20 août 2021

 

Le voyage de l’éléphant 

 de José Saramago

****


Bavard et plaisant

Roman historique

Comme l’auteur l’explique lui-même en épilogue, sa rencontre avec une lectrice de portugais à l’université de Salzbourg a donné naissance à ce livre. Elle lui raconta l’aventure historique de cet éléphant qui fit "à patte", au XVIème siècle, le voyage de Lisbonne à Vienne et il se sentit inspiré par ce récit. Il la chargea de la documentation et se lança dans l’écriture de ce qui allait devenir "Le voyage de l’éléphant".

Salomon est un éléphant d’Asie qui réside à Lisbonne au moment où nous faisons sa connaissance car il est la propriété de roi du Portugal Dom João III. Devant un cadeau à Maximilien d’Autriche et désirant que celui-ci soit marquant, Dom João décide de lui offrir son éléphant, animal si rare en ces contrées que nombreux seront, en cours de route, ceux qui ne soupçonnaient même pas qu’une telle bête pût exister. (C’était ça ou une custode et apparemment le critère d’encombrement n’a pas joué). Maximilien accepte le cadeau et Salomon quittera donc Lisbonne pour rejoindre d’abord l’archiduc à Valladolid, puis Vienne en sa compagnie. Il sera accompagné de son cornac -qui sera le personnage que nous suivrons plus particulièrement tout au long de ce périple- et aura ainsi l’occasion de vivre quelques aventures et de rencontrer plusieurs formes de vies humaines et modes de pensée que nous observerons avec lui.

Nous retrouvons ici l’écriture de José Saramago, sa ponctuation particulière et l’absence des majuscules aux noms propres, sans que cela pose de réel problème de lecture, même au début. L’auteur a choisi de nous conter cette histoire sur le mode du bavardage prolixe. Le ton est léger, facile, il accroche bien son lecteur-auditeur (car on a plutôt l’impression d’écouter quelqu’un nous raconter une histoire) et surtout, tout le récit baigne dans un humour bon enfant tout à fait plaisant.

C’est pourquoi j’ai lu ce roman historique –car je le rappelle toute la documentation est réelle et l’auteur ne s’est pas permis de fioritures- avec facilité et sans bouder la tâche. Cependant, je dois dire, arrivée au terme de cette lecture, que l’histoire n’est pas vraiment passionnante. La fidélité à la vérité historique nous a privés sans aucun doute de mille aventures plus palpitantes. C’est bien, agréable à lire, intelligent et intéressant, mais je n’irai pas jusqu’à "passionnant".

C’est à vous de voir si vous vous sentez tentés.


Extraits pour vous donner un avant-goût de cet humour qui fonctionne par le regard que cela implique, posé sur les choses:

"La saleté qui l’avait recouvert auparavant et qui empêchait presque de voir sa peau avait disparu sous l’assaut conjugué de l’eau et du balai, et salomon s’exhibait maintenant aux regards dans toute sa splendeur. Assez relative, tout bien considéré. La peau de l’éléphant asiatique, et celui-ci en était un, est grossière, moitié grise moitié couleur café, parsemée de mouchetures et de poils, une déception permanent pour lui-même, malgré les conseils de résignation sempiternellement répétés selon lesquels il devait se contenter de ce qu’il avait et en rendre grâce à vishnou. Il s’était laissé laver comme s’il attendait un miracle, une sorte de baptême, et le résultat était là, mouchetures et poils." (p. 19-20)


" … encore qu’il fut plus qu’évident que la panse de la statue ne serait pas assez spacieuse pour contenir fût-ce une escadre d’infants, sauf s’ils étaient lilliputiens, chose impossible puisque ce mot n’existait pas encore. " (p.172)


"Il est difficile de comprendre que dans une région aussi accidentée, où abondent de vertigineuses chaînes de montagnes se chevauchant les unes les autres, il ait encore été nécessaire de découper les cicatrices profondes le l’isarco et du brenner* au lieu d’aller les placer dans d’autres endroits de la planète, moins richement pourvus en biens de la nature, où le caractère de ce stupéfiant phénomène géologique serait susceptible, grâce à l’industrie du tourisme, d’améliorer matériellement la vie modeste et résignée des habitants." (p.201)


* cols des Alpes


 978-2757819562

2 commentaires:

  1. Il m'a été fortement recommandé, avec plus d'enthousiasme que toi (et je note tes bémols, c'est toujours bien d'être prévenue !)... mais je lirai d'abord "Histoire du siège de Lisbonne", qui est déjà sur mes étagères.
    Et sinon, j'ai adoré "L'année de la mort de Ricardo Reis", où il ne se passe pas non plus grand-chose, mais qui m'avait envoûtée !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, de toute façon, José Saramago est un auteur intéressant.

      Supprimer

Commentaire: