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07 avril 2025

Cadres noirs

de Pierre Lemaitre

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Ce que j'admire toujours chez Pierre Lemaitre, c'est sa maîtrise et son savoir faire. Une fois encore, je n'ai pas été déçue, et pourtant, Lemaitre débutait presque avec ce roman, mais il connaissait déjà son métier et il le faisait fort bien. Voyons de quoi il est question

Quatrième de couverture:

"Alain Delambre est un cadre de cinquante-sept ans complètement usé par quatre années de chômage. Ancien DRH, il accepte des petits jobs qui le démoralisent. Au sentiment d’échec s'ajoute bientôt l'humiliation de se faire botter les fesses pour cinq cents euros par mois... Aussi quand un employeur, divine surprise, accepte enfin d'étudier sa candidature, Alain Delambre est prêt à tout, à emprunter de l'argent, à se disqualifier aux yeux de sa femme et de ses filles, et même à participer à l'ultime épreuve de recrutement : un jeu de rôle sous la forme d'une prise d'otages. Il s'engage corps et âme dans cette lutte pour retrouver sa dignité. S'il se rendait compte que les dés sont pipés, sa fureur serait sans limite. Et le jeu de rôle pourrait alors tourner au jeu de massacre… "

Vous avez saisi la problématique et le potentiel? Eh bien je peux vous dire que P. Lemaitre va en tirer le maximum. Il ne nous épargnera aucun rebondissement inattendu, aucune surprise, aucune angoisse, aucun succès enivrant, aucune défaite cuisante. Les règles du management qui sont les bases de la formation de Delambre, vont être implacablement mises à l'épreuve du réel, car c'est vers elles que se tournera notre héros à chaque fois qu'il sera en danger de perdre pied.

On part d'un chômeur désespéré que l'on voit accomplir les derniers mètres de descente au 36ème dessous en entraînant toute sa famille et qui réalise que son ultime espoir n'était en fait qu'un mirage, pire, une cruelle et impitoyable manipulation des nantis sur sa misère. A partir de là, comme on dit "le cave se rebiffe" et ça va faire TRES mal, à tout le monde.

Évidemment, on est là pour l'aventure, le suspens, le danger et les surprises. Il serait stupide de lire ça comme un documentaire sur le chômage ou même sur la banditisme (en col blanc ou survet'), la vie carcérale etc. N'allez pas bloquer sur les
invraisemblances, elles sont nombreuses et, je pense, assumées. Quand vous lisez James Bond, vous ne protestez pas que ce n'est pas possible. Laissez-vous mener en bateau. Prenez votre plaisir là où il est. Ca commence un peu lentement pour la mise en place et le lancement (trop longs à mon avis) intéressants mais manquant de rythme, mais je peux vous rassurer, ça va bien bien durcir et accélérer par la suite. Vous ne serez pas déçus. Et au moins, on ne peut pas accuser Lemaitre de manichéisme, car son héros qui manipule et utilise tout le monde, même ses alliés, n'est pas vraiment sympathique non plus. Notre chômeur acculé est vraiment prêt à tout, et il le montre. Et il se trouve qu'il a des dons et de la ressource.

Ca ne sera peut-être pas votre Lemaitre préféré, mais si vous passez le cap du démarrage façon diesel, vous en aurez pour votre lecture.



978-2253157212



30 juin 2023

Le Silence et la Colère 

de Pierre Lemaitre

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Nous retrouvons la famille Pelletier pour le deuxième tome de cette passionnante saga familiale. Cet épisode se déroule en France en 1952. Trois enfants + des parents = quatre romans à part entière dans ce volume. Quelle richesse d'imagination ce roman! Pierre Lemaitre ne fait pas partie de ces auteurs qui peinent à imaginer quoi que ce soit d'autre qu'eux-mêmes.

Hélène et François poursuivent leur carrière de journalistes. Ils travaillent dans le même journal. Ils en sont à leurs débuts et aucun n'a encore le poste dont il rêve, mais ils progressent. Parallèlement, ils démarrent également dans leur vie sentimentale et cela non plus ne se fait pas sans difficultés. Jean est dans la même situation, il lance sa propre affaire et ne peut absolument pas se permettre d'échouer, tandis qu'il se débat dans une vie de couple infernale avec la malade mentale qu'est Geneviève. Mais comme malade mental, lui-même, sous ses faux airs d'inoffensif... Bref tout ce petit monde vit dans la France de l'après guerre et se trouve confronté à la grande problématique de l'époque: la modernisation, avec la fée électricité qui s''étend partout, nécessitant la création de barrages hydrauliques et donc, l'évacuation forcée puis l'engloutissement de villages entiers, l'âge d'or de la presse écrite, l'engouement pour le "Noble art" et ses héros martyrisés, le développement de l'hygiène, la police, qui est quand même toujours celle qui a si bien servi Vichy, les débuts du hard discount (qui ne s'appelait pas encore ainsi) -certaines pages m'ont ddonné envie de relire "Au bonheur des dames" que j'avais tant aimé, il y a un petit cousinage. Et puis, les débuts de l'émancipation des femmes qui viennent seulement d'obtenir le droit de vote mais n'ont toujours pas celui de disposer de leur corps, qui doivent en conséquence courir des risques insensés et sont finalement à la merci du premier Palmari venu.

Passionnant, je vous dis. Vous n'aurez pas le temps de vous ennuyer en dévorant ce second tome de la trilogie de Pierre Lemaitre, "Les Années glorieuses".

Vivement le tome 3 ! 

PS: Quant à l'enquête" "Les Françaises sont elles propres?", elle a vraiment existé (quelle honte!) et, publiée par le magazine ELLE, elle évacue en deux lignes la question de savoir si les Français, eux, le sont, en déclarant que oui. Point final. Pas de discussion. Je me suis demandé s'il elles ne confondaient pas se raser et faire sa toilette. J'ai toujours pensé que les magazines féminins étaient avant tout des vecteurs d'oppression des femmes.

9782702183618

LECTURE COMMUNE AVEC Comme la plume et emi_lit_et_coud

15 juin 2022

Le Grand Monde 

de Pierre Lemaitre

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Vous aimez les sagas familiales ? Vous allez être servi. Des frères, des sœurs, des parents, de l'histoire, de la géographie, l'Indochine, Beyrouth, Paris, des sentiments, des choses horribles et d'autres suaves, des amours et du suspens, de la différence sexuelle et de la tolérance, ou non, du sexisme, de la guerre, des soldats, de la diplomatie, des finances, des magouilles, de la folie, des meurtres, des enquêtes, des journalistes, de la police, de la grandeur, de la mesquinerie, une secte, des carrières qui se font ou se défont, les fortunes de même, des services secrets et des services rendus, des légionnaires, le Viêt-minh, des fumeries d'opium, un pater familias digne de ce nom... et de l'amour maternel. Vous trouverez tout ça dans Le grand Monde, bref, vous en aurez pour votre argent. On songe aux feuilletonistes du 19ème... Pierre Lemaitre maîtrise totalement son sujet et peut nous servir largement.

Mais ça démarre façon diesel malgré une scène gore assez tôt. Le premier tiers est trop plan-plan à mon goût. Tout ça, c'est bien beau mais rien ne surprend vraiment, ni dans les personnages, ni dans le style et on arrive à la page 150 en se demandant si on va continuer longtemps comme ça. Ça s’accélère un peu après, une fois que tout est bien en place, et plus encore vers la fin, mais sans jamais devenir échevelé. C'est un peu étonnant, avec tout ce qui se passe. La fin, que je ne vous dévoilerai bien sûr pas, laisse la porte ouverte à des possibilités ultérieures... Nous lirons encore Pierre Lemaitre.


Extrait, Politique ordinaire :

« Nous aurons un scandale à affronter, ça ne sera ni le premier ni le dernier, on créera une commission qui enterrera ce truc, pendant ce temps on allumera un contre-feu quelque part et deux mois plus tard tout le monde aura oublié. »


‎ 978-2702180815



27 septembre 2021

 Le Serpent majuscule

de Pierre Lemaître

****+


Présenté par l'auteur comme son dernier polar (mais la vie nous réserve parfois des surprises...) "Le serpent majuscule" est également le premier écrit. Un polar qui n'avait jamais été proposé à un éditeur mais qui a dormi toutes ces années au fond d'un tiroir pour différentes raisons ayant peu à voir avec lui. Je suis enchantée qu'il en ait été sorti car j'aurais beaucoup regretté de ne pas le lire. J'ai en effet passé un excellent moment avec ce roman déjanté hyper saignant, à l'humour dévastateur au sens propre du terme.

"L'action du livre se déroule en 1985, heureux temps des cabines téléphoniques et des cartes routières, où l'auteur n'avait pas à craindre que son histoire soit rendue impossible par le téléphone portable, le GPS, les réseaux sociaux, les caméras de surveillance, la reconnaissance vocale, l'ADN, les fichiers numériques centralisés etc."

Ne reste plus que la nature humaine... et ses effroyables incertitudes.

Ne nous le cachons pas, quand un tueur à gage (une, en l’occurrence), sans doute un peu trop vieux, se met à yoyoter et à ne plus bien se souvenir de ce qu'il a fait et doit faire, les complications ne tardent pas à survenir. Ça aussi, c'est fatal. Les choses sont encore pires quand le dit-tueur est particulièrement efficace, qu'il a par ailleurs toujours manifesté une totale absence d'empathie et que la peur lui est tout autant inconnue. Un caractère quelque peu "soupe au lait" n'y arrange rien. Bref, voilà notre Mathilde qui part en roue libre et il va y avoir des dégâts. Beaucoup. Et souvent imprévus. Même pour elle.

Je me suis régalée ! J'ai ri et souri presque en permanence malgré ma consternation non feinte devant certains décès, car dans ce roman, tout peut arriver et avec Mathilde, c'est souvent le pire. Mais qui a dit que le lecteur n'aime pas être bousculé ? Vraiment, je recommande vivement à tous ceux qui aiment l'humour noir et le déjanté.

Des défauts à cette œuvre de jeunesse ? Bien sûr, qui n'en a pas ? Mais surtout des qualités bien plus rares et plus importantes, avec en premier lieu, l'originalité.


Extraits:

"Le problème, avec ces gars-là, Henri, c'est que souvent, ils sous-estiment la cible. Une vieille bonne-femme comme moi, il a pensé qu'il n'en ferait qu'une bouchée. C'est l'erreur classique. Vous avez de drôles d'idées sur les femmes. Surtout les vieilles. Maintenant, il n'aura pas le loisir de méditer sur cette question (...)"


"En mettant le focus sur l'action d'une bande rivale, on a fourré dans la tête des frères Tan le virus de la vengeance. S'ils étaient moins cons, on ne craindrait rien, mais leur esprit fonctionne en mode binaire. On a ouvert la boîte de Pandore et peut-être donné le signal d'une guerre des gangs. Ces règlements de comptes entre truands, surtout chez les plus minables, tournent facilement au pugilat. Ça défouraille dans tous les coins pendant des semaines, un meurtre en entraîne un autre et ça ne se calme pas facilement.

- Allez, dit le commissaire, on les relâche.

Quand ils sortent de la PJ, on jurerait deux furets à l'ouverture de la chasse."

9782226392084

10 avril 2020


Miroir de nos peines
de Pierre Lemaitre

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4ème de couv.
"Avril 1940. Louise, trente ans, court, nue, sur le boulevard du Montparnasse. Pour comprendre la scène tragique qu'elle vient de vivre, elle devra plonger dans la folie d'une période sans équivalent dans l'histoire où la France toute entière, saisie par la panique, sombre dans le chaos, faisant émerger les héros et les salauds, les menteurs et les lâches... Et quelques hommes de bonne volonté."

Pas mal, sans être une grande œuvre littéraire. Peinture de l'impéritie du pouvoir (qui résonne bien avec la situation du début du Covid 19). L'exode, les héros du quotidien, les victimes innocentes, la médiocrité majoritaire normale. Rien de changé, mais à côté de ce désastre, le Covid est quand même moins rude.


Intéressant, plaisant à lire