03 janvier 2024

Saules aveugles, femme endormie 

de Haruki Murakami

****


Un recueil de nouvelles, chose assez rare chez moi. Il aura fallu que ce soit un auteur qui m'attire vraiment, mais pour Murakami, je suis prête à surmonter ma réticence envers les récits courts. Vingt-trois nouvelles, quand même, c'est dire que certaines sont assez brèves mais le recueil compte quand même 510 pages... Certaines de ces nouvelles avaient déjà été publiées auparavant, mais pas toutes, d'autres ont été rédigées pour l'occasion. L'auteur dit parfois que la rédaction de nouvelles est comme une récréation pour lui au milieu de l'écriture de romans. J'ai eu à la lecture l’impression qu'elles avaient été écrites par un Murakami trentenaire ou à la limite quadragénaire, ce qui se confirme, même si certaines ont été rédigées plus tard. Elles le furent entre 1980 et 2005 selon Wikipédia (soit de 31 à 56 ans).  Dont acte. Elles ont été choisies par l'auteur lui-même pour composer ce recueil.

Les sujets sont très divers mais on trouve très souvent des histoires de jeunes couples en formation ou en voie de délitement. On retrouve les personnages de Murakami, propres, lisses et en même temps insondables. Plusieurs ressassent des histoires par lesquelles on sent que l'auteur est lui-même fasciné. Il les saisit, les anime, les fait tourner devant ses yeux pour en examiner les différentes facettes et les pousser un peu plus loin qu'elles ne sont allées, ou pourraient aller...  La nostalgie n'est pas exclue non plus car on se plonge plusieurs fois dans des souvenirs d'adolescence, les études, les amis, les filles,  les soucis de virginité, peu ou pas de famille ou juste à l'arrière plan, dans le décor (sauf pour la nouvelle éponyme, justement). Une vision poétique du monde qui frôle souvent le fantasme, où l'imaginaire flirte avec le réel, où le non-dit est à créer par le lecteur.

Si vous ne connaissez pas encore l’œuvre de cet auteur, premièrement, il faut rapidement faire quelque chose, deuxièmement, ce recueil peut être une base de départ. Il ne me semble pas exagéré de dire que selon que vous l'aimerez ou non, vous aimerez l'ensemble. Il y a "l'ambiance Murakami".

C'est un bon recueil. N'hésitez pas s'il passe à portée de votre main.

978-2264044747



01 janvier 2024

2024

 Cette année je fais un challenge ABC. C'est Enna qui m'en a donné l'idée.

En quoi cela consiste-t-il?  C'est simple: lire tout au long de l'année, faire les billets et relever un lien par nom d'auteur de chaque lettre de l'alphabet. Le but est d'avoir rempli l'alphabet avant le 31 décembre 2024.

Si vous en faites un aussi, on peut échanger nos liens et suivre nos progrès pour nous encourager mutuellement. Dites-le moi. Nous échangerons nos liens. Ca sera sympa.

Le mien :

A - Andrea Jean-Baptiste "Veiller sur elle" 

B - Brussolo Serge "Le livre du grand secret"  

C - Clicquot Guillaume "Prenez-moi pour une conne" 

D - Ducoudray Aurélien "Inspecteur Balto"  

E - Everett Percival "Montée aux Enfers"  

F -  Floc'h & Rivière François "Olivia Sturgess 1914-2004" 

G - Guenassia  Jean-Michel  "A Dieu vat"  

H- Hassaine Lilia "Panorama"

I - Igounet V. & G. Le Besnerais  "Crayon noir - Samuel Paty, histoire d'un prof" 

J - Jorge Lidia  "Misericordia"

K - Kantcheloff Dimitri "Vie et mort de Vernon Sullivan" 

L - Luz "Testosterror"

M - Murakami Haruki  "Saules aveugles, femme endormie"

N - Némirovsky Irène  "Le bal"

O - Ouedraogo Roukiata  "Ouagadougou pressé"

P - Pennac Daniel "Le cas Malaussène"

Q - Queneau Raymond "Zazie dans le métro"

R - Rushdie Salman  "La Cité de la victoire"  

S - Sfar Joann "Chagall en Russie"  

T - Tournier Michel "Le bonheur en Allemagne" 

U - UNO Chiyo "Ohan" 

V - Vo Nghi "L'impératrice du Sel et de la Fortune" 

W - Wohlleben Peter "La vie secrète des animaux"  

X - Xu Ann & Hiromi Goto "Shadow Life" 

Y - Yvert Fabienne   "Papa part maman ment mémé meurt"


Challenge ABC fini le 22.12.24 


29 décembre 2023

Un été avec Montaigne

d'Antoine Compagnon

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Cela faisait longtemps que je les voyais passer sur les rayons des bibliothèques et des librairies ou encore sur les blogs,  ces petits volumes aux couleurs vives qui vous invitaient à passer un été avec Montaigne, Pascal ou Jankélévitch. Ils étaient bien tentants, pas trop épais ce qui permet de se persuader que malgré la PAL himalayenne, on va aisément trouver un peu de temps pour les avaler entre deux lectures plus longues (ce qui est d'ailleurs arrivé) , alors un jour que l'un d'eux est passé trop près de ma main, hop! Je suis repartie avec et du coup, je l'ai dévoré sitôt rentrée. Comme ça, c’était réglé. On était fin décembre, en plein dans les préparatifs de Noël, je l'avais croisé en faisant les derniers achats de cadeaux... On commençait fort pour passer un été avec...

Mais le philosophe est au-dessus de ces contingences.

Pour le dire tout de suite, j'ai beaucoup apprécié ce petit livre qui regroupe quarante très courts chapitres (5 pages), chacun consacré à un point relevé dans les Essais. Le travail est dû à Antoine Compagnon, académicien et professeur au Collège de France qui a ainsi préparé ces courtes chroniques pour une émission quotidienne de 5 mn sur France Inter. Ces chroniques lues par Daniel Mesguich m'avaient échappé mais l'on peut facilement les retrouver en podcast ici, même si moi, je les ai lues.

Cela commence généralement par une citations de quelques lignes en langage de l'époque (que j'avais du mal à saisir pleinement) qu'il explique d'abord par la paraphrase et des considérations contextuelles et annexes. Cela n'a pas le temps d'être fastidieux qu'on a déjà bien vu l’intérêt et qu'on arrive à la dernière phrase  qui résume en quelques mots l'idée maîtresse, en donne le miel,  et l'on est content de l'avoir parfaitement saisie en si peu de temps et sans effort. Je trouve que cette initiative est bien conforme aux idées de Montaigne qui déjà, écrivait en français et non en latin pour toucher des lecteurs moins doctes (et sans doute aussi  moins rassis de certitudes) que ceux capables de pratiquer la langue de Virgile. Ce petit livre, comme ces chroniques radiophoniques estivales, parle à tout un chacun, sans faire appel à des connaissances antérieures particulières. C'est ce qui fait son charme; Pour ma part, j'aime beaucoup à chaque fois que la culture s'invite ainsi dans la vie quotidienne et les discussions à bâtons rompus. Je suis toujours partante pour 5mn de philo ou de science entre la poire et le fromage. Cet ouvrage sera d’une grande utilité également aux élèves de terminale, tout en comprenant bien qu’on n’a ainsi qu’un vernis de connaissance et qu’en ce qui concerne les étudiants, il leur faudra aller plus loin.


PS: Je relève une des idées originale de notre Michel national, son vœu de mourir "à cheval, en voyage, loin de chez lui et des siens." Tiens, oui, pourquoi pas? Je n'ai pas de cheval, mais je suppose qu'on peut transposer.

PPS : Ayant passé un si bon moment avec Montaigne, j’ai écouté "Un été avec Jankélévitch" (très intéressant également) mais en conclusion, je préfère la lecture à l’écoute qui s’interrompt à chaque chronique et qu’il faut sans cesse relancer, alors que les pages s’enchaînent sans délai quand on lit.



978-2849902448 

24 décembre 2023

Il faut toujours envisager la débâcle

de Laurent Rivelaygue

***+


Un livre pour vous distraire ? Celui-là peut faire l’affaire. Il est léger, hyper fantaisiste et sans queue ni tête. Il vous fera sourire, bien que ce soit d’une enquête sur de multiples viols et meurtres qu’il s’agit. J’ai lu ce livre après en avoir entendu parler sur le blog Tête de lecture.

Le narrateur est, ou plutôt était, journaliste. Alors qu’il se croyait promis aux unes et à la célébrité, il n’a jamais fait mieux que les petites chroniques bouche-trou et même cela, c’est fini maintenant qu’il s’est fait licencier. Il décide 1° de s’empresser de trouver un nouvel emploi 2° d’occuper son temps libre à résoudre la sombre énigme du Grêlé, le serial-violeur qui a sévi dans les années 80 et que l’on n’a jamais réussi à démasquer. Quand il aura résolu ce mystère, il en fera un livre qui sera un best-seller et le rendra enfin célèbre, sans parler du grand pas en avant qu’il aura fait faire à la justice, bien sûr.

Et le travail commence, s’appuyant sur une documentation fouillée (récits amusant des visites à la bibliothèque), sur des enquêtes de terrain et sur la participation très active à un forum internet de passionnés du sujet. Parallèlement, il a décroché un petit travail alimentaire sans gloire… Et surtout, parallèlement, il perd quelque peu la raison et est tellement autocentré que sa vie privée tombe en ruine. Il s’en aperçoit à peine, mais quand sa femme s’en va, il doit bien se rendre à l’évidence, cette face-là de son existence n’est pas non plus une franche réussite. Tout va mal.

