Et toujours les forêts
de Sandrine Collette
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On rencontre assez souvent le nom de Sandrine Collette quand on se promène dans les bibliothèques, les librairies ou sur les blogs de lectrices/teurs. Plusieurs prix lui avaient été décernés, et il se trouvait que je n'avais encore jamais lu un seul de ses ouvrages. C'est qu'il me semblait qu'ils n'étaient pas dans le genre qui a le plus de chances de me plaire. Mais bon, il faut bien que je me tienne au courant, et donc que je tente une fois. Le dernier, avec son histoire de fin du monde était plus dans mon créneau. J'adore "La route" avec lequel certains ont comparé "Et toujours les Forêts" (bien abusivement, je n'allais pas tarder à m'en apercevoir) et "L'odyssée du vagabond".
Le plus simple, pour ce qui est du synopsis, est que je vous cite la quatrième de couverture : "Corentin, personne n’en voulait. De foyer en foyer, son enfance est une errance. Jusqu’au jour où sa mère l’abandonne à Augustine, l’une des vieilles du hameau. Au creux de la vallée des Forêts, ce territoire hostile où habite l’aïeule, une vie recommence.
À la grande ville où le propulsent ses études, Corentin plonge sans retenue dans les lumières et la fête permanente. Autour de lui, le monde brûle. La chaleur n’en finit pas d’assécher la terre. Les ruisseaux de son enfance ont tari depuis longtemps. Quelque chose se prépare.
La nuit où tout implose, Corentin survit miraculeusement, caché au fond des catacombes. Revenu à la surface dans un univers dévasté, il est seul. Guidé par l’espoir insensé de retrouver la vieille Augustine, Corentin prend le long chemin des Forêts. Une quête éperdue, arrachée à ses entrailles, avec pour obsession la renaissance d’un monde désert, et la certitude que rien ne s’arrête jamais complètement."
Ce qui frappe tout de suite, et je vois maintenant que c’est visible dès cette quatrième de couverture, c'est le problème de cadrage. Que devons-nous lire? Un récit post-apocalyptique ou l’histoire d’un enfant mal-aimé ? Il aurait fallu choisir et non nous livrer les deux à la suite l’un de l’autre, et ne s’emboîtant pas particulièrement. La problématique n'est même pas "comment tout à pété?" question à laquelle l'auteur ne tente même pas de répondre, mais donc "que se passe-t-il après?" et pas seulement pour notre héros, mais bien pour le genre humain qui a quasiment disparu, alors les dizaines de pages du début nous racontant en détail la petite enfance de Corentin, ne nous apportent rien, ne nous éclairent même pas sur son caractère qui ne sera d'ailleurs pas un élément moteur du récit parce que son rôle va surtout être de subir, et si c'est pour lui donner une certaine profondeur psychologique, il n'en fera jamais preuve. C'est quand même un homme simple, pour ne pas dire primaire, et pas spécialement attachant malgré son enfance difficile. Une fois le livre terminé, on a vraiment du mal à rattacher ce début à la Dickens, qui raconte même la jeunesse de la mère indigne, avec la suite du roman; et bien plus de mal encore à en voir l’intérêt. Au contraire, cela nuit à la cohésion et à la densité du récit qui aurait dû être un bloc dense et percutant filant vers son but, ce dont on est loin.
Donc, après cette longue première partie, survient la cataclysme, aucune idée duquel d'ailleurs. On ne sait même pas avec certitude si c'est une guerre mondiale, un phénomène naturel (on sait que l'écologie allait mal, mais est-ce cela qui a tué tout le monde et tout détruit? Comment ?) ou un accident mais ce qui est clair, c'est que le monde est détruit. Clair, pas tant que cela, car commencent alors les invraisemblances: un monde ou tout est détruit mais où on va trouver des maisons et des magasins intacts, par exemple. Il faut imaginer des bâtiments rasés ou non? Brûlés ou non? Encore des rues ou seulement des décombres? Un monde où le soleil ne brille plus, caché derrière une pollution non précisée, mais où Corentin, qui décide de retrouver sa grand-mère dans les forêts du titre, va parvenir à s'orienter, à trouver sa route (y a-t-il des panneaux?) et à marc/her pendant des centaines de kilomètres sans se perdre, pour rejoindre une grand-mère, déjà bien vieille quand il l'avait quittée et qui elle aussi aura survécu (comment?) parmi les millions de morts, comme aura survécu et sera retrouvée la seule femme que Corentin ait aimée. Toutes les deux indemnes avec aucun autre survivant aux alentours. Mouif... Bonjour la vraisemblance. Quant à la vie animale, seule sera évoquée celle pouvant jouer un rôle pour l'homme (quelques chiens et loups...) malgré l'évidence des insectes et animaux souterrains (puisque les survivants étaient en sous sol lors du cataclysme).
Quant à notre gentil héros, n'être plus que deux loin de toute autre vie humaine et que l'un ne trouve rien de mieux à faire que de violer l'autre à répétition! Ça, pour ajouter de la profondeur psychologique, ça en ajoute. Par contre, ça tue quelque peu l’empathie du lecteur.
Bien sûr, il y aura encore quelques autres survivants et, comme Corentin vient de le démontrer, ils n'auront pas tardé à devenir voleurs, violeurs, tueurs et sadiques. Mais pour moi, arrivée là, tout le monde pouvait bien mourir, cela m'était égal.
Je ne m'explique pas le Grand Prix RTL-Lire 2020 et le Prix du livre France Bleu-Page des libraires. A quel titre? Et pour quelles qualités? Cela m'a échappé. Pour moi, c'est un roman très moyen, sans trouvailles (tout ce qui est dans ce livre a déjà été vu ailleurs), plein d’invraisemblances, et de construction bancale. Lisible, mais sans que ce soit indispensable.
978-2253241928