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24 mars 2025

La Distinction

Librement inspiré du livre de Pierre Bourdieu

de Tiphaine Rivière

*****


Vous le savez tous, "La distinction" de Pierre Bourdieu est un ouvrage majeur et passionnant… mais c’est aussi un gros livre à la lecture difficile. Pour cette raison, beaucoup ne l’ont pas lu à part quelques devoirs scolaires rapides dans les meilleurs des cas. Cet album arrive à point et va beaucoup nous aider.

Alors, une étude de presque 700 pages transposée en 280 pages de gros dessins, vous vous doutez que vous allez lire une vulgarisation simplifiée, n’empêche que vous aurez les grandes lignes et que j’ai trouvé que l’esprit n’avait pas été trahi. Je conseille non seulement de lire cet ouvrage qui devrait se trouver dans toutes les bibliothèques publiques, mais aussi de l’offrir à vos jeunes, qu’ils fassent des études ou non. Ils comprendront mieux le monde dans lequel ils vivent, car ce qui fait l’objet de cette étude de 1979 perdure encore cinquante ans plus tard et si le monde a bien changé, ce dont on parle ici, est toujours là. Preuve que Bourdieu avait bien mis à jour un élément fondamental de notre mode de vie.

Tiphaine Rivière prend le parti de transposer l’action à notre époque. Notre héros est un jeune professeur de lycée qui, face à la difficulté qu’il y a aujourd’hui à faire classe en Terminale, entreprend de faire lire à ses élèves "La distinction" de Pierre Bourdieu. Ce texte est une révélation pour ces jeunes gens qui, peu enclins au départ à accorder leur attention, ne vont pas tarder à se sentir directement concernés par ce dont Bourdieu (et leur professeur) leur parle. Ils vont immédiatement faire rapprochements et comparaisons entre leurs vies, leurs familles, leurs mondes et les théories qu’ils découvrent. Ils prennent conscience de choses qu’ils ont toujours vécues et acceptées sans jamais les comprendre ni les remettre en cause alors qu’ils sont si fiers de leur libre arbitre. A partir de là, ils s’observent eux-mêmes et questionnent leurs motivations réelles. Ils observent et interrogent leurs familles. Leurs visions du monde changent.

Le graphisme noir et blanc, simplifié, vivant, m’a bien convenu. Le montage est passionnant. La mise en scène claire. C’est complètement accessible. C’est convaincant. Beaucoup vont découvrir des choses. Tout le monde va tout comprendre… et certains, une fois cet album terminé, poursuivront les recherches. Je conseille à 100 %.

978-2413081333

04 mars 2025

VilleVermine  L'homme aux babioles

de Julien Lambert

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Encore une trouvaille due aux hasards de mes fouilles aléatoires en bibliothèque. Je me souviens que je l’ai embarquée en me demandant encore si c’était une BD pour enfants ou adultes. La différence, hormis les images crues ou gores, tient à la simplification des histoires et des sentiments exprimés. Mais là non, s’il n’y a pas d’images choquantes il n’y a pas non plus simplification abusive des choses et j’ai passé un vraiment bon moment avec cet album.

Nous sommes donc à VilleVermine, le nom dit tout. C’est une mégapole en mauvais état et peuplée de gens étranges. "VilleVermine, ville poisseuse, grouillante, crasseuse... Ville de petites magouilles, de petits truands, de sales bizness". Notre héros s’appelle Jacques Peuplier et il vit seul dans une mansarde. Il est détective privé, spécialisé dans la recherche d’objets. Il faut dire qu’il a un atout secret, il parle la langue des objets. Il les aime, il les répare et, quand il est sur une enquête, il peut interroger les objets témoins des faits. Il a donc d’excellents résultats et une bonne réputation dans son métier. Il est par ailleurs aidé par une constitution de colosse et une bonne efficacité dans les bagarres. Ses recherches lui font traverser la ville en tous sens et on croise ainsi les autres habitants, les truands, les bandes de gamins à moitié sauvages, de gros insectes volants et on parle même d’un homme volant, mais Jacques a du mal à y croire jusqu’à ce qu’il le voie de ses yeux. Il y a tellement de choses étranges dans cette VilleVermine… Mais un jour, la Reine des Bas Fonds, lui demande de retrouver sa fille qui a été enlevée. C’est en dehors des compétences de notre détective, mais quand celle-là demande quelque chose, il ne reste plus qu’à obéir, et le voilà parti, interrogeant les objets qui ont assisté aux évènements. Il rencontrera ainsi d’autres personnages dotés de dons tout aussi étranges que les siens et découvrira un complot glaçant dont personne ne se doutait...

Et moi, je lis ça, captivée, car l’histoire est très originale et intéressante, car c’est poétique et ça titille constamment la curiosité, parce que tout peut arriver et que ça n’est pas simpliste. Je me sens comme lorsque, gamine, je dévorais les BD. Le dessin aussi me convient. Lui aussi est original, brut mais parfait et hyper évocateur. Il est exactement adapté au récit. Julien Lambert a assuré le scenario et le dessin et je ne peux qu’admirer son talent. Mais voilà qu’au moment où je suis le plus accrochée, j’arrive à cette vignette :

J’ai fait exactement la tête qu’on voit en haut du dessin et je me suis précipitée dès le lendemain à la bibliothèque pour m’emparer de ce fichu tome 2. Comment avais-je pu ne pas voir que ce n’était pas un one shot ?!

Par contre, mon engouement ne devait pas être totalement infondé car je m’aperçois que cet album a reçu le Fauve polar 2019 à Angoulême.

978-2377311552

12 février 2025

Maus L'intégrale

de Art Spiegelman

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Une lecture INDISPENSABLE. La décision des écoles du comté de McMinn, à l'est du Tennessee, en 2022 de retirer Maus du programme m’a envoyée d’urgence chez mon libraire, et je ne suis pas seule, les ventes ont explosé à ce moment-là. Messieurs les censeurs, merci. Bien sûr, je connaissais ce titre depuis des années, je l'avais déjà vu, j'en avais déjà abondamment entendu parler, je l'avais même eu plusieurs fois en main, feuilleté, lu quelques pages, mais jamais, je l'avoue, je ne m'étais assise dans un fauteuil pour le lire du premier au dernier mot, du premier au dernier dessin. Quelle erreur! Je m'en veux. Ça ne suffit pas de connaître l'existence de ce livre, ni de savoir déjà bien des choses sur la Shoah, il faut lire ce livre. On ne peut pas s'en dispenser car il nous apporte quelque chose d'unique. Faites l'expérience, vous saurez ensuite pourquoi je vous dis ça avec une telle insistance.

Tout d'abord, il ne faut jamais perdre de vue que c'est une histoire vraie. Art Spiegelman a recueilli le récit de la Shoah auprès de son père qui l'a vécue en Pologne puis dans différents camps d'extermination. A ce moment-là, ils vivent tous deux aux USA, la mère d'Art est morte et ses relations avec son père au caractère difficile sont tout sauf aisées. Le lecteur ne peut s’empêcher de penser que ce sont peut-être justement ces défauts, opportunisme, obstination forcenée, égoïsme, qui ont permis au père de survivre là où des millions d'autres sont morts.

 Le récit, documenté par l'auteur comme un reportage, a été publié par épisodes dans un magazine pendant dix ans avant qu'ils soient réunis en un livre. Sous ses apparence de bande dessinée facile avec ses petites souris, c’est un vrai document qui m’a plus d’une fois fait penser à Hilsenrath .

Il a obtenu en 1992 un prix Pulitzer "spécial"", car ce prix n’est normalement pas attribué à une BD. C’est dire s’il a impressionné .

Pourquoi des souris ? Peut-être parce que les nazis soutenaient que les Juifs n’étaient pas humains, mais pas uniquement. Les Allemands sont des chats (je ne pense pas qu’Art Spiegelman déteste les chats, mais ils sont l’ennemi évident des souris) et les Polonais des cochons. Le père parle en faisant des fautes, ce qui rappelle en permanence qu’il est un exilé. Il part d’une situation aisée, jeune, quand son mariage le fait entrer dans la très riche famille de son épouse, lui qui est moins riche. La situation devient ensuite de plus en plus difficile jusqu’à l’abomination des camps d’extermination.

Le récit sans déclaration théorique se situe à hauteur de souris et de quotidien, de survie, où on a tellement de mal à s’en tirer qu’on n’est plus à considérer les choses dans leur ensemble. Mais le lecteur lui, a le recul et la vue d’ensemble. De même, il sait comment le Reich va finir.

Les Spiegelman racontent ce dont tant d’autres ne pourront jamais témoigner. Le récit est épouvantable et on sait en refermant ce livre qu’il n’y a pas d’innocents.

 Après la Libération, les Juifs n’ont généralement pas pu récupérer leurs biens en Pologne. Ceux qui réclamaient trop, on les a fait taire.

Beaucoup ont confirmé leur déni en tentant de nuire à sa publication dans leurs pays respectifs. Wikipédia précise "La traduction vers l'arabe, envisagée depuis longtemps, ne s'est pas encore concrétisée" . Les Russes quant à eux, égaux à eux-mêmes, l’ont édité mais la vente est interdite.

C’est un livre d’une tristesse infinie, mais on ne peut pas faire l’économie de sa lecture.

978-2081278028

02 février 2025

Habemus Bastard

Scenario de Schwartzmann Jacky

Dessin de Vallée Sylvain

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Histoire en deux volumes, ce sera donc les deux, sinon rien, ou vous allez rester en plan en plein milieu de l’aventure.

Un tueur poursuivi par des truands très dangereux bien décidés à lui faire la peau, saisit l’occasion de se cacher en se faisant passer pour le nouveau curé attendu dans un village. Personne ne peut se douter de cette astuce. C’est la planque idéale, si ce n’est qu’il ignore tout de la religion et de ce qu’est censé faire un curé, et le premier dimanche arrive vite.

Qu’à cela ne tienne, d’autant qu’il n’a pas le choix. Il pense que quelques vidéos sur le net lui permettront de trouver de quoi meubler son sermon. Mais ce n’est pas gagné.

Grâce à sa nouvelle fonction, il ne met pas longtemps à connaître quelques petits secrets locaux et à réorganiser les choses à sa convenance, grâce cette fois à son ancienne fonction. Ayant notablement amélioré ses conditions de vie, notre nouveau curé prend goût à son nouveau rôle et se voit bien s’installer là. C’est évidemment à ce moment-là que son ancienne vie le rattrape et que tout part en vrille...


Jacky Schwartzmann, auteur de polars, a fourni le scenario de ces BD où l’on retrouve quelques uns de des thèmes qui lui sont chers : trafics en tous genres, criminel sympathique quand même (quoique...), figure d’autorité qui n’est pas tel qu’on le croit, flic qui prend cher etc. Les vieux rouages fonctionnent bien. Ca n’est pas d’une originalité absolument ébouriffante (des truands bouleversant la vie de villages reculés où ils sont partis se cacher, on en a quand même déjà vu quelques uns, et même en curés), mais ça marche encore. Un ton non dénué d’humour fait plaisamment passer le tout.

Les dessins sont parfaits. J'avais déjà apprécié son "Tananarive", Sylvain Vallée n’est pas un inconnu, un Prix à Angoulême en 2011, et le grand prix du Quai des bulles au festival de Saint-Malo en 2015. Excusez du peu.



 978-2205089943      et     978-2205211306



23 janvier 2025

Vernon Subutex (BD)

de Virginie Despentes & Luz

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J’avais lu le roman dès sa sortie, et beaucoup apprécié, mais c’était il y a dix ans et je l’ai beaucoup oublié depuis. Je me souviens par contre très bien à quel point j’avais été gênée par la très longue attente que nous avions dû endurer entre le premier tome et sa suite qui avait quand même beaucoup gâché la lecture. Je me souviens que j’avais regretté de l’avoir lu dès sa sortie et j’enviais ceux qui ne s’étaient lancés qu’une fois la totalité de l’œuvre publiée et avaient ainsi pu la lire intégralement d’un même mouvement. Ce que je dis là ne concerne que le roman, mais sa version BD a connu la même mésaventure avec 2 ans entre la sortie du T1 et celle du T2 !

La dizaine d’années écoulée depuis ma lecture a effacé de ma mémoire une grande partie de l’histoire d’origine mais je cherche d’autant moins à repérer les différences que la quatrième de couverture annonce d’emblée : « cette nouvelle version - réécrite à quatre mains et en bande dessinée - offre un nouveau regard sur le parcours de Vernon » A propos de cette réécriture, Virginie Despentes précise : « La quasi-totalité de la seconde partie est originale. Il y a un plaisir fou à faire évoluer un texte publié - de façon à ce qu'il trouve la meilleure forme possible dans l'imagination d'un autre. »

Du coup, il pourrait être intéressant que je relise le roman, ce qui est d’ailleurs très envisageable. Mais en attendant, pour en revenir à cet énorme roman graphique, à mon avis, on est vraiment dans ce qui se fait de mieux actuellement. On le sait déjà, Luz est un dessinateur de BD qui pulvérise absolument tous les critères. C’est plus qu’un dessinateur, c’est un artiste remarquable. Allié à un scenario comme celui-ci, à la fois passionnant, témoin de son temps et même par moment, profond, on atteint des sommets. Je sais que l’achat des deux volumes (300 pages l’un et presque 400 l’autre) est une dépense sérieuse (65 € actuellement) mais quel cadeau à (se) faire ! Un des fleurons d’une belle bibliothèque de BD. Luz a d’ailleurs reçu un très mérité Prix Inrocks en 2022 pour ces albums.

Alors, petit rappel de l’histoire pour ceux qui ne seraient au courant de rien, mais sans spoiler, vous me connaissez : Vernon Subutex a toujours gagné sa vie en vendant des disques dans une boutique connue et appréciée, plutôt spécialisée variété moderne, Rock, pop etc. mais les temps changent, On vend de moins en moins de disques et Vernon se retrouve bientôt obligé de mettre la clé sous la porte, sans emploi, sans revenus et sans domicile à la mort de son ami Bleach qui étant devenu une star, le dépannait régulièrement financièrement. Après avoir un peu squatté chez les uns et les autres, Vernon commence une vraie vie de SDF. Pourtant, Bleach lui a donné une clé USB qui contient des enregistrements qui pourraient tout changer.

Parallèlement, nous faisons connaissance de La Hyène, femme de main, employée à diverses basses œuvres par un ponte de l’industrie du spectacle. Au fil des évènements, nous rencontrons également dans des milieux très différents, divers personnages hauts en couleur qui se mêlent à l’action. Mais Vernon lui, se perd de plus en plus, touche le fond et part à la dérive.

Le tome deux commence tout doux, un peu à la Bisounours. La vie reprend son cours et grisés par la chaleur des amitiés qui se sont formées, personne ne semble se souvenir que le tome 1 s’était terminé sur la découverte d’un crime, peut-être deux. Mais cela ne va pas durer et bientôt tout s’accélère au contraire et devient de plus en plus violent. Tout le monde va payer le prix fort dans cette histoire. Le show-biz, c’est la jungle et pas seulement métaphoriquement.

Un roman graphique plein de musique avec des titres et des albums qu’on a tous connus et qu’on a l’impression d’entendre à nouveau pendant qu’on lit (parfois plus qu’une impression d’ailleurs. C’est si facile maintenant de les rappeler sur son smartphone que bien sûr, je l’ai fait).

Si vous ne l’achetez pas, faites le vous offrir, trouvez-le à la bibli, mais lisez-le !


978-2226446534          978-2226446541

22 décembre 2024

Zazie dans le métro

de Raymond Queneau et 

Clément Oubrerie (dessins)

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"Zazie dans le métro", je l'avais lu trop jeune et à l'époque, ni compris, ni apprécié. Je le relis aujourd'hui où je ne suis plus trop jeune pour rien, mais dans une version bande dessinée, que nous devons à Clément Oubreri. Et du coup, j’ai révisé un peu le texte original pour comparer.

L'insupportable gamine est toujours là, et toujours aussi mal élevée. Elle débarque à Paris où son oncle Gabriel va la garder pendant trois jours, le temps que sa mère s'accorde quelques vacances avec un amour de passage. Elle préfère ne pas les ramener à la maison depuis qu'elle a dû tuer le père de la petite à coups de hache pour la protéger de ses avances. Bref, Zazie n'a pas eu une enfance rose et sereine, ce qui a fait d'elle la gamine dégourdie mais ingérable qu'elle est devenue. D'ailleurs, toute la famille est hors normes, Tonton Gabriel, taillé comme une armoire normande, n’est-il pas danseuse artistique, la nuit, dans un cabaret. Il a beaucoup d'amis/es ou connaissances (quand ce n’est pas carrément un car de touristes) que Zazie va être amenée à rencontrer, et ces trois jours à Paris vont encore sérieusement enrichir son expérience de la vie. A la fin de ses vacances, elle aura vieilli -de trois jours, comme tout le monde, me direz-vous. Mais pas que.

Pour l’instant, Gabriel, aidé de son ami Charles, voudrait bien lui faire visiter les monuments de Paris, mais cela ne l'intéresse guère (sans compter qu'ils les mélangent un peu tous). La seule chose qui intéresse Zazie, c'est le métro, dans lequel elle veut absolument monter, mais, manque de chance, c'est la grève, aucun métro ne roule.

C'est donc à pied et en taxi que se feront leurs déambulations. Déambulations au cours desquelles ils rencontreront toute une série de personnages extravagants, la palme allant à Pédro-Surplus alias inspecteur Bertin Poirée, alias Trouscaillon, changeant sans cesse d’identité, fou amnésique incapable de se souvenir qui il est, à moins que ce soit parce que "Prince de monde et de plusieurs territoires connexes, il lui plaît de parcourir son domaine sous diverses apparences"… Allez savoir.

Cette adaptation en BD de l’œuvre de Raymond Queneau est bien fidèle. On y retrouve le "néo-français" qui intéressait Queneau à cette époque, ce qui nous vaut des dialogues fleuris et bien sentis. (Oulipo pas loin)



Mais en attendant, la bande infernale écume Paris, ses flics à képi, ses restaurateurs infâmes



Queneau ne semblait pas les porter dans son cœur et nous fera même assister à une bataille rangée de première grandeur dont l'issue nécessitera l'intervention d'un étrange Deus ex Machina qui gardera toujours sa part de mystère. Sur ce point comme sur d'autres, le voile ne sera pas levé. Nous refermerons l'album loin d'avoir eu toutes les clés, comme c'était également le cas dans le roman.

Le dessin est parfaitement adapté, parfois clair et net, et à d'autres moments plus sombre et/ou confus, comme ce qui nous est raconté. Cette version BD du grand succès de Queneau est à mon sens, une réussite.


9782070610143


17 décembre 2024


Ouagadougou pressé

de Roukiata Ouedraogo 

et

Aude Massot (Dessins)

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Clairement autobiographique (le nom et l'allure de la personnage principale sont celles de l'auteur), cet album si gai va nous montrer un peu le mode de vie des Africains, qu'ils soient en France ou au Burkina Faso. Monde très éloigné de moi qui suis plutôt nordique (et bien moins gaie, je l’avoue) et monde qui m'a charmée et amusée, même si j'ai bien compris que je ne m'y acclimaterais pas. Roukiata Ouedraogo et Aude Massot, la dessinatrice, nous emmènent dans le 18ème, autour de la station Château rouge, quartier à forte population africaine, car c'est là que se rend son personnage Roukiata, alias Petit Modèle. Et plus exactement dans le salon de coiffure de sa tante 


car elle va bientôt retourner en visite à Ouagadougou et elle veut épater toutes ses anciennes copines. Cette plongée à Château Rouge nous met tout de suite dans l'ambiance, avec le parler des habitants, les mini-commerces de rues, les mamas qui vendent leurs plats cuisinés etc. Et les couleurs! Le gris ne règne pas dans ce quartier si vivant.

Petit Modèle prépare donc son départ et ce n'est pas une mince affaire car Ougadougou toute entier ne semble être qu'une grande famille tant elle voit débarquer de proches ayant un colis à lui confier pour qu'elle l'apporte à leur famille. Tous ces préparatifs sont l’occasion d’évocations de souvenirs et pour nous, l’occasion d'assister à des scènes de vie typiques et drôles. On découvre des personnages étonnants et hauts en couleurs. La langue de bois n'est pas au menu. On a au contraire les oreilles réjouies d'un parler très imagé et fleuri. Et nous voilà revivant avec elle ces scènes cocasses ou/et émouvantes. Par exemple, la première anecdote que nous découvrons : Idriss le frère de Rouki, va passer à la radio en France, il téléphone à sa mère pour lui dire de l'écouter mais elle a donné la radio qu'il lui avait envoyée parce qu'elle n'avait pas d'emplacement pour mettre les piles! C'était une solaire, mais personne là-bas ne sait s'en servir. A la recherche d'un poste de radio en état de marche, la famille et les proches, de plus en plus nombreux au fil de la progression, vont jusqu’au ministère mais ce sera en vain. 

Nous verrons ensuite comment Roukiata ado a dû gérer un père qui tentait de la surveiller... comment ses copines et elle géraient les sorties, les garçons. A quoi il faut s'attendre quand on appelle un taxi, etc. 


Puis son arrivée en France, pleine de rêves quant à son avenir (dont certains se sont réalisés)

Et tout cela nous amène au moment ou enfin, tous les (nombreux bagages bouclés) elle est à l'aéroport et va prendre son envol, dans tous les sens du terme grâce à une jolie fin surprise.

Beaucoup d’humour, de chaleur humaine, mais surtout une gaieté qui ne se dément pas quels que soient les obstacle rencontrés. Un sourire permanent, une fraicheur et de simplicité qui vous fera du bien. Et en arrière plan au pays, enfin un islam vivant, qui fout la paix aux femmes, ne brime personne et laisse les gens vivre. Ça fait longtemps qu'on ne nous en avait pas montré. 

Le dessin lui aussi est simple, gai et plaisant. Vous en avez des exemples ci-dessus. Il colle parfaitement à l’album.


‎ 978-2377317752

07 décembre 2024

La Marque Jaune 

d’Edgar P. Jacobs 

****


Ayant réalisé il y a peu que Jacobs et ses Blake & Mortimer n’étaient pas du tout représentés sur mon blog, j’ai entrepris d’en relire et commenter un pour combler cette lacune, et mon choix s’est porté, de façon assez prévisible j’en conviens, sur « La Marque jaune », l’album le plus connu et réputé le meilleur. C’est le sixième tome et la série avait dix ans à sa sortie. Le sixième tome, mais la troisième aventure seulement, car la première, « Le secret de l’Espadon » avait occupé trois tomes et la deuxième, « Le mystère de la grande pyramide », deux. Maintenant, les personnages sont bien rodés, graphisme et caractères.

Et voilà le capitaine Francis Blake et le professeur Philip Mortimer à nouveau réunis à Londres où le capitaine vient d’être chargé de la graaaande affaire du moment : mettre fin aux agissement de la mystérieuse Marque Jaune qui multiplie les vols les plus invraisemblables dans la capitale anglaise, au nez et à la barbe de la police impuissante. Scotland Yard reste sans la moindre espèce de piste. Ca commence comme ça :

Lisez ce texte ! On ne fait pas plus ringard ! Mais quel charme des histoires à l’ancienne ! Bref, on se lance, pour voir carrément les joyaux de la couronne disparaître de la Tour de Londres, et encore un point d’exclamation ! C’est qu’on retrouve son âme d’enfant, et c’est avec le plus grand sérieux qu’on découvre les invraisemblables aventures de nos deux compères. De son côté, la Marque jaune poursuit ses exploits, manifeste des talents vraiment surnaturels, et se met maintenant à enlever d’éminents savants, pile ceux que Blake vient de rencontrer. Ça tombe bien, on est en pays de connaissance.

L’enquête démarre. Le coupable n’est pas trop difficile à trouver, c’est un peu réac, les textes sont un peu longs et serrés, mais qu’importe ! C’est le charme de Londres, des Clubs et du Tea Time. C’est notre enfance et donc, forcément, il y a un peu de nostalgie.

Et puis il y a le dessin. Excellent. La ligne claire comme Hergé (lui et Edgar P. Jacobs se connaissaient bien), les décors soignés, le mouvement par l’envol du vêtement… en toute élégance.