Le roman n’avance pas. « J’ignorais tout à fait comment mener un récit avec un début, une fin, et probablement un vrac intermédiaire qui devait mener de l’un à l’autre. J’avais décidé que, pour commencer, je devais créer un environnement propice à la création.»

L’enquête, quant à elle piétine. Il est pourtant bien secondé car, s’il n’a pas retrouvé le Grêlé, il a bel et bien retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès que tout le monde cherche partout sans succès et qui tient à l’aider. (Vous me direz, il n’a pas eu grand mérite à le trouver puisque ce dernier se cachait depuis longtemps dans le troisième tiroir de son bureau comme il s’en est enfin rendu compte en rangeant pour créer son « environnement propice à la création.»)

Les investigations reprennent, avec la collaboration des autres membres du forum du Grêlé. Vont-elles aboutir ? Et pendant qu’il est dans les recherches, notre journaliste retrouvera-t-il la raison ? Sa femme ? Un emploi?

Vous le saurez en lisant ce roman pour rire de style délirant.

Un défaut cependant, ce livre (lu sans déplaisir) s’oublie à la vitesse grand V. J’ai tourné la dernière page il y a peu et j’ai déjà le plus grand mal à me souvenir ne serait-ce que des grandes lignes du récit. Les détails, je n’y songe même pas. C’en est même remarquable et suscite l’étonnement. Bravo !


978-2702189023


19 décembre 2023

Meursault, contre-enquête
de Kamel Daoud
*****

Goncourt du Premier Roman

Ce roman est un exercice de style, un rébus, un sudoku. Il est plein d’astuces et de clins d’œil à L’étranger de Camus, qui permettront à tous des petites jubilations, des sentiments de connivence bien plaisante, à chaque fois qu’ils en reconnaîtront un. Au "Aujourd'hui, maman est morte.", incipit du chef d’œuvre, répond un insolent "Aujourd'hui, M'ma est encore vivante.") qui cueille directement le lecteur et le met tout de suite dans l'ambiance. Pour ma part, j'ai tout de suite été séduite. De même, la dernière phrase est celle de L’Etranger, sans modification, cette fois. Entre les deux pourtant, ce n'est pas la même histoire. Je trouve qu'on pourrait voir celle-ci comme si elle avait été dessinée à partir d'un calque posé sur celle de Camus, mais mal posé, qui aurait gondolé par endroit, bougé à d'autres, avec même des passages au carbone, comme quand le 14h, soleil étourdissant de Camus, devient le 2h du matin, sous la lune de Daoub. Entre l'incipit et la "haine sauvage des spectateurs", Haroun, le narrateur, avait 7 ans quand le frère Moussa a été tué par l'Etranger. D'ailleurs, c'est lui qui nous apprend qu'il s'appelait Moussa, car rien, dans le livre de Camus, ne donne la moindre indication de l’identité personnelle de "L'Arabe" , l'idée étant justement de ne pas le personnifier. Mais la mère, dont le mari avait un beau jour disparu sans laisser de traces, des années auparavant, avait tout de suite compris que c'était son fils. Pourtant, elle n'avait jamais pu retrouver son corps et ce qui restait de la famille avait dû faire son deuil sur une tombe vide. Le deuil d'ailleurs, n'avait jamais été fait. La mère, ayant découpé dans un journal, deux brefs paragraphes évoquant le meurtre d'un "Arabe" par un Français, avait décrété qu'il s'agissait de Moussa et avait pieusement conservé cette relique qu'elle ne savait même pas lire. Ce fut son fils plus tard, qui la lui déchiffra, puis, comme elle la lui faisait relire en exigeant chaque fois qu'il en déchiffre plus long, ses études ayant progressé, il s'est mis à broder une histoire de plus en plus complète, leur mythe familial. Mais Haroun, depuis ses sept ans, n'avait plus eu de vie à lui. Soumis à sa mère sans image paternelle, il avait été entièrement consacré au culte du grand frère assassiné. On ne lui avait jamais ouvert les portes de sa propre vie et il se retrouvait, célibataire définitif, ayant peu connu les femmes, rassis dans un travail médiocre, une vie médiocre, même son propre  crime, il l'avait commis téléguidé par sa mère, tuant "un Français" presque aussi dépersonnalisé que l'Arabe de Camus. Pour lui, du moins, parce que pour sa mère, pas tout à fait, et ce n'est que   bien plus tard, bien  trop tard, qu'il a réalisé la folie de sa mère et l'étouffement permanent qu'elle a exercé sur lui depuis son enfance.

