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10 août 2025

1984

Roman graphique

de George Orwell (Auteur), Fido Nesti (Illustrations)

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9782246825760


« atmosphère envoûtante et le dessin aux teintes fantastiques de l’illustrateur brésilien Fido Nesti »  nous annonce l’éditeur qui n’hésite pas à ajouter « Il s'agit d’un des événements éditoriaux les plus importants de l’année à travers le monde. » On est modeste ou on ne l’est pas, mais ça a failli me faire passer à coté de cet album.

Je lis « 1984 » depuis mon adolescence, autant dire que ça date un peu. J’ai dû le lire intégralement trois ou quatre fois et y repenser des millions de fois. A chaque fois que je le lis, j’admire à nouveau la clairvoyance d’Orwell. Il avait déjà tout vu. On s’aperçoit aujourd’hui que notre monde a légèrement dévié de la trajectoire qu’il prédisait, ayant jugé plus facile et efficace de réduire les gens au confort du cocooning qu’à la misère maximale. Mais le résultat est le même et surtout, les moyens d’y arriver et de s’y maintenir. Bref, j’ai eu envie de relire encore une fois ce chef d’œuvre, et en même temps, de voir comment un dessinateur avait pu se tirer de cette gageure.

Au début, j’ai eu de mal à accepter le dessin. Les teintes de rouge et grisaille brune, sont tristes mais correspondent au récit. Par contre, je trouve que c’est souvent beaucoup trop sombre, au point d’être parfois peu lisible. C’est un défaut que je constate de plus en plus souvent. Je sais que ma vue baisse, mais je crois aussi que le dessin numérique a facilement ce défaut.


Le deuxième défaut constaté, c’est qu’à chaque fois que du texte anglais se trouvait dans le dessin, il n’avait pas été traduit, et cela concernait parfois des choses importantes qu’il fallait que le lecteur saisisse.


Et puis, voilà, rassurez-vous, mes reproches s’arrêtent là car, une fois le livre terminé, je me suis aperçue que je m’étais habituée au graphisme et aux couleurs qui ne me séduisaient guère au départ et que j’admettais qu’ils avaient complètement fait le job. C’était quand même un sacré défi que de se lancer dans cette retranscription graphique du roman d’Orwell. Il fallait oser et ne pas se ridiculiser totalement dans l’aventure. Je dois reconnaître que Fido Nesti a parfaitement réussi. Il a reproduit fidèlement la progression et la thèse de l’œuvre. Il n’a pas simplifié. Il a marqué toutes les étapes, et les points de l’analyse orwellienne. Il a rapporté ses arguments et démonstrations sans les appauvrir, et ça, dans une BD, ce n’était pas facile. Donc, bravo à lui aussi.

Et surtout, n’oubliez pas :

«Depuis le début du XXème siècle, l’égalité était techniquement possible. Avec le développement de la production, s’il était encore nécessaire d’employer les hommes à des tâches différenciées, il ne l’était plus de les faire vivre à des niveaux sociaux ou économiques distincts. »

Et pourtant...


17 juillet 2025

Le teckel T1

d’Hervé Bourhis

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978-2203089686

"La clarté est la politesse de l'homme de lettres" disait Jules Renard. Il n'aurait pas été content. Rien n’est clair ici, ni l’histoire (l’intermède de la salle d’opération est complètement déconcertante et on peine à la rattacher à quoi que ce soit), ni les personnages (leurs personnalités, rôles respectifs et relations étant très mouvants, quant à leurs intentions… tout est possible), ni le graphisme et j’ai dû m’user les yeux pour déchiffrer les textes de plusieurs vignettes.

L’histoire d’abord. C’est une sorte de road movie à la française à l’époque actuelle. Guy Farkas, alias Le Teckel : un vieux représentant de commerce hyper ringard (look seventies)

mais néanmoins redouté, que sa direction veut virer (ou pas) est contraint de faire sa tournée avec un nouveau venu, un blanc bec aux dents longues (ou pas) que la direction a peut-être chargé de contrôler le Teckel, mais va savoir ce que veut vraiment la direction... Chacun n’étant peut-être pas non plus ce qu’on avait cru d’abord… mais ça encore, ce n’est pas clair. Bref comme on s’en doute, les deux se détestent d’entrée de jeu et leur relation va évoluer quand ils se connaîtront un peu mieux (of course). Mais peut-on se connaître dans un monde de concurrence et de mensonge ?

J’ai dit au départ que ce sont des représentants de commerce et je maintiens mais eux disent «visiteurs médicaux». On les croisait autrefois dans les salles d’attente des médecins. (C’était l’époque bénie où vous pouviez débarquer chez le toubib sans rendez-vous pris 6 mois à l’avance. Soupir…) Mais ne nous laissons pas aller aux regrets. Le travail n’est pas facile pour ces deux-là car ils essaient de fourguer le Marshall2, un antidouleur qui a déjà tué plusieurs centaines de personnes dans sa version 1. Charge à eux de convaincre tout le monde que cette version 2 est sans danger. Certains médecins sont un peu réticents tout de même, et les malades un peu au courant car l’affaire a fait scandale, le sont plus encore. La Direction reste de marbre, seules les ventes comptent, notre duo de choc est apparemment dans le même état d’esprit. En tout cas, Le Teckel qui a dû diffuser des centaines de boites du Marshall1 et donc tuer plusieurs personnes, n’est en tout cas pas troublé par la chose. Cynisme à tous les étages. Je ne déteste pas en général, quand il y a un petit arrière fond sarcastique qui laisse entrapercevoir une arrière-pensée plus élevée, mais là, non.

Nous allons suivre le road movie de ces deux aventuriers des Formule 1 et des bars glauques pour constater que, comme on pouvait s’y attendre, il est pathétique et généreusement émaillé d’incidents sordides et de mésaventures honteuses.

Petit bilan une fois l’album refermé : 3*/5. J’aime et je déteste le dessin. J’aime le graphisme expressif mais je déteste les couleurs souvent trop sombres qui nuisent à la lisibilité (des textes, bien sûr, mais même les dessins se perdent dans ces bains verts et magenta). Je reconnais le travail qui a été fait, mais je n’ai pas aimé. Je l’ai trouvé peu lisible à tous points de vue comme dit plus haut, et j’ai trouvé au final que ça n’’allait nulle part. Je sais qu’il y aura encore deux tomes des aventures du Teckel qui se lancera dans la politique (une option évidente avec l’éthique qui est la sienne), mais ce sera sans moi. J’aime bien voir ce que je lis. Mais y a quand même aussi des qualités...

08 juillet 2025

L’enquête corse Jack Palmer -

René Pétillon

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978-2723469425

(Si vous ne voyez pas bien, cliquez sur l'image)


Il faut avoir en mémoire que cet album a été publié en 2000. Les années 90 qui venaient de s’écouler avaient été marquées par une situation agitée, confuse, mouvementée et même violente en Corse. Les groupes indépendantistes se multiplient, se scindent, s’unissent, se combattent… Des bombes sont posées, des balles tirées… La gendarmerie est débordée. Ça explose un peu partout et on ne sait pas toujours qui a posé la bombe ni même pourquoi, quant à le prouver… autant y renoncer tout de suite car s’il n’y a qu’une seule constante, dans tout cela, c’est que personne n’a rien vu ni rien entendu. Omerta.

C’est dans cette île paradisiaque que débarque notre jack Palmer, chargé par un notaire parisien de retrouver un certain Ange Léoni, adresse inconnue, pour lui remettre une lettre suite à un héritage. Palmer ignore tout de la Corse, mais comme toujours, il est confiant. On lui confie une mission, il la remplit sans chercher plus loin. Il a toujours la même technique d’investigation : il va au cœur des lieux concernés et pose directement la question aux gens qui s’y trouvent.

 Or il se trouve qu’Ange Leoni n’est pas n’importe qui. Pour commencer, il a vraiment disparu et si les gens qui le cherchent sont nombreux, ce n’est pas juste pour lui remettre une lettre. Leoni, qui a transité par un peu tous les groupes clandestins, est à chaque fois reparti avec la caisse et c’est à ce sujet que ces messieurs ont des questions à lui poser. 


Ils ne sont pas peu surpris de voir débarquer l’improbable Jack Palmer qui, isolé qu’il est sur son petit nuage, ne se laisse pas démonter par l’ambiance.

Encore un grand moment de l’investigation policière et de l’enquête socio-politique avec notre détective préféré au mieux de sa forme puisqu’il remporte le Fauve d'or - 2001 à Angoulême avec ce titre. Un film en a été tiré mais je ne l’ai pas vu et ne peux donc pas en parler. (PS : Je n’ai jamais vu un bon film tiré d’une BD, mais je dis ça, je dis rien.)

24 juin 2025

Puzzle

de Franck Thilliez et MIG

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9782359105407

J’ai emprunté ce roman graphique à la bibliothèque parce que je n’ai jamais lu de roman de Franck Thilliez et que cette forme BD me permettait de le faire sans devoir lire 400 ou 500 pages de texte car je craignais que cela ne m’interesse pas beaucoup. Il s’est avéré que j’avais raison, je n’ai pas du tout été convaincue par ce scenario indigent. Pour résumer : le héros, un homme jeune, a été quitté par sa petite amie, mais ils participaient ensemble à un jeu de chasse au trésor en ligne et c’est en tant que partenaire qu’elle le recontacte car elle a trouvé un nouvel indice qui leur permet de progresser vers le faramineux butin de 300 000€.

Bon, alors, ce n’est pas compliqué. Vous voulez faire une histoire horrifique, vous vous demandez quels sont les décor effrayants où vous pourriez la situer pour mettre le lecteur en condition et vous vous répondez : cimetières, prison, hôpitaux borderline, salles chirurgicales ou de torture, asile psychiatriques avec enfermement, lobotomie forcée etc. Ah oui ! Très bon, ça ! On y va.



Le jeu conduit donc nos deux héros dans un ancien asile psychiatrique de sinistre réputation, maintenant abandonné. La sinistre réputation tient au fait que dans le passé, de nombreuses lobotomies et autres chirurgies sur des patient pas forcément consentants, y ont été pratiquées. Il est maintenant désert, ce qui ne le rend pas plus accueillant, d’autant que "pour ne pas être dérangé", des chiens féroces sont lâchés dans le parc qui l’entoure. Les derniers finalistes se retrouvent là pour la fin du jeu et l’attribution du trésor tant convoité. Dès l’arrivée, un message les avertit que rien ne sera réel à partir de cet instant car le jeu a commencé. Un message, car ils ne rencontreront jamais personne d’autre que les autres participants. Ils ne verront pas le/la/les (?) Maître du jeu. Ils trouvent bientôt un second message qui lui, dit que l’un d’entre eux va être tué. Est-ce un avertissement à prendre au sérieux ou cela fait-il partie du jeu ? Faut-il chercher à s’enfuir ou à découvrir les indices qui mèneront au trésor ? Etc.

Rien de bien nouveau, vous le voyez et rien d’original. On va enchaîner les clichés, la salle d’opération à l’abandon mais qui a l’air de servir quand même, la morgue déserte avec des corps présents ou pas… des cellules fermées, l’obscurité totale après une certaine heure, le doute entretenu en permanence et à bon compte sur la réalité ou la fiction d’un jeu de rôle (malgré quelques cadavres…) Une ou deux scènes un peu osées, mais si convenues… ! Et vous aurez même votre cimetière abandonné !


(pour info, il n’y a pas la moindre touche d’orange dans tout l’album à part un peu de rouge sur la couverture)

Donc, je le disais, on n’est jamais vraiment surpris. "Horreur" à bon marché et c'est parti pour une succession de clichés. Pour conclure, la clé de l’énigme est à la hauteur de ce qui a précédé.

Le travail du dessinateur en noir, bleu, blanc, est très professionnel et colle bien au texte. Rien à redire de ce côté. Rien de particulièrement inspiré ou artistique non plus, mais bon, il remplit le contrat.


19 juin 2025

L'intranquille monsieur Pessoa

de Nicolas Barral

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978-2205206142


De Fernando Pessoa, je savais peu de choses : qu’il était portugais, que c’était un poète et un romancier. C’est léger. Aussi, quand j’ai vu cette biographie sous forme de roman graphique, je l’ai prise sans trop hésiter. Une bonne façon de combler mes lacunes. Je ne connaissais pas du tout l’auteur : Nicolas Barral, qui a tout fait ici, texte et dessins et ce, me semble-t-il pour la première fois. Si je ne me trompe pas, dans ses parutions précédentes, il n’était qu’illustrateur. Il a travaillé très sérieusement, comme l’atteste la bibliographie conséquente fournie en fin d’ouvrage, mais arrivé là, vous n’aurez de toute façon aucun doute à ce sujet. Les cinq étoiles que je lui colle aujourd’hui, attestent d’une biographie dessinée particulièrement fine, intelligente et réussie.

Nous commençons avec le personnage de Simão Cerdeira, jeune journaliste lisboète débutant en plaçant des piges dans différents journaux. Il rêve bien sûr de littérature, mais déjà, il doit assurer sa subsistance et un emploi de journaliste le comblerait. Parallèlement, Fernando Pessoa, pas si vieux mais rongé par son alcoolisme, va mal. Très. La rumeur se répand dans les milieux littéraires qu’il ne survivra plus longtemps avec son foie détruit par la cirrhose. Homme étrange et solitaire, aux positions politiques parfois douteuses, Pessoa est néanmoins un homme de lettres dont le talent est unanimement reconnu, aussi, dans les rédactions, commence-t-on à préparer des nécrologies à la hauteur du personnage. C’est la tâche qui est confiée à Cerdeira. Conscient que son avenir se joue là-dessus, et par ailleurs, réellement admiratif du talent de Pessoa, le jeune journaliste va mener une enquête très complète, lire ses œuvres, rencontrer le plus possible de personnes l’ayant connu de près aux différents moments de sa vie. 



C’est tout ce travail d’enquête que nous allons suivre. Parallèlement, nous allons suivre le Poète lui-même, depuis le dernier avertissement de son médecin jusqu’à son dernier souffle, et découvrir un homme qui a choisi de vivre seul, dans son monde intérieur. Contentant à bon compte son peu de besoin de compagnie par son passage quotidien chez son barbier voisin et sans doute quelques cafés pour les bavardages… C’est que Pessoa, on ne sera pas surpris de l’apprendre, a une vie intérieure très intense, et même, pourrait-on dire, très peuplée. Depuis toujours, il écrit sous plusieurs pseudonymes, refusant farouchement d’admettre que ces alias n’existent pas, il affirme toujours qu’il les connaît, les fréquente et n’est que leur porte parole. Ils lui ont remis leurs notes ou leurs manuscrits, il en a une malle pleine, à charge pour lui de les mettre en forme et les diffuser. Il ne variera jamais de cette version si bien qu’il est difficile de savoir exactement quelle conscience il avait lui-même de la chose. On pense à Antoine Volodine, et à ses multiples alias, la confusion des identités en moins. C’est ça être un poète et pas seulement un romancier.

Donc, richement documenté, présenté de façon extrêmement vivante, finement vu et intelligemment montré, j’ai adoré cette biographie qui montre tout, ne juge rien, et accompagne le poète de façon si humaine. Le dessin quant à lui, m’a enchantée. Quel talent ! Quelle union heureuse des couleurs (collaboration de Marie Barral), des angles de vue, des éclairages ! Cette BD est une totale réussite. Bravo.



05 juin 2025

L'affaire du voile

de Pétillon

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9782226132451

Comme ma précédente chronique le laissait deviner, j'ai bien vite retrouvé les fabuleux dessins de Pétillon et mon Palmer adoré qui cette fois officie à domicile : Paris et région parisienne. De plus, alertée par le titre de ce treizième opus, je brûlais de curiosité : Comment allait-il se dépatouiller d'un problème aussi délicat qu'une affaire de voile?

Comme l'époque le veut, les contacts avec les clients se font maintenant par internet. Réseaux sociaux, e-mails et documents virtuels... Vous l'aurez peut-être deviné, Jack Palmer ne maîtrise pas vraiment. On pourrait même dire que chez lui, tout ce qui passe par l'informatique peut être considéré comme perdu. Cela ne simplifie pas les choses quand il s'agit de faire tourner sa petite entreprise... Mais enfin, présentement, il a une enquête.

Jack a été chargé par une mère éplorée de retrouver sa fille qui a fugué. Il est sur une piste et il semblerait que cette fille de la grosse bourgeoisie (père chirurgien de renom, mère dentiste) se soit soudain convertie à l'islam le plus radical et qu'elle ne vive plus maintenant que strictement voilée. Les parents qui n'avaient rien vu venir ne l'entendent pas de cette oreille.


Comme à son habitude, Palmer fait simple. C'est un type sans complication. Il cherche une femme voilée, il fait donc le tour des magasins adéquats

Puis va tout bonnement poser la question dans les quartiers tout aussi adéquats. Il ne voit aucun problème à aller tout aussi simplement la poser aux lascars du coin.


Il rencontre un imam non intégriste qui le reçoit bien mais sait peu de choses, et qui a des soucis avec les intégristes qui lui font concurrence et ont envahi sa mosquée. Alors, Palmer les rencontre aussi. De voile en burqa, son enquête va le mener à la porte d'un pensionnat coranique pour femmes, aussi fermé qu'on pouvait le supposer. Aux grands maux, les grands remèdes, Palmer va passer à l'action. Autant dire que tout peut arriver... et on ne sera pas déçus.

Encore une brillante enquête de notre génial détective et je louche déjà sur la prochaine parce que Jack Palmer, c’est comme les cacahuètes, plus on en prend, plus on en a envie. Il n'aurait pas fallu recommencer, mais c'est trop tard...


27 mai 2025

Palmer en Bretagne

de René Petillon

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Pas revu Jack Palmer depuis des décennies! C'est dire. Et voilà que le hasard me met celui-ci entre les mains, c'est le 15ème de la série, il date de 2013. On dirait que ca a été le dernier.

Nous retrouvons notre vaillant détective, toujours aussi vif et bien habillé. Cette fois, il a été engagé comme garde du corps par un milliardaire trois fois plus grand, gros et fort que lui, et bien plus méchant. D'ailleurs, Palmer semble le plus inoffensif de toute la bande qui se trouve réunie là pour un week-end de repos entre gens riches. Erreur de casting sans doute car on ne voit pas ce qu'il pourrait faire pour protéger son milliardaire.

Nous sommes sur une île bretonne, ce qui simplifie la surveillance contre les intrusions. Seuls y ont accès, les invités de Solange Pommeraie et les quelques locaux qui font vivre les lieux. Tout ce beau monde bien bling-bling se surveille et se jalouse comme des hyènes. Aux divers désagréments du séjour s'ajoute une très envahissante et très puante algue verte dont le locaux s'épuisent à nier les méfaits quand ce n'est pas la présence même. Décors et personnages étant en place, Palmer se met au travail

Malheureusement, ayant choisi de se "poster" sur un rocher où personne n'avait jamais songé à se mettre et qui est bientôt entouré par les flots, c'est là que notre détective commencera et finira toute cette aventure tandis que sur l'ile, il y aura destruction d’œuvre d'art, meurtre, visite préfectorale en hélicoptère, poursuites de gendarmerie sur terre, sur mer et dans les airs, des scènes torrides et même un naufrage! C'est pourtant lui qui donnera finalement la clé du mystère. Sacré Palmer !

Les dessins sont vraiment remarquables. Quel talent, ce Petillon! Les expressions sont irrésistibles. L'histoire est bonne, les relations sociales sont un régal de férocité et l'humour est partout, parfois un peu caché. L'auriez-vous vu, celui-là? :

... ce qui, si je compte bien, nous fait une marche tous les... 😂 Mais tous les patelins qui ont un phare ou une tour aiment bien majorer un peu le nombre de marches. C'est humain. Ça fait ça aussi pour la hauteur des falaises, mais là, il n'y en a pas.

Je pense que je vais me faire une petite cure de Jack Palmer, tiens, c'est bon pour ce que j'ai.


Série Jack Palmer:

1- Gourous, derviches et co. en 1979 sous le titre Une sacrée salade en 1981

2- Mister Palmer et Docteur Supermarketstein

3- La Dent creuse

4- Les Disparus d'Apostrophes !

5- Le chanteur de Mexico

6- Le Prince de la BD

7- Le Pékinois

8- Un détective dans le Yucca

9- Narco-dollars

10- Un privé dans la nuit

11- Le Top-model 1995. Renommé L'Affaire du top-model en 2001 ;

12- L'Enquête corse

13- L'Affaire du voile

14- Enquête au paradis

15- Palmer en Bretagne


Hors-série : Le Meilleur et le pire de Jack Palmer

978-2205070576


18 mai 2025

VilleVermine, Le tombeau du géant

Julien Lambert

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978-2377317783

Ceux qui suivent le savent déjà, j’ai découvert Julien Lambert et sa VilleVermine il n’y a pas si longtemps de cela avec les deux premiers volumes des aventures de Jacques Peuplier et j’avais été largement convaincue. Je me suis donc empressée de lire le troisième volume et deuxième aventure (les deux premiers tomes n’étant qu’une seule enquête). Cette fois, nous avons la totalité de l’histoire dans le même volume, ce que je préfère.

Tous les ans à VilleVermine, est célébrée la Fête de la mort du Géant. Cette fête est organisée par la petite-fille de Boris Tassard, le héros qui, d’un coup de sa hache, baptisée Fendeur, étendit raide le monstre qui faisait subir de cruels sévices à la population. Ce monstre était un horrible géant dont personne n'avait pu venir à bout. Boris fut donc traité en héros et bénéficia de la reconnaissance de la population. Cette fête annuelle, qui tient beaucoup du carnaval, maintient vif ce souvenir mais cette année, l'héritière des Tassard voudrait donner plus d'éclat à la fête en présentant à la foule le Fendeur qui a disparu après les faits. C'est bien naturellement à notre Retrouveur d'objet préféré qu'elle s'adresse pour ce faire. L’enquêteur mènera ses recherches malgré la fâcheuse manie qu'ont les témoins d'être déjà morts à son arrivée. Cette aventure va faire découvrir à Jacques (et à ses lecteurs) ce qu'il y a sous VilleVermine, une ville souterraine... pas plus propre que celle du dessus, et habitée par une population constituée de sorte de moines guerriers pas très sympathiques, Mais c'est là que se trouve le Fendeur... et un autre géant. Le Fendeur se révèle être encore plus redoutable que dans la légende, quant au géant... je vous laisse découvrir, mais sachez que Jacques ne déteste toujours pas la baston.

Une Bande dessinée dont j'adore le graphisme et qui, derrière une histoire très originale et captivante, traite comme en passant de domination patriarcale, de gestion sociale des différences, de ce que cachent et à quoi servent les légendes, de pulsions de violence et de boucs émissaires. Et au passage, Jacques en vient à se dire qu'il devrait peut-être enrichir un peu sa vie sentimentale. Captivant, je vous dis.


Direct 5 étoiles. Vivement une troisième aventure !


09 mai 2025


L'anniversaire de Kim Jong-il

Scenario d'Aurélien Ducoudray

Dessins de Mélanie Allag

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9782756051543

Epoque actuelle, Corée du Nord de Kim Jong-il. Le récit est fait du point de vue de Jun Sang, petit garçon de 8 ans qui a la particularité d'être né le même jour que le bien-aimé dictateur, et c'est une chance car dans son pays, il est interdit de fêter les anniversaire, sauf celui du chef suprême. Mais lui, petit Chef des Jeunesses Patriotiques de son quartier, a ainsi un peu l'impression d'être honoré. "Il vit comme on lui apprend à l'école : le grand leader veille sur lui, lui désigne ce qu'il doit faire et ceux qu'il doit haïr de toutes ses forces" et ça, de la haine, il y en a. de la haine, de la surveillance, de la délation, de la maltraitance et de l'abus de pouvoir qui n'en est même plus tant tout pouvoir est pratiquement illimité dans sa sphère.


Jun San et tous les gamins sont complètement embrigadés et vouent un amour sans bornes à leur "cher dirigeant" qu'ils imaginent comme une bienveillante figure paternelle infaillible. Le conditionnement est total. Entre l'école et les rudes travaux obligatoires dans les champs, il y a les "jeux" mettant tous en scène des luttes glorieuses de soldats coréens contre le reste du monde, tous de cruels tyrans réduisant leurs peuples à la misère. Les gamins se rêvent en héros donnant leur vie pour sauver la Corée du Nord et son "leader bien aimé" et, tout comme les adultes sont perpétuellement en chasse du moindre signe de "déviation" pour le dénoncer. La réalité, qu'ils ne voient pas bien qu'ils soient en plein dedans, c'est que la corruption règne en maîtresse et que c'est eux qui vivent dans la misère et mènent une existence extrêmement difficile. Mais peu à peu, de restriction en collecte pour le pays, on passe de la misère à fla amine et cela devient vraiment intenable. A la mort de son père, Kim Jong-il succède à Kim-il Sung et les choses ne font qu'empirer.


La famille de Jun Sang, qui a des origines sud coréenne finit par envisager de passer la frontière, mais le voyage est très dangereux. Trahi et dépouillés par les passeurs, l'aventure se terminera dans un camp. La suite, je vous laisse la découvrir.


Cette bande dessinée dresse un portait très évocateur de la vie dans une dictature et la façon dont la réalité y est niée et où chacun est à la fois bourreau et victime dans un grand élan d'aveuglement général. Je pense que c'est une constante de toutes les dictatures, et c'est très bien montré ici, de l'intérieur. Le récit court sur 8 ans et c'est un jeune homme de 16 ans que nous quitterons en tournant la dernière page. Les dessins, en couleur, puis en noir et blanc pour les périodes les plus sombres, sont à la hauteur de l'entreprise exigeante qu'était ce récit. Adolescents et adultes seront intéressés. Il y a à voir et à apprendre.  



30 avril 2025

Moi, Fadi, le frère volé - T1 (1986-1994)

de Riad Sattouf

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978-2959133725


Les 6 tomes de L'Arabe du futur se terminaient par les retrouvailles entre Riad et son frère Fadi et le dernier laissait voir une légère incompréhension entre eux. Chose bien naturelle puisque élevés séparés dans des cultures différentes et, pour Fadi, dans des mensonges quant aux autres membres de sa famille. C'est sans doute pour dissiper cette incompréhension et réduire la distance entre eux que Riad a amené Fadi à se raconter et a traduit ce récit en bande dessinée. Du moins, c’est ce que j’imagine. Quoi qu’il en soit, on comprend dans ces conditions qu'il serait peu judicieux de lire cette BD sans avoir auparavant lu les 6 tomes de "L'Arabe du futur".

Ce pauvre Fadi brusquement arraché à sa mère et à tout ce qui faisait son monde, pas du tout comme le montre une couverture que je ne comprends pas, mais au prix d'un vrai enlèvement par tromperie alors qu'il n'avait que 4 ans, a vraiment vécu dans son enfance un traumatisme affreux qui émeut le lecteur.


On le suit dans le village paternel et on retrouve ce qui fut le monde de la petite enfance de Riad, comme nous l’avait montré « L’arabe du futur ». Le père, sans devenir ce qu'il espérait, a cependant amélioré sa situation sociale là-bas. Il a pris la prévalence sur son frère parce qu'il a gagné de l'argent. On ne sait pas comment. Sa fameuse villa, en construction depuis toujours, n'est toujours pas sortie de terre, mais il persiste à y croire. Il est mieux considéré, mais tout de même pas incontesté et, dans sa famille, tout le monde semble penser qu'il a eu tort de ramener Fadi. Le pauvre gamin, qui au début, pense que cette séparation ne sera que temporaire, ne cesse de réclamer sa mère alors que son père au contraire lui répète qu'elle ne veut pas le rejoindre. 

Fadi va à son tour connaître l'école syrienne, mais là aussi au moins, à défaut d'enseignement de qualité, le père se montre plus capable de protéger son fils. Les années passent, Fadi oublie un peu et le père se remarie avec une femme qu'il rend aussi malheureuse que la première.

Comme indiqué, nous n'avons là que le tome 1, il nous faudra un second volume pour suivre Fadi jusqu'à son retour en France. Comme L’arabe du futur, c'est une histoire très intéressante. Peut-être un peu moins chargée d'émotion directe - ce qui est peut-être dû au fait que Riad Sattouf n'a pas vécu lui-même cette histoire - mais tellement émouvante! Et puis, on voulait tous savoir ce qui était arrivé à ce petit frère dont la disparition avait détruit la vie de sa mère.

L’auteur explique dans les interviews : "J’ai d’abord voulu avoir des réponses aux questions que je me posais : qu’a fait mon frère pendant toutes ces années ?" et comme on partage sa curiosité, on le suit volontiers dans cette voie.




21 avril 2025

Le bleu est une couleur chaude

de Jul Maroh

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978-2723498760


"Le Bleu est une couleur chaude" a obtenu divers prix et inspiré le film "La Vie d'Adèle", Palme d'Or à Cannes en 2013. Je n'ai pas vu le film et ne pourrai donc pas faire de comparaison et ce n'est que maintenant que je lis la bande dessinée.