C’est aussi un monde totalement sans femmes. On se demande d’où tous ces beaux messieurs ont bien pu sortir, ou plutôt non, on ne se le demande même pas parce que c’est comme ça. C’est bien connu, les femmes ne participent à aucune aventure, aucune décision, aucun pouvoir. D’ailleurs on ne les voit même pas. De tout l’album, on les aperçoit à peine à l’arrière plan dans une foule, ou brièvement en secrétaire ou servante, effacées -dans tous les sens du terme-, tandis que de beaux jeunes gens ou de fiers vieillards menaient des vies passionnantes. C’est ça aussi, qu’on a avalé avec nos lectures d’enfance. Il faut bien le dire.

978-2870971703


29 novembre 2024

Olivia Sturgess 1914-2004 

de Floc'h & Rivière François 

**+


Je me suis terriblement ennuyée à la lecture de cet album de quand même 72 pages. (C’est long quand on s’ennuie.) Mais bon, je vais essayer d’en parler quand même et de votre côté vous allez essayer de vous souvenir que ce n’est qu’un avis subjectif. Je précise parce que je ne vais pas dire grand-chose de positif.

Tout d’abord, parus entre 1977 et 1984 dans Pilote Mensuel, soit la dernière période de Pilote et certes pas la meilleure, il y avait eu trois aventures, réunies ensuite en albums :

- Le Rendez-vous de Sevenoaks

- Le Dossier Harding

- À la recherche de Sir Malcolm

Dans un style revendiqué très british, ces aventures mettaient en scène deux personnages récurrents : l’écrivaine Olivia Sturgess et son ami, le critique littéraire Francis Albany. Cela se passait au milieu du 20ème siècle et on y parlait beaucoup d’Agatha Christie. Les énigmes étaient résolues par notre duo littéraire et l’intérêt résidait justement dans le décor social et les personnages littéraires réels qui étaient rencontrés et évoqués.

Paru vingt ans plus tard (quand même!) ce quatrième album entreprend de nous raconter la vie d’un des personnages, Olivia Sturgess (comment ça, vous aviez deviné?) à la façon d’un documentaire le plus réaliste possible… et cela est ennuyeux comme un documentaire, et encore, je suis injuste, on en fait maintenant de passionnants. Nous voyons Olivia grandir puis mener sa carrière d’écrivaine, vieillir… Les pages se tournent lentement et on se demande quand l’histoire va commencer, sans réaliser tout de suite qu’il n’y en aura pas d’autre que celle qu’on a déjà sous les yeux. La biographie fictive mais pas plus passionnante pour autant, est suivie de dossiers iconographiques évoquant des documents d’archive ou des photos… Voilà, voilà… soupir…

Je n’ai pas encore parlé du graphisme, alors allons-y, c’est le règne de la ligne claire à fond, mais une ligne claire raide. On pense plus à «Blake & Mortimer » qu’à Tintin, mais c’est moins bien que Blake et Morty. Beaucoup de cases se dispensent de tout décor. Pour tout arranger, la mise en scène est hyper statique, avec un texte plan-plan, comme le montre bien cette page. 

 C’est comme ça tout le temps. C’est d’un ennui ! (Mais je l’ai déjà dit, passons.)

Et le lecteur se demande pourquoi, mais pourquoi ! on lui a fait lire ça (et acheter, surtout!).

Je n’ai pas la réponse.

978-2205043471 



21 novembre 2024

Nez-de-Cuir

de Jean de La Varende

Adaptation Jean Dufaux

Dessin Jacques Terpant

***


Voici une bande dessinée prise beaucoup par hasard à la bibliothèque parce que la voir m’avait remis en mémoire ce roman oublié de Jean de La Varende. Ayant réalisé que je ne me souvenais même plus exactement de l’histoire, j’ai voulu me rafraîchir la mémoire tout en découvrant ce que des auteurs de BD du 21ème siècle avaient pu en faire.

L’histoire, tout d’abord. Des gueules cassées, la Grande Guerre n’est pas la première à en avoir produit, elles ont été le vilain fruit de toutes les guerres, depuis la nuit des temps. Celle dont nous allons parler ici est le résultat d’une bataille napoléonienne où le sémillant officier Roger de Tainchebraye ferraillait héroïquement comme il se doit. Las, un coup de sabre fort malveillant emporta la totalité de son nez, tandis que plusieurs autres l’envoyaient frôler les portes de l’autre monde. Frôler, seulement et le Comte ayant survécu doit maintenant entamer une autre vie où nul ne pourrait supporter la vue de son visage. C’est un Comte dont l’amputation est « masquée » par un nez de cuir qui regagne ses terres en Pays d’Ouche et, persuadé de ne plus jamais pouvoir être aimé, comble sa solitude en multipliant à l’infini les conquêtes féminines sans lendemain, jusqu’à ce que bien sûr, sa route ne croise celle d’une toute jeune femme dont la fraîcheur et l’innocence lui feront rendre les armes. Mais comment tout cela peut-il se terminer ?

Publié en 1936, ce roman censé rapporter l’histoire d’un grand-oncle de l’auteur est d’un romantisme tragique et débridé, comme on peut l’imaginer. Pour tout dire, le titre intégral est "Nez-de-Cuir, gentilhomme d'amour". Ça ne s’invente pas. Il connut le succès à sa parution où la résilience n’était pas encore de mode et où l’on aimait voir des héros nimbés ad æternam d’un drame douloureux (mais noble) et de belles histoires d’amour tragiques. Et, disons-le, ce n’est pas mal fait avec une analyse psychologique qui se tient (et même finesse des relations entre le Comte et le Marquis de Brives), mais une absence totale de vision sociétale. 

En ce qui concerne la bande dessinée, elle est hyper classique, bien dessinée bien que sans doute un peu figée, mais sans surprise, ni fantaisie sans même parler d’originalité. Vraiment, je ne vois pas ce que je pourrais en dire. Elle ne m’a pas plus choquée qu’enthousiasmée. Excusez ma tiédeur, je préfère les BD moins classiques.

9782754825337



20 octobre 2024

Inoubliables

de Fabien Toulmé

***


Pas totalement convaincue par cet album graphique qui regroupe "six histoires vraies" sous le titre "Inoubliables". Alors, peut-être cela vient-il tout simplement d'un malentendu sur le contenu. Je m'attendais à des récits de ces moments spéciaux, spécialement ravissants ou au contraire horrifiants, mais en tout cas à haut impact sur notre esprit, qui s'y sont gravés et sont et seront toujours là. En fait, c'est autre chose. "Le jour où ma vie a changé" aurait été un titre plus juste. L'auteur a choisi de nous raconter six vies malheureuses que leur personnage principal a un jour décidé de changer. Ce n’est pas sans intérêt, mais quand on a une certaine attente pour un livre et qu'on trouve autre chose, il y a toujours un flottement.

Le six vies en question sont sinistres. Les deux premières sous emprise religieuse, puis un viol et carrément le massacre rwandais et une histoire de couple pas très jolie. Le dernier enfin, le plus long, est l'édifiante histoire d'un homme qui après une jeunesse voyouteuse et une sortie de prison pour devenir un mari violent est retourné en prison où il a reçu une formation professionnelle. Malheureusement, à sa sortie il s'aperçoit que travailler, c'est fatigant et que ça ne paie pas tant que ça, alors il replonge bien plus profondément dans les trafics et se retrouve une troisième fois en prison. Parlant au nom de ses codétenus, il se fera remarquer et cette fois, à sa sortie, c'est la politique qui lui tendra les bras. L'histoire s'arrête là. J'en vois qui ricanent, mais ce n'est visiblement pas l'intention de l'auteur.

Bon.

Bilan, toutes les histoires m'ont laissée avec l'impression qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, comme si le regard sur ce qu'on racontait était biaisé -à mon point de vue du moins- ou la situation elle-même, et avec des personnages dont aucun ne m'a vraiment touchée.

Le graphisme est simple, chaque histoire illustrée sur deux couleurs complémentaires. Classique maintenant. Rien qui choque, mais rien qui enthousiasme non plus.

Tout cela fait un album que je ne descendrais pas en flammes mais que je ne conseillerais pas non plus. Faites comme vous le sentez.

9791034764570



16 octobre 2024

Crayon noir - Samuel Paty, histoire d'un prof

Texte de Valérie Igounet

Dessins de Guy Le Besnerais 

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Une fois encore, la forme graphique a été choisie pour présenter un dossier extrêmement sérieux, précis et documenté. Cette fois, il s'agit du meurtre de Samuel Paty, professeur d'Histoire, par des fanatiques religieux le 16 octobre 2020. Cette date anniversaire, quatre ans plus tard, est le bon moment pour en parler.

Le choix de la forme graphique me parait être une excellente idée car elle permettra à de nombreuses personnes qui ne se seraient pas lancées dans la lecture d'un volume serré, d'avoir accès à tous les faits et leurs enchaînements. C'est par ailleurs, une totale réussite. Ce livre devrait se trouver dans toutes les bibliothèques et CDI pour le sérieux de son enquête et l'objectivité de sa narration.

Le graphisme est clair, dépouillé mais hyper réaliste et juste. J'ai aimé ces dessins. Les portraits sont frappants. Les couleurs sont en à plats. L'album commence par l'enterrement et les cérémonies d'hommage, les honneurs officiels, tout un pays horrifié derrière son cercueil. Ensuite, l’album reprend le film des évènements depuis le tout commencement, sans omettre le passé professionnel de l'excellent professeur motivé qu'était Samuel Paty.

On est juste après les massacres de Charlie Hebdo et le professeur entreprend de faire un cours sur la liberté de la presse dans une République.


Et on voit comment de petit mensonge en exagération et diffusion d' "informations" non vérifiées, on voit les gamins se donner de l'importance en répétant des versions de plus en plus intéressantes mais également de plus en plus éloignées de la réalité.

