas.

Et souvenez-vous : "Queer = faire, pas être"

9782348078453



4 commentaires:

  1. Je l'avais remarquée aussi, chez la Barmaid aux lettres me semble-t-il. Je note ta technique de lecture qui me sera sûrement utile le moment venu! Très récemment, dans une émission britannique sur le groupe de Bloomsbury, j'ai appris que ce serait E.M. Forster qui aurait été le premier à employer le mot queer dans le sens de "homosexuel" en littérature. Le terme est aujourd'hui plus large sans doute et j'ai beaucoup à apprendre sur le sujet du genre, 175 pages de BD feraient déjà une solide entrée en matière.

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    1. Oui, c'est ça, un moyen de savoir à peu près de quoi il s'agit, mais je dis bien "à peu près". Ca voudrait déconstruire complètement ce qui est acquis et non inné dans nos attitudes mais c'est tellement profond et tellement ancien, que c'est tout sauf facile.

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  2. C'est vrai que la couverture ne semble pas vraiment appropriée au contenu. Pour le reste, tu présentes très bien cet ouvrage et on sent bien qu'il t'a captivée.

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    1. Merci, il y a des choses que j'ai découvertes. Jamais trop tard... :-)

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