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14 décembre 2020

  Les yeux dans les arbres  

de Barbara Kingsolver

*****


Un excellent roman de Barbara Kingsolver sur le Congo à la veille de son indépendance, une époque où elle y a séjourné elle-même, ayant l'âge d'une de ses jeunes protagonistes. Heureusement pour elle, son père n'était pas Nathan Price, ce prêcheur hystérique qui, dans le roman, allant contre tous les conseils,  emmène sa femme et ses quatre filles dans un village du Congo dans l'intention hautement affirmée de baptiser tous les Congolais qu'il pourrait attraper. Nathan Price est un fanatique, avec tous les caractéristiques du genre, et un homme violent maltraiteur de femme et d'enfants. Il ne verra jamais rien d'autre que ce qui rentre dans le cadre étroit de ses œillères et n'apprendra rien de l'Afrique. Il en ira autrement de sa famille qui, malgré le très lourd tribut qu'elle devra payer à la psychose paternelle, saura voir le monde autour, et les gens auxquels elles s'attacheront, certaines définitivement. 

En dehors de cette saga familiale passionnante et magnifiquement peinte par Barbara Kingsolver, sans négliger le sexisme universel, nous découvrons les horreurs sans noms de la colonisation au Congo. Celle assumée des Belges et de leurs crimes odieux (mains coupées etc.) puis, après l'indépendance qu'ils ont dû concéder, celle plus sournoise des grandes compagnies, principalement américaines, avec le soutien de la CIA, qui assassinera Patrice Lumumba (président élu) au profit d'un fantoche corrompu (Tshombé).

C'est un roman remarquable par la qualité de la peinture psychologique et par l’intérêt documentaire qui ne néglige pas les péripéties qui maintiennent toujours l'attention depuis l'arrivée de ce prêcheur et de sa famille démunie sur le sol africain, jusqu'à l'âge adulte des enfants. Ce qui fait que ses plus de 600 pages se dévorent sans perdre leur lecteur un instant.

Je déteste le titre français que je trouve sot, le titre original « The Poisonwood Bible » est bien meilleur mais nécessite la lecture du roman pour être compris et aussi apprécié qu'il le mérite.

Trois extraits entre mille:
Là mère : « En fin de compte, mon sort se confondit avec celui du Congo. Pauvre Congo, épouse aux pieds nus d'hommes qui lui ont arraché ses bijoux tout en lui promettant le paradis. »

Une fille : « J'avais remarqué que les Congolais ne traitaient pas leurs propre  épouses et filles comme si elles étaient très intelligentes ou importantes. Bien que, pour autant que j'aie pu en juger, je me fusse rendu compte que les épouses et les filles se chargeaient de presque tout le travail. »

et encore « Mon père est convaincu que le Congo est à la traîne et qu'il peut l'aider à être à la hauteur. C'est dingue. C'est comme s'il voulait monter des pneus sur un cheval. »



978-2743607708