Clémentine, lycéenne, sage fille unique de 15 ans vit une existence sans histoire quand un jour, tout simplement dans la rue, elle a un coup de foudre. Ce genre d'évènement ne lui parait pas vraiment possible, aussi décide-t-elle de ne pas en tenir compte... d'autant que l'objet de son coup de foudre a plusieurs années de plus, les cheveux bleus... et que c'est une femme. Or, Clémentine ne s'est jamais interrogée sur ses préférences sexuelles. Ça lui paraissait évident: les filles avec les garçons, et inversement. D'ailleurs elle a des flirts garçons. C'est vrai qu'elle n'a jamais vraiment envie d'aller jusqu'au bout avec eux, mais ça ne veut rien dire, c'est juste une question de personne, non ? Elle n'est pas attirée par les filles non plus. Du moins, elle ne s'est jamais posé la question avant, mais elle n'en a toujours pas l'impression. Elle a d'autres choses en tête, le bac blanc en l’occurrence, et le temps passe. Son expérience augmente un peu dans son milieu lycéen et son penchant lesbien se confirme. Un soir, le hasard la remet en présence de la femme bleue et elle ne peut que constater que son attirance est toujours aussi puissante et là, elle a l'occasion de lui parler, elle s'appelle Emma et semble aussi la trouver sympathique.

Le dessin est harmonieux, peu coloré, majoritairement sépia et bleu, est très explicite dans certaines scènes.

C’est un roman de formation pourrait-on dire. Dans cette BD, nous allons suivre l’éveil à la sexualité d’une adolescente, avec la particularité que c’est une homosexualité et que Clémentine va découvrir dans le même temps ce qu’est l’homophobie, au lycée, pour commencer, et jusque chez elle puisque ses parents ne veulent même pas en entendre parler. C’est bien fait, bien vu, sans exagération, et c’est avant tout une histoire d’amour, une passion sans concessions… La psychologie paraît assez juste et précise. C’est intéressant, que l’on soit concerné ou non, surtout si on aime les histoires d’amour, qui comme on le sait, en général...




12 avril 2025

VilleVermine Le garçon aux bestioles

de Julien Lambert

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Ceux qui suivent savent comment j’avais été brutalement stoppée à mi-parcours lors de ma lecture précédente de "L’homme aux babioles", heureusement, l’alerte aura été de courte durée et une rapide visite à la bibliothèque m’a mise en possession de la fin de cette première aventure. Je dis première car cela a été pour moi l’occasion de découvrir que Jacques Peuplier avait encore mené une autre enquête difficile, mais je vous en parlerai une autre fois, aujourd’hui je termine la première enquête avec ce "garçon aux bestioles".

Le garçon aux bestioles est bien le gamin sauvage rencontré dans le premier tome, celui qui est accompagné d’un gros matou pas commode et d’une sorte de grosse libellule, une "bestiole", quoi. Jacques se lance à sa recherche parce que s’il s’est tiré de justesse des griffes du savant fou, il pense que ce dernier lui a pris son don de parler avec les objets car la terrible vérité est là, il ne le peut plus. Or, sans ce don, Jacques n’est plus rien, il perd sa seule compagnie (car il fréquente peu les humains) et son métier de "retrouveur" d’objets. Il veut donc mettre rapidement la main sur le savant et lui faire rendre ce qu’il lui a pris. Jacques ne sait pas où se cache le savant, mais il se souvient que le gamin, lui, le sait. Il part à sa recherche. Ça n’est pas gagné non plus. Et je ne vous ai pas encore parlé de la super bestiole de 15 mètres…



Voici le thème de ce deuxième volume, plein de suspens, de dangers et même assez dramatique, pour le coup. Je dirais même que le tome un avait beau être excellent, celui-ci est encore meilleur. En effet, les personnages sont de plus en plus intéressants et attachants avec toute leur humaine faiblesse, loin de faiblir, l’action se durcit, les personnages s’épaississent, la réflexion est plus profonde également. Vraiment, une réussite, cette première enquête ! Je vous la conseille vivement. Et j’ai hâte de vous parler de la prochaine aventure de Jacques Peuplier.

Quant à l’intégrale (Tomes 1 et 2 ensemble) comme elle est parue en 2024, si c’est pour l’avoir en 16 X 20cm, pour moi, c’est non. J’aime le dessin et je déteste les mini-BD, on n’en profite pas.

978-2377312030