13 juillet 2024

 

"L 'eau et la terre" 

"Lendemains de cendres"

Séra

*****


Cette bande dessinée n'est pas de la fiction (malheureusement). Elle raconte les terribles années meurtrières que le Cambodge a connues et les massacres gigantesques qui y ont été perpétrés et que la justice a ensuite choisi d'ignorer, faute peut-être de pouvoir faire autrement, mais en tout cas, c'est ce qu'elle a fait.

Le premier volume, "L 'eau et la terre" commence le 17 Avril 1975, date à laquelle les Khmers Rouges ont décidé de vider toutes les villes du pays de leur population pour jeter celle-ci sur les routes, vers des campagnes utopiques où ils seront censés se rééduquer et participer aux travaux agricoles. Tous n'étaient bien sûr pas en état de quitter leur maison, on n'en tint pas compte. Toute rébellion -réelle ou incapacité d’obéir- était massacrée. Une espèce de folie meurtrière incompréhensible s'est emparée des Khmers Rouges soutenue par des discours idéologiques extrémistes et dénués de toute base. De plus en plus abstraits, de plus en plus meurtriers: servir le pays, écraser les ennemis du progrès, les rééduquer férocement, les faire taire, leur faire avouer leurs crimes, leur infliger des souffrances, les punir, les contraindre, les tuer... Un cauchemar sans limite. Sans espoir. Une horrible page de l'Histoire humaine. Quelque chose que je suis incapable de comprendre, qui m'oppresse et me fait peur car il rappelle qu'il n'y a pas de limite à ce que l'homme peut faire, dans le pire plus encore que dans le meilleur.



Le deuxième volume, "Lendemains de cendres" commence en 1979, et suit un jeune homme qui tente de fuir vers la Thaïlande. Au Cambodge la situation n'a fait qu'empirer. Le pays est dévasté. Les Khmers rouges ont tué tant de monde qu'ils en sont à se dévorer entre eux car leur folie meurtrière n'est pas assouvie et ne le sera clairement jamais, vu qu'elle ne mène à rien. Routes, déplacements de populations, camps, misère, famine, massacres, emprisonnements, torture, survie etc.


Quelle tristesse! Quel désespoir! Deux bandes dessinées documentaires pour dire ce qui est arrivé au Cambodge ces années-là. Pour témoigner. De très beaux dessins sombres pour montrer l'indicible et ne pas laisser le rond dans l'eau disparaître sans aucune trace dans le silence de l'Histoire. Ces vagues exterminatrices sont la marque des régimes totalitaires. Cela a existé, cela peut recommencer, ici ou ailleurs. Parfois des peuples entiers sont pris d'une folie meurtrière et sadique, généralement parée de grandes justifications théoriques et alors, l'Enfer est vraiment sur terre et il n'est que l’œuvre des Hommes.

Il y a un troisième album qui traite de cette page d’Histoire : « Impasse et rouge », mais je ne l’ai pas lu.

Des documents terribles, que Séra (de son vrai nom Phoussera Ing), Cambodgien né en 1961 et qui a quitté son pays pour la France en cette funeste année 1975, a bien fait de maintenir à la lumière, car il faut dire ces choses.

Un choc pour le lecteur. Une dévastation.


9782847897289          9782756006239

            


6 commentaires:

  1. Je connaissais Séra mais uniquement de nom. Ces BD sont dans ma liste à lire depuis un moment mais c'est tellement sombre ! Ta chronique me confirme que c'est une œuvre marquante

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, vraiment marquante, mais ça me démoralise tellement (sur le thème "On ne peut rien attendre de l'homme") que je ne sais pas si je vais lire les autres. J'avais pris ces 2 là à la bibli, je les ai lus mais ça tirait un peu...

      Supprimer
  2. Tiens, je viens de lire Avant la longue flamme rouge, de Guillaume Sire, sur le même thème. Il est terrible aussi...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah oui, je crois que cette page d'Histoire est vraiment épouvantable, alors pour moi qui suis hyper empathique, très dur de lire ça.

      Supprimer
  3. Merci pour cette participation (j'étais en vacances). Cette période est en effet horrible, j'ai lu pas mal de récits la concernant, mais jamais de BD.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les dessins ne sont jamais gores, mais quelle tristesse! Quel désespoir même!

      Supprimer

Commentaire: