05 mars 2023

Le mage du Kremlin

de Giuliano da Empoli

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Giuliano da Empoli a déjà publié plusieurs ouvrages, mais ce sont des essais sociétaux et politiques, "Le mage du Kremlin" est son premier roman et je dirais que cela se sent un peu. J'ai trouvé ce roman peu littéraire et j'ai été stupéfaite de le voir apparaître sur les listes du Goncourt pour finalement remporter le Grand Prix du roman de l'Académie. On sait que ces histoires de prix littéraires ont toujours été fortement mâtinées d'ententes commerciales souterraines, mais je trouve que cela est de moins en moins dissimulé d'année en année... Et il me semble, juste conséquence, que les lecteurs commencent à se détourner. Peu importe, il leur restera toujours la cohorte de ceux qui "achètent pour offrir" et se fichent un peu de la réelle valeur littéraire de l'objet.

N'empêche que j'ai moi aussi emprunté puis lu intégralement ce "Mage du Kremlin" tant le sujet éveillait ma curiosité. Poutine nous titille aux frontières de l'Est, la troisième guerre mondiale viendra-t-elle de là? A-t-elle même déjà commencé? Il est normal de ne pas snober les sources de renseignements qui s'offrent à nous, car Giuliano da Empol, professeur à Sciences Po, homme politique et ex conseiller de M. Renzi, est quelqu'un de fort bien renseigné sur le sujet et l'on se dit qu'il doit être en mesure de nous apprendre bien des choses que nous ignorons. De ce point de vue, on est en partie satisfaits. Ce passage dans l'environnement proche du Tsar, dans un entourage que l'auteur qui est un homme de think tank, connaît fort bien. apprend beaucoup au citoyen lambda. Cependant, dans l'intimité de Poutine, jamais on ne sera vraiment. Quant à savoir ce qu'il pense... mais on approche.

"Il faut que vous compreniez une chose: le tsar ne dit jamais rien de précis, mais ne dit jamais rien par hasard non plus. S'il se donne la peine de faire une suggestion, (...) aussi absurde que cela puisse paraître, l'idée doit être prise au sérieux et mise à exécution."

Bref du point de vue documentaire, le livre peut intéresser, bien que les dates ne soient pas assez souvent rappelées à mon goût. Par contre, du point de vue littéraire et romanesque, il y aurait beaucoup à redire.

D'abord, surtout dans la première moitié, le lecteur s'ennuie un peu. Ce qui est un comble sur un sujet aussi brûlant. Lecteur de bonne volonté pourtant, qui accepte de ne pas s'interroger sur la vraisemblance de voir un idéologue de l'ombre comme Vadim Baranov se précipiter pour raconter sa vie professionnelle, familiale et amoureuse, dans le détail à un homme qui ne lui est rien et qui ne lui a même rien demandé. Mais lecteur qui trouve quand même que les pages ne tournent pas vite... Ca s'améliore dans la seconde moitié et plus encore à la fin, mais je sais pour l'avoir lu sur les blogs littéraires que trop de lecteurs ne vont pas jusque là. C'est dommage, avec un sujet et un contexte pareil! C'est le mariage contre nature de l'essai et du roman que je tiens pour responsable.

Quoi qu'il en soit, c'est tout de même intéressant. Ce Vadim Baranov "arriviste paresseux", "sceptique et indifférent", a tout vu et a participé à bien des choses. Il est très habile et peu scrupuleux, comme il se doit en politique. Il manipule les uns et les autres, flattant, promettant et mentant avec un cynisme éhonté.

"J'ai pu constater à plusieurs reprises que les rebelles les plus féroces sont parmi les sujets les plus sensibles à la pompe du pouvoir. Et plus ils grognent quand ils sont devant la porte, plus ils glapissent de joie une fois passé le seuil." (je me demande si c'est vrai...)

Ce roman a été écrit avant le début de la guerre de Poutine en Ukraine, mais on voit à quel point le conflit couvait depuis longtemps et devenait de plus en plus menaçant...


Extraits :

"L'intelligence ne protège de rien, même pas de la stupidité."


"Parti du théâtre, j'étais passé à la mise en scène de la réalité. On ne pouvait pas dire que je m'en sois mal tiré. A présent, on me demandait de projeter sur la scène la réalité que j'avais contribué à construire. Seulement cette fois, il ne s'agissait plus d'un petit théâtre d'avant-garde mais d'une immense arène, pour un public qui comprenait la planète entière."


"Il est normal que les plus entreprenants parmi les jeunes aient envie de faire des choses, qu'ils soient à la recherche d'une cause. Et d'un ennemi. ce que nous devons faire, c'est leur donner cette cause et cet ennemi avant qu'ils ne les choisissent eux-mêmes."


"Les Russes aiment à se faire guider par des hommes implacables"


"Tout le monde doit voir que la révolution orange a précipité l'Ukraine dans le chaos. Quand on commet l'erreur de se confier aux Occidentaux, cela finit ainsi: ceux-ci te laissent tomber à la première difficulté et tu restes tout seul face à un pays en ruines."


Mais parfois, le mage (et Poutine) ne sont pas infaillibles

"Le Tsar ne pouvait pas, bien sûr, envoyer des troupes régulières envahir un pays souverain" (l'Ukraine) .


9782072958168





6 commentaires:

  1. Ah tiens, tu n'as pas aimé ? Pour ma part, j'ai trouvé le livre captivant.

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    1. Je ne dirais pas que je n'ai pas aimé.(Les petites étoiles sous le titre indiquent mon plaisir de lecture sur 5) Mais je l'ai trouvé un peu long au démarrage et d'une écriture qui ne méritait pas un prix littéraire de premier plan.

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  2. Ah d'accord, je n'avais pas vu les petites étoiles !

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    1. Ce n'est pas assez clair. Il faut que je trouve un système plus visible

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  3. je n'ai pas du tout aimé cette lecture (oui, je suis une des seules...), trop froid, barbant par moments, oui. Et puis ne pas savoir ce qui tenait de la fiction et de la réalité, ici, m'a dérangée.

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    1. C'est vrai que ce n'est pas toujours assez vif. Je dirais que c'est "Bien", mais pas "Très bien". ;-)

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