Le teckel T1
d’Hervé Bourhis
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978-2203089686
"La clarté est la politesse de l'homme de lettres" disait Jules Renard. Il n'aurait pas été content. Rien n’est clair ici, ni l’histoire (l’intermède de la salle d’opération est complètement déconcertante et on peine à la rattacher à quoi que ce soit), ni les personnages (leurs personnalités, rôles respectifs et relations étant très mouvants, quant à leurs intentions… tout est possible), ni le graphisme et j’ai dû m’user les yeux pour déchiffrer les textes de plusieurs vignettes.
L’histoire d’abord. C’est une sorte de road movie à la française à l’époque actuelle. Guy Farkas, alias Le Teckel : un vieux représentant de commerce hyper ringard (look seventies)
mais néanmoins redouté, que sa direction veut virer (ou pas) est contraint de faire sa tournée avec un nouveau venu, un blanc bec aux dents longues (ou pas) que la direction a peut-être chargé de contrôler le Teckel, mais va savoir ce que veut vraiment la direction... Chacun n’étant peut-être pas non plus ce qu’on avait cru d’abord… mais ça encore, ce n’est pas clair. Bref comme on s’en doute, les deux se détestent d’entrée de jeu et leur relation va évoluer quand ils se connaîtront un peu mieux (of course). Mais peut-on se connaître dans un monde de concurrence et de mensonge ?
J’ai dit au départ que ce sont des représentants de commerce et je maintiens mais eux disent «visiteurs médicaux». On les croisait autrefois dans les salles d’attente des médecins. (C’était l’époque bénie où vous pouviez débarquer chez le toubib sans rendez-vous pris 6 mois à l’avance. Soupir…) Mais ne nous laissons pas aller aux regrets. Le travail n’est pas facile pour ces deux-là car ils essaient de fourguer le Marshall2, un antidouleur qui a déjà tué plusieurs centaines de personnes dans sa version 1. Charge à eux de convaincre tout le monde que cette version 2 est sans danger. Certains médecins sont un peu réticents tout de même, et les malades un peu au courant car l’affaire a fait scandale, le sont plus encore. La Direction reste de marbre, seules les ventes comptent, notre duo de choc est apparemment dans le même état d’esprit. En tout cas, Le Teckel qui a dû diffuser des centaines de boites du Marshall1 et donc tuer plusieurs personnes, n’est en tout cas pas troublé par la chose. Cynisme à tous les étages. Je ne déteste pas en général, quand il y a un petit arrière fond sarcastique qui laisse entrapercevoir une arrière-pensée plus élevée, mais là, non.
Nous allons suivre le road movie de ces deux aventuriers des Formule 1 et des bars glauques pour constater que, comme on pouvait s’y attendre, il est pathétique et généreusement émaillé d’incidents sordides et de mésaventures honteuses.
Petit bilan une fois l’album refermé : 3*/5. J’aime et je déteste le dessin. J’aime le graphisme expressif mais je déteste les couleurs souvent trop sombres qui nuisent à la lisibilité (des textes, bien sûr, mais même les dessins se perdent dans ces bains verts et magenta). Je reconnais le travail qui a été fait, mais je n’ai pas aimé. Je l’ai trouvé peu lisible à tous points de vue comme dit plus haut, et j’ai trouvé au final que ça n’’allait nulle part. Je sais qu’il y aura encore deux tomes des aventures du Teckel qui se lancera dans la politique (une option évidente avec l’éthique qui est la sienne), mais ce sera sans moi. J’aime bien voir ce que je lis. Mais y a quand même aussi des qualités...