Alors reprenons, toute l'affaire. Comment l'Arabe tué dans un roman, pourrait-il être le frère dans la vraie vie, de notre narrateur ? Le fait qu'il n'y ait pas de corps, cristallise le paradoxe. Si nous étions dans le monde réel, Moussa n'aurait pu être tué par un personnage de fiction, si nous étions dans la fiction, la Mère aurait récupéré le corps. Ici, Moussa est mort, mais il n'y a pas de corps.

Haroun présente dès le début, sa mère, comme mythomane effrénée, mais n'en tire pas de suspicion. C'est vrai qu'il n'est qu'un enfant et d'ailleurs, ni l'un ni l'autre ne connaît le livre de Camus. Il ne le connaîtra qu'à l' âge adulte, avant, ils n'ont que quelques lignes de journal, ensuite, tentant de faire coller réalité et fiction il suppose à un moment que "A sa sortie de prison, l'assassin écrit un livre qui devient célèbre où il raconte comment il a tenu tête à son Dieu, à un prêtre et à l'absurde" (63)
Il poursuit en amont la confusion entre réalité et fiction, mêlant Camus et Meursault, comme il avait mêlé Moussa et l'Arabe en aval. Et il reproduira d'ailleurs cette scène finale, tenant lui aussi tête aux mêmes. Car plus les ans passent, plus il réalise qu'en fait, c'est de Meursault qu'il est devenu le double. D'ailleurs, comme lui, il sera jugé, moins pour ce qu'il a fait que pour ce qu'il est. On retrouve l'idée du calque que j’évoquais tout à l'heure. L'Etranger est "Un miroir tendu à mon âme"

Ou alors, on est strictement dans la réalité, et Moussa, qui fréquentait une jeune femme libérée d'Alger qu'il savait parfaitement que sa mère n'accepterait jamais, a un jour décidé de faire comme son père et de disparaître sans plus d'explications.

Ou alors, on est tout autant dans la vraie vie (toujours celle du second roman du moins) et un vieil alcoolique cultivé dont le dernier plaisir est la conversation avec les étrangers (car les intégristes le révulsent) apprenant que cet étudiant recherche l'Arabe tué par Meursault, se délecte à lui broder au fil des soirs de bistrot, ce conte qui lui permettra de faire durer ces soirées en  agréable compagnie. Ce qui expliquerait le décalage entre le Haroun médiocre et sans autonomie du récit, et le Haroun indépendant et cultivé qui raconte.  Cet Haroun-là est un homme libre. Mais là, ce n'est plus Meursault, c'est Shéhérazade... 

Ou alors, on est chez nous, un livre à la main, et un jeune écrivain algérien nourri de littérature française, a voulu rendre à Camus un hommage érudit et ludique... et y a d'autant plus parfaitement réussi qu'il était armé d'une fort belle plume.
"Il était presque 2h du matin et seuls les aboiements de chiens au loin, traçaient la frontière entre la terre et le ciel éteint."



Amour

"L'amour est comme une bête céleste qui me fait peur. Je le vois dévorer les gens deux par deux, les fasciner par l’appât de l'éternité, les enfermer dans une sorte de cocon puis les aspirer vers le ciel pour en rejeter la carcasse vers le sol comme une épluchure."


Mer

"La mer, c'est comme un mur avec des bordures molles."


978-2073007278 

14 décembre 2023

Humus

de Gaspard Koenig

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Prix Interallié 2023

Nous avons tous entendu parler d’eux, on les appelle les "bifurqueurs", ce sont des étudiants de grandes écoles, en particulier Agro, qui, au moment où ils reçoivent leurs diplômes, déclarent publiquement qu'ils refusent de travailler pour les entreprises qui nuisent à l'écologie. Que deviennent-ils ensuite? Trouvent-ils d'autres voies? Rentrent-ils dans le rang? Je ne le sais pas. Il faudra que j’aille me renseigner un peu. Les deux héros de ce roman ne sont exactement des Bifurqueurs, mais ils ont les mêmes préoccupations. Sur les bancs de leur école, ils se sont liés d'une profonde amitié et se sont d'autre part tous deux pris de passion pour cet animal étrange que l'on appelle ver de terre, lombric, Lumbricidae etc.  Une fois les études terminées, les deux amis se séparent et chacun va suivre sa voie: Arthur, origine aisée, parleur habile mais plus sombre de caractère, va reprendre une vieille ferme familiale à l'abandon mais qui a été ravagée par les pesticides et autres ...-cides. Il va entreprendre de redonner vie à cette terre stérilisée par la chimie en laissant pousser les plantes et en réintroduisant des vers de terre. Il va tenir un blog de son expérience dans l'idée d'abord de passer une thèse, et ensuite de faire école en diffusant les informations sur le sujet. Kevin, de son côté, taiseux mais solaire, d'origine très modeste, poussé par une ambitieuse camarade, va se retrouver à lancer une start-up de vermicompostage qu'il espère vouée au succès, vu que tout le monde ne parle plus que de compostage...

Nous allons suivre ces deux expériences comme si nous y étions. C'est parfaitement raconté et si on passe deux ou trois détails peu vraisemblables*, une ou deux affirmations formelles dont je doute**, l'histoire tient vraiment bien la route. C'est même un peu plan-plan vers le centre (ce ventre mou des romans un peu longs) mais la fin va bien vous réveiller. J'ai adoré. Je me demandais justement "Que se passerait-il si...?" Eh bien G. Koenig le teste grandeur fiction et ça vaut vraiment le coup d’œil. Quand on pousse les théories à leurs limites, on n'est pas déçu.

Je recommande vivement cette lecture qui expérimente sur une problématique vraiment centrale de notre époque racontant donc une histoire qui nous concerne tous au plus haut point. Que vont donner les tentatives de nos deux amis? Où  vont mener ces deux voies si différentes?  Qu'est-ce qui marchera? Qu'est-ce qui échouera? Pourquoi? Quelle conclusion en tirer? Il va falloir vous imaginer sur le terrain dans les deux cas. Qu'est-ce que vous auriez fait? Ca, c'est le talent de Koenig, il nous met vraiment en situation et le lecteur un peu imaginatif peut s'impliquer à fond et y croire au moins le temps de quelques centaines de pages. J'ai marché à fond. Bravo.



* En Province, TOUT le monde sait qu'on n'a pas le droit de planter un arbre à moins de 2m du voisin. Quelqu'un le lui aurait forcément dit si tant est qu'il ne l'ait pas appris dans son école.

**  Que même à Paris dans les milieux évolués, le fait d'avoir une sexualité variable et à spectre large ne soit pas admis, assertion longuement assenée par l'auteur, je ne sais pas où il a vu jouer ça, je n'y crois pas une minute.



Citation que j'ai particulièrement aimée:

(Les étudiants des grandes écoles) "acquéraient une forme d'incompétence générale qui leur permettrait ensuite d'occuper n'importe quel poste avec assurance".  Formule magnifique qui saisit bien ce que le citoyen lambda constate chaque jour avec incrédulité et consternation ; et là, tout est dit.

9791032927823

09 décembre 2023

Trust 

de Hernan Diaz

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Je n'avais encore jamais lu de roman de Hernan Diaz bien que "Au loin" patiente depuis déjà un bon moment dans ma PAL, mais le Pulitzer qui vient de lui être attribué m'a décidée et c'est maintenant chose faite.

"Trust" est vraiment un roman remarquable, par sa construction tout d'abord, complexe et très intelligente, par ses thèmes plus nombreux qu’on ne le croit au début et par sa belle écriture. C'est un livre très féministe aussi, alors qu'il n'est pas du tout donné comme tel. Et il m'est par ailleurs très difficile de parler maintenant de ce roman car il est important de ne surtout pas en dire trop pour ne rien déflorer, tant la construction est habile.

"Trust" est composé de quatre récits. Le premier et le plus long, raconte la vie de Benjamin Rask, l'homme le plus riche de New York, depuis sa jeunesse dorée, jusqu'à son veuvage et son retrait de la société qu'il n'avait jamais beaucoup fréquentée. Il est peu sociable, mime une vie sociale plutôt qu'il n'en a une vraie  et demeure longtemps célibataire. Un jour cependant, il rencontrera une femme dont il s'éprendra totalement. Son épouse, à l'esprit artistique, mènera une vie de mécène éclairée.

Benjamin est un solitaire que nous voyons bâtir sa fortune colossale sur ses intuitions géniales, son sens de la Bourse, ses calculs et son expérience. Si on lui envie sa réussite, il n'en est pas moins admiré de tous pour son savoir-faire. On l'accuse par ailleurs d'avoir causé par ses manœuvres en bourse le crash de 1929, entraînant la ruine de milliers d'investisseurs et épargnants alors que lui-même en tirait au contraire profit. 

Ce premier récit se termine à la page 130 sur les 400 du roman. Il sera suivi de trois autres dont je ne peux pas vraiment parler pour ne pas gâcher le plaisir de votre lecture. Je peux cependant vous dire que ce premier récit porte en lui, de façon remarquable, tout ce qu'on verra se développer ou se transformer par la suite. C'est d'une habileté diabolique.

Ce roman parle de l'argent, de ce qu'est et de ce que peut l'argent : une fiction et presque tout. Il montre comment il fonctionne (chose que vous comprendrez plus ou moins bien selon votre connaissance des mécanismes boursiers - nulle pour moi), comment il se gagne et comment il se perd. Il montre son rôle social aussi. Il parle de l'amour, du rôle attribué aux femmes dans la société et de ce qu'elles peuvent ou non attendre des hommes. Il vous montrera les pauvres se résignant ou se saoulant de discours de révolte 

"Je les ai regardés tous les deux, qui fixaient sombrement le fond de leurs verres, et j'ai frissonné de gêne. Leur grandiloquence. Leur sérieux de petits garçons. S'ils avaient su comment les décisions étaient réellement prises, s'ils avaient entendu combien la vraie voix de l'autorité était feutrée, s'ils avaient pu voir la distance impossible qui les séparait de n'importe quelle forme de pouvoir véritable."

et les riches se leurrant du mythe de leur utilité

"Et une fois de plus il prouva, comme ses ancêtres avant lui, que le profit personnel et le bien commun, loin d'être incompatibles, pouvaient devenir les deux facettes d'une même pièce à condition d'être entre de bonnes mains."

et au bout du compte,

"En un cycle infernal, les travailleurs conservaient leurs métiers déshumanisants afin à la fois de produire des biens superflus et de les acheter."

C’est là que nous en sommes.

Lisez-le (et dites-moi, je pratique le partage de liens). 

Keisha l'a lu 

978-2823617887


04 décembre 2023

Le syndrome du scaphandrier 

de Serge Brussolo

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Quand j'ai envie ou besoin de me débrancher de mon quotidien ou, plus largement de la réalité, il n'est pas rare que je me tourne vers Serge Brussolo. Les univers qu'il a créés sont très nombreux et variés, du récit médiéval à celui de science fiction, du polar familial aux aventures aux pôles, de la jungle urbaine à la fantasy, mais toujours, il a le chic pour nous y faire accrocher dès les premières pages et ne plus nous libérer avant le point final. C'est ce que j'attendais de lui en ouvrant ce roman et, comme d'habitude, il l'a fait.

Ici, pas d'aventures spatiales, de fusées ni d'extra-terrestres, mais simplement David, Rêveur de son état. Nous sommes dans un futur non précisé, dans un monde qui a l'air d'être la terre, mais où les gens vivent pourtant bien différemment de nous. Parmi ces gens, il y a les "chasseurs de rêves", et c'est l'un d'eux que nous allons suivre de bout en bout. Les gens comme David, ont un don inné qui est de plonger dans des sommeils très profonds qui durent plusieurs jours, et dont ils reviennent avec un "trésor" qu'ils auront eu le plus grand mal à conquérir au fil d'aventures extrêmes qui différent d'un rêveur à l'autre. Une fois qu'ils ont réussi à saisir ce trésor, quel qu'il soit, ils doivent remonter au plus vite sans le lâcher car c'est leur butin. Une fois revenus dans le monde réel, le butin aura changé d'apparence pour devenir ce qui est considéré comme une œuvre d'art et à ce titre, recherché et acheté. Cette œuvre d’art sera d'autant plus grande matériellement et belle, que le rêve aura été riche et profond. Ces œuvres sont collectionnées, exposées dans des musées etc. et c'est de cela que vivent les rêveurs. Bien chichement d'ailleurs, même si d'autres en tirent meilleur profit.

Mais s'il est mal payé, l'état de Chasseur de rêve n'en est pas moins incertain et dangereux, un peu comme celui des plongeurs sous-marins auxquels ils empruntent d'ailleurs du vocabulaire. La "plongée" peut mal se passer, il peut y avoir des accidents de remontée ou des maladies des profondeurs comme le "syndrome du scaphandrier"…  et justement, depuis quelque temps, David a de plus en plus de difficultés à opérer...

Suivez David dans cette période délicate.

Un roman pas exactement "trépidant", mais une histoire si intéressante, si originale (au moins un auteur qui a de l'imagination!) et si bien racontée que les pages se tournent toutes seules.

‎ 978-2070415632

MOIS BRUSSOLO



02 décembre 2023

 PETIT RAPPEL /

N'IMPORTE QUEL JOUR du mois de décembre 2023, je propose une lecture commune:

Un roman au choix (fantastique, SF ou policier) de Serge Brussolo, écrivain français captivant et très sous-estimé.
A poster n'importe quel jour de décembre


Qui joue? :

29 novembre 2023


Le Studio de l'inutilité 

de Simon Leys

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Quatrième de couverture:

"Dans sa jeunesse, Simon Leys passa deux ans dans une cahute de Hong Kong en compagnie de trois amis, une période bénie où l'étude et la vie ne formaient plus qu'une seule et même entreprise .

C'est en souvenir de ce gîte régi par l'échange et l'émulation, surnommé Le Studio de l'inutilité , qu'il a baptisé ce recueil consacré à ses domaines de prédilection : la littérature, la Chine et la mer."

