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10 janvier 2025

L'allègement des vernis 

de Paul Saint Bris

***+

Quatrième de couverture:

"Aurélien est directeur du département des Peintures du Louvre. Cet intellectuel nostalgique voit dans le musée un refuge où se protéger du bruit du monde. Mais la nouvelle présidente, Daphné – une femme énergique d'un pragmatisme désinhibé –, et d'implacables arguments marketing lui imposent une mission aussi périlleuse que redoutée : la restauration de La Joconde"

Excellente histoire, vraiment. Se déroulant dans un environnement très intéressant (les coulisses du Louvre) et mettant en scène (et même en danger) sa star numéro un, la Joconde. Et quand on quitte le Louvre, c'est pour se gorger des beaux paysages de Toscane !

Excellente histoire, disais-je, avec du suspens ; pas haletant, mais du moins qui ne retombe pas sans arrêt nécessitant des chocs de réanimation. Avec de plus, un petit vernis culturel qui vous donne l'impression d'apprendre des choses tout en vous passant un bon moment. Pour être sincère, il y a même des passages qui font penser à une resucée de guide ou de manuel, mais ça ne dure jamais plus de deux trois pages.

Le personnage principal est sympathique. On s'attendrit parce que sa femme, à laquelle il tient, est en train de s'éloigner. Il reconnaît qu’il est un peu casanier peut-être, quoique passant son temps à voyager ou à honorer des invitations. Assez lisse, le Aurélien. On (l'auteur?) ne lui trouve pas de défaut, et franchement, moi non plus.

Ajoutez à cela quelques belles histoires d'amour comme on n'en voit que dans les romans (alors justement, c'était le moment), des personnages qui disparaissent discrètement quand on n'a plus besoin d'eux. Des grandes passions, mais entre gens bien élevés.

Bref, ce roman sera très plaisant à lire pour beaucoup. Il a même reçu un prix. On sait ce que ça vaut, mais bon, quand même. Comme vous vous doutez, tout ne va pas être facile dans ce grand projet "Joconde" , et tout ne se passera pas non plus exactement comme prévu. De quoi maintenir l’intérêt du lecteur. Je connais des gens à qui je le conseillerai ou même l'offrirai, et je sais d'avance qu'ils seront contents de leur lecture.

Bon, maintenant, vous regardez les étoiles et vous tiquez un peu: pourquoi 3 1/2, alors? Eh bien pour moi, c'est le style. J'ai trouvé que c'était un peu léger d'un pont de vue littéraire. Entendons nous, c'est correctement écrit, mais le style, ou la littérature, c'est autre chose, quelques mots recherchés saupoudrés ici ou là ne suffisent pas.

D'abord, c'est bavard. On est loin de l’écriture "à l'os". Beaucoup de choses sont dites en cinq phrases au lieu d'une. Et puis, il y a des sautes de style, comme on a des sautes d'humeurs. J’ai évoqué les pages-documentaires, mais il y a de plus en plus en progressant dans l'ouvrage, des variations de styles affirmés qui ont toutes la particularité de ne pas convenir à la situation évoquée. Par exemple, la trivialité incongrue d'une femme magnifique dans un décor somptueux : "Elle alluma une cigarette qu'elle fit crépiter longuement. Elle était contente d'avoir quitté Paris, elle s'y était fait globalement chier." J'avoue que j'ai eu un mouvement de recul, d'abord parce que j'aurais mis "globalement" avant fait, et ensuite parce que d'un coup, la femme me semblait beaucoup moins magnifique. A un autre moment, l'auteur se lance dans une scène torride et se dit que se serait tout à fait le moment de faire des phrases et le résultat est aussi érotique qu'un dictionnaire de rimes. "Ils roulèrent encore; il la coucha dans un halo de lumière sélène, son visage maintenant baigné d'une clarté bleutée. Ils ralentirent. Il arracha pour l'éternité les images macro du grain de sa peau perlée de sueur, d'une mèche brune plaquée sur la tempe, d'un hélix percé d'argent. Il captura le profile ourlé de ses lèvres entrouvertes et l'aile frémissante d'une narine. Elle " Il... elle... etc. Je m'ennuie.

La dernière partie est agrémentée de quelques scènes-montagnes accouchant d'une souris (les toits du Louvre, le plongeon de Gaetano…).

Conclusion: roman agréable qui comblera davantage ceux qui aiment les belles histoires que ceux qui aiment la belle littérature.

 ‎ 978-2848769882