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25 juillet 2023

La fête de l'insignifiance

de Milan Kundera

****+


« l'insignifiance, mon ami, c'est l'essence de l'existence »

Cinq hommes, plus ou moins amis, se croisent, se rencontrent et se parlent principalement dans les jardins du Luxembourg. Nous rencontrons d'abord Alain, qui fait une fixette sur les nombrils, sans doute depuis que sa mère qui ne voulait pas de lui, l'a définitivement quitté après avoir simplement touché son nombril. Sans doute songeait-elle que cette cicatrice témoignait d'un temps où cet être neuf dont elle ne veut pas était une partie d'elle, mais à cela, Alain ne songe pas. Si il pense sans arrêt à sa mère, c'est dans ses propres versions fantasmées, variables et ne visant aucune réalité. Puis nous rencontrons Ramon, qui voudrait bien aller voir l'exposition Chagall, mais ne peut se résoudre à faire la queue. Il renonce donc et erre dans le jardin où il rencontre le troisième larron: D'Ardelo (oui, les noms...). D'Ardelo sort de chez son médecin qui lui a donné les résultats (heureux) de sa biopsie. Mais d'Ardelo, à sa propre surprise, annonce à Ramon qu'il a un cancer. Sans doute trouve-t-il cela plus intéressant et a-t-il envie de jouer sans risque le rôle tragique qui vient de lui échapper. Le quatrième larron est Charles chez qui Ramon se rend ensuite. Charles est organisateur de cocktails mondains et amateur d'anecdotes originales sur Staline. Il en raconte justement une (longuement) au sujet de perdrix et du sens de l'humour de Staline. De bavardages en bavardages, nous arrivons à Calliban acteur sans contrat qui se loue comme serveur stylé dans les cocktails de Charles en faisant croire qu'il ne parle qu'un idiome étrange proche du pakistanais, langue qu'il se donne tout à fait inutilement, beaucoup de mal à inventer avec vraisemblance.

Ces rencontres et bavardages, de jardin en cocktail, de la réalité aux fantasmes d'Alain sur sa mère ou à ceux de Charles sur Staline m'ont bien divertie en ce sens qu'ils allient toujours fantaisie et profondeur. Une chimère vient toujours caresser un concept profond et le lecteur s'amuse et dans le même temps, réfléchit à des choses importantes. Je remarque cependant que c'est un univers totalement masculin. La Franck (quel nom encore!) évoquée au cours du récit n'est qu'un personnage d'arrière plan. La bonne portugaise a plus de réalité, mais dans un rôle si inférieur... Qu'ils se prétendent séducteurs ou non, la vision de ces hommes m'a parue étonnamment limitée à un monde masculin. Je pense que beaucoup d'hommes de la génération de Kundera ont vécu mentalement dans ce monde tronqué. Ils n'en sont généralement pas conscients mais c'est un fait.

Quand Kundera est mort, j'ai réalisé que je ne l'avais jamais lu, je pense que c'était plus ou moins parce que je craignais de m'ennuyer. Je me suis alors dit qu'il fallait tout de même que j'en lise au moins un et le hasard des bibliothèques a mis sous ma main cette « Fête de l'insignifiance" au joli titre (mais ils le sont tous chez Kundera) et qui avait l'avantage d'être court, ainsi si je m'ennuyais, je ne m’ennuierais pas longtemps. Mais ce fut le contraire qui se passa, une fois tournée la dernière pages, j'ai dû constater que je n'en avais pas eu assez, je désirais lire encore Kundera et j'ai donc enchaîné avec "La lenteur" dont je vous parlerai bientôt.

Moralité : Lisez au moins un roman de Kundera.


"Respirez, D'Ardelo, mon ami, respirez cette insignifiance qui nous entoure, elle est la clé de la sagesse, elle est la clé de la bonne humeur."



978-2070466146