Cet ouvrage regroupe des articles ou essais publiés par le critique littéraire et sinologue Simon Leys. Il se divise en trois parties: Littérature, Chine, Mer

La première partie évoque huit écrivains et ont été pour moi d’intérêt inégal mais souvent grand, car si l'éloge éperdu du Prince de Ligne m'a laissée de marbre, il en est allé tout autrement des articles sur Michaux, Orwell et particulièrement du dernier : "Nabokov et la publication posthume de son roman inachevé". Conrad, Chesterton, Weil et Segalen seront également traités. C'est vraiment très instructif et intéressant.

La seconde partie est consacrée à la Chine dont Leys était spécialiste. Les textes qui y sont regroupés permettent à l'auteur, qui ne céda jamais aux sirènes de la Révolution culturelle, même à l'époque où c'était tellement à la mode, de rétablir les faits et de dire les choses comme il les voyait, L'Histoire allait lui donner le plus souvent raison.

La troisième partie est constituée de textes relatifs à la mer, autre passion de Simon Leys. Il est, rappelons-le, l’auteur d’une anthologie intitulée "La Mer dans la littérature française". Il traitera ici d’"écrivains et la mer", de l'histoire des périples de Magellan et des naufragés sur l'île Auckland. Tous les amateurs de récits marins se régaleront, je n'en fais pas spécialement partie mais j'ai tout de même lu tout cela avec intérêt. 

Ces trois parties sont suivies du texte du discours qu'il a prononcé en 2005 lors de la remise de son doctorat et portant sur son idée de l'université. Je vous laisse le découvrir.

Je crois que si je devais résumer cet ouvrage en deux mots, ce serait "intéressant" (tous les sujets traités ont su capter mon attention puis éveiller mon intérêt) et "instructif" (j'y ai appris vraiment beaucoup de choses). Je recommande donc vivement cette lecture à tous les esprits curieux. Il est venu à moi en version brochée gondolée (météo humide), par l'intermédiaire d'une boite à livres mais il existe en format poche et je pense qu'il peut aussi tout à fait faire office de cadeau. Je l'ai lu par fragments, un article après l'autre, à un moment ou à un autre et maintenant que j'ai tourné la dernière page, je me félicite d'avoir mené cette lecture à bien. Il m'a semblé décerner chez Leys une personnalité avec laquelle je serais moins en accord que je ne le pensais avant de commencer, mais il n'en reste pas moins un érudit qu'il est enrichissant de lire. 

Comme son nom l'indique, la culture générale, ça se cultive. Ne l’oubliez pas ! Bonne lecture à vous!

978-2081303287 



24 novembre 2023

L’aimant 

de Lucas Harari

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Le hasard d'une visite à la bibliothèque m'a mise en présence de ce grand album, le graphisme et les couleurs ont fait le reste et je suis repartie avec. Il ne s’agit pas d’une nouveauté, il a été publié en 2017, mais il mérite largement de rester dans les lectures actuelles. L'auteur avait envisagé l'architecture avant de se lancer dans les Arts Décoratifs section images imprimées (nous dit son éditeur), et on ne peut pas nier qu'il lui en reste quelque chose. Ici, les les thermes de Vals, en Suisse, sont un personnage à part entière du récit.

C'est le dessin épuré, géométrique, simplifié, aux perspectives saisissantes et aux rares couleurs froides qui avaient attiré mon œil d'abord, ma main ensuite. Je n'ai pas regretté. Cet album valait vraiment le détour.  J'ai évidemment demandé à Google de me montrer les vraies thermes de Vals de l’architecte Peter Zumthor et je me suis retrouvée à me promener dans le décor exact dans lequel Harari a laissé jouer son imagination. Bluffant d’exactitude et ce sentiment de connaître les lieux alors que bien sûr, je n'y ai jamais mis les pieds. C'est vraiment un bâtiment remarquable! et c'est un plaisir de constater que la BD lui rend hommage avec justesse et sans le réduire.  Si bien que je n'ai pas pu faire autrement que de me lancer dans une relecture. 

Pour la présentation, faites confiance à la quatrième de couverture:

"Pierre, jeune étudiant parisien en architecture, quitte tout pour la Susse, destination : les thermes de Vals, un magnifique édifice au cœur de la montagne. Sujet de sa thèse, le bâtiment aux lignes pures, le fascine et l'obsède. Ces murs recèlent un mystère, Pierre en est persuadé... Une porte dérobée qu'il doit absolument trouver."

On sait comme la rédaction d'une thèse peut phagocyter et déstabiliser un étudiant épuisé, perdu dans ses recherches et, souvent, un emploi alimentaire, Pierre le dit lui-même, il a "fait une bouffée délirante" mais "ça va mieux, maintenant". Est-ce bien sûr? En tout cas, la thèse est abandonnée et maintenant, il va séjourner dans ces fameux thermes et découvrir peut-être son secret, si der Mund des Berges ne le dévore pas avant...