.. et les adultes qui s'en mêlent, mais hélas pour ne faire qu'amplifier et dramatiser et diffuser la désinformation et la haine. On n'est consterné de voir ça. Partir de si peu pour déclencher un tel torrent de haine, et finalement cet acte odieux. On a un sentiment d’impuissance face à un engrenage. Comme toujours, à part l'assassin final, personne n'aura rien fait, ou presque rien, et ne se reconnaît coupable que de pas grand chose: de s'être trompé ou plutôt d'avoir été trompé, d'avoir mal réagi, mais parce qu'on avait insulté sa religion (en fait non, alors, qu'est-ce que c'est que cette réponse?) etc. Toutes ces petites malveillances ordinaires mais terribles, participaient en fait d'un assassinat annoncé. On espère que c'est ainsi qu'ils seront jugés et on leur souhaite de réaliser un jour ce qu'il ont vraiment fait.

Les collégiens qui avaient alimenté la campagne de diffamation contre Samuel Paty et permis son assassinat ont été condamnés à des peines de prison avec sursis allant de 14 à 24 mois. Le procès des adultes est prévu pour fin 2024. Tiens! C'est bientôt. Quelles seront leurs peines?

Au vu de l’immobilisme de l’administration ou de la police qui étaient au courant de la situation et avait promis protection, la famille Paty a porté plainte contre l'Etat pour non assistance à personne en danger et non empêchement de crime. On attend.

Depuis le drame, un proviseur s'est trouvé pris dans une spirale similaire à celle qui a emporté S. Paty et a choisi de démissionner peu confiant en la protection qu'il pouvait espérer. Combien de proviseurs ou professeurs allons nous encore céder à l'obscurantisme, nous qui en manquons déjà? Je ne parle même pas de ceux qui, au vu de la situation, ne s'orienteront pas vers l'enseignement.

9782958292782



09 octobre 2024

La Désolation

Scenario : Appollo

Dessin : Gaultier

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Jean-Louis Payet, auto-rebaptisé Évariste Payet, instit à La Réunion, a vendu le peu qu’il possédait sur un coup de tête et a disparu du jour au lendemain sans rien dire à personne. Il a acheté un billet sur le Marion Dufresne, en partance pour les Kerguelen. Le Marion Dufresne n’est pas un navire de croisière mais un bateau ravitailleur qui fait le trajet en emportant le fret et quelques passagers. Parmi ceux-ci, les scientifiques qui travaillent aux Kerguelen et quelques touristes en quête de périples un peu moins fréquentés que les autres. Quant à Évariste, c’est une vieille chanson de Dave qui lui avait mis ce nom dans la tête et au moment de faire un break, il lui avait semblé que c’était la destination idéale.


 La première partie de la BD évoque la vie qui s’instaure à bord à l’occasion de cette cohabitation de hasard, chacun se racontant (les distractions ne sont pas si nombreuses), les scientifiques essayant de faire prévaloir une sorte de supériorité sur la valetaille touristique… Le trafic social ordinaire et commun à tout microsome, quoi. Chacun occupe ses journées comme il peut ou veut, s’ennuie un peu. C’est assez reposant, introspectif et je crois que j’adorerais ça. Sans doute plus que le séjour sur place. Bref, on finit quand même par arriver. On échange les T-shirt contre des doudounes et on débarque sur l’île de La Désolation. Faut toujours écouter ce que disent les noms. Ils ne sont jamais donnés au hasard.

Les passagers découvrent ou retrouvent la base, se mettent au travail pour les uns, se font expliquer les lieux pour les autres. Evariste apprend que cette île de la Désolation est tout particulièrement éco-protégée. On lui propose bientôt une randonnée dans une zone inhabitée, c’est un peu sportif (6 heures de marche) mais c’est une occasion exceptionnelle de découvrir les vraies Kerguelen et il accepte, bien sûr. Seulement, alors qu’il sont au cœur de cette zone réputée totalement désertique, voilà qu’ils sont sauvagement attaqués par des agresseurs qui ressemblent à des hommes préhistoriques. Il y a des morts et Évariste a une jambe cassée. Il est capturé ainsi qu’un autre touriste et ils sont emportés. Ce qui va lui arriver ensuite, vous le découvrirez si cela vous intéresse.

Un dessin coloré et sombre à la fois, assez violent, expressif, très réussi. Il convient parfaitement à ce récit.

Évariste est un personnage principal qui reste assez neutre au cœur du lecteur. Les gens qui disparaissent comme ça du jour au lendemain sans prévenir personne livrent lâchement leur entourage à tous les tourments (Ils vont commencer par chercher partout s’il leur est arrivé malheur) et les empêchent de se reconstruire (ils ne savent pas si cette disparition est volontaire ou non, si elle va durer quelques jours ou longtemps ou toujours…). Le lecteur suit donc les aventures d’Evariste d’un œil plutôt objectif et compte les points sans préjugé. C’est le parfait angle de vue pour découvrir tout ce qui va se passer sur ces peu hospitalières îles Kerguelen.

Suspens !

 9782205085167