Une vraie réussite, je souhaite une longue carrière florissante au jeune auteur de BD dont c'était la première publication. Depuis, il a publié "La dernière rose de l'été" que je vais m'empresser d'aller lire aussi.

Au passage, j'ai énormément admiré aussi sa façon de dessiner la montagne.

978-2848659862



19 novembre 2023

Mourir avant que d'apparaître

de Rémi David

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Quatrième de couverture:

"Lorsque Jean Genet rencontre Abdallah, qui sera un jour la figure centrale de son magnifique texte Le Funambule, le jeune homme a dix-huit ans à peine et vit à Paris. Genet, à quarante-quatre ans, est déjà un écrivain consacré. Il est aussitôt ébloui par le charme de cet acrobate, qui a travaillé plusieurs années au cirque Pinder. Il entreprend le projet fou de le hisser jusqu'à la gloire : son agilité, son expérience du cirque devraient lui permettre de devenir un artiste hors pair"

Nous avons là un "docu-roman" que pour ma part, j'ai trouvé passionnant car, si Rémi David a bien dû inventer un peu, imaginer, supposer, deviner... il s'est surtout appuyé sur une documentation extrêmement sérieuse et précise pour rédiger cet ouvrage.

« Si le texte met en scène des personnages ayant réellement existé, s’appuie sur des témoignages, s’inspire d’une histoire vraie, il offre de cette histoire une réécriture qui ne s’interdit ni de combler par la fiction les silences des biographies en inventant certaines scènes manquantes, ni de prendre des libertés avec les faits en faisant par exemple prononcer par Genet des paroles qu’il a en réalité écrites. C’est donc une interprétation qui est livrée ici et qui ne saurait prétendre au mieux qu’à la vérisimilitude. »

Dans la France des années cinquante, avec en arrière-plan envahissant la guerre d'Algérie, par le plus grand des hasards, Jean Genet rencontre Abdallah ; et Genet crée et tombe amoureux du jeune homme et de ce qu'il peut en faire. Les grands créateurs créent tout le temps et ne s'intéressent vraiment qu'à la création. Impossible pour Genet d'aimer Abdallah sans créer quelque chose avec lui. Impossible de l'aimer encore quand plus rien ne se crée. La relation est dangereuse pour Abdallah, mais formidablement enrichissante aussi. « Si vous pensez que l'aventure est dangereuse, essayez la routine, elle est mortelle. » disait Paulo Coelho. Je trouve que les remarques que je lis ici ou là sur la toxicité de Genet n'ont pas de sens. Il prend beaucoup et donne énormément. Imaginez la vie de l’analphabète Abdallah s'il n'avait pas rencontré Genet et dites-moi s'il a quelque chose à regretter. Une relation toxique est une relation qui vampirise, qui prend sans donner, qui enlève mais n'apporte rien. On en est bien loin. C'est d'autre chose qu'il s'agit ici et ce livre est d’une justesse remarquable et se garde bien de juger, surtout avec des critères de comportement moyen. Il n'y a rien à juger, juste à voir et essayer de comprendre. Et on sent la parfaite objectivité et excellente compréhension de la part de l'auteur.

Cette période avec Abdallah  inspirera à Genet un très beau texte "Le funambule" que Rémi David utilise avec art dans ce roman.

J'ai vraiment beaucoup aimé ce livre et je le recommande chaudement à ceux que la littérature, la prise de risque  et la création intéressent.

Extrait : 

"Quand un objet, un événement, un art ou une personne l'intéressait, Genet s'y engouffrait alors à corps perdu. Il écrivit des textes d'une très grande justesse sur la peinture, sur Rembrandt, sur la sculpture, sur Giacometti, sans rien connaître à la peinture, pas plus qu'à la sculpture avant de s'y jeter de tout son être. Il avait une curiosité qui se nourrissait du hasard et s'exprimait dans la rencontre. Tout pouvait se faire, pour lui, objet de curiosité.

Ce fut le cas du fil.

Genet, pour entraîner Abdallah, l'avait fait dévaler une montagne en skiant, puis pagayer en canoé avant de lui faire nager le crawl dans une piscine. Il devait éprouver des sensations de glisse pour comprendre réellement que l'air était solide et qu'il était possible de prendre appui sur lui. L'enseignement de Genet se faisait dans l'action. C'était un homme d'action; il bougeait tout le temps d'une ville à une autre, d'un hotel à un autre, d'un projet à un autre, d'un pays à un autre, il gigotait sans cesse. C'était donc par l'action qu'il formerait celui qu'il aimait à marcher sur le fil."

978-2072967108