28 décembre 2024

Une trajectoire exemplaire

de Nagui Zinet

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En août dernier, pour la rentrée littéraire, parmi les livres (pas très nombreux, on ne peut pas tout lire) qui avaient retenu mon attention, il y avait celui de Nagui Zinet. Il s'est imposé comme une évidence car c’était celui qui attisait le plus ma curiosité. Pas long, en plus, c'était sûr que j'allais le lire, et voilà, c'est fait.

"Une trajectoire exemplaire" est un premier roman et j'ignorais tout de l'auteur. Je ne connaissais même pas encore son compte Instagram. Pour commencer, j'ai été vraiment séduite par son écriture. C'était vif, incisif original.

Le premier chapitre, deuxième personne du pluriel, vous recadre en vous rappelant ce qu'est la vie -du moins dans la vision que le narrateur en a- et vous découvrez ainsi également le narrateur. Le deuxième chapitre, troisième personne du singulier, vous raconte l'emploi du temps habituel de ce narrateur qui du coup, devient personnage du récit. Il s'appelle Guyader. La dernière femme de sa vie l'a quitté il y a six mois, le laissant dans la plus complète vacance. Il ne quitte plus son lit que lorsqu'il y est absolument obligé. Il est juge d'instruction et il est chargé du dossier de N. , accusé du meurtre de sa compagne. N. tenait un blog qui était son journal, autant dire que la tâche des enquêteurs est simplifiée. "Un tissu de mensonges, de délires où parfois la vérité a réussi à s'accrocher." Guyader le relit.

Chapitre trois, deuxième personne du singulier. N. , devenu le narrateur, se parle à lui même et commente ce qu'il vit et fait. Ce sera le cas presque jusqu'au bout. Nous découvrons un looser sans profession qui sombre dans l'alcoolisme et erre en jetant sur autrui comme c'est souvent le cas, des regards méprisants. C'est un alcoolique aux références littéraires, qui se voit lui-même écrivain. C'est un mythomane également, qui agrémente ses stations aux différents comptoirs, de ses affabulations. Il parle facilement aux gens. Il a une liaison mais là encore il bousille ses chances par égoïsme et paresse. J'ai regretté que l'auteur ait entretenu une ressemblance forte entre ce personnage et lui (initiale, goûts littéraires et cinématographiques, aspect) La ressemblance est si accentuée qu'on est obligé de se demander à quel moment ils ne partagent plus les mêmes opinions. C'est gênant car N. n'est vraiment pas sympathique et mieux on le connaît, moins on l'aime. Et puis, il faudrait qu'il se méfie de l'humour de comptoir, à la longue, ça déteint et ça salit... N. devient sexiste, lourdingue et perd complètement le sens des valeurs. Adios, N!

Finalement, on retrouve Guyader qui fait le point sur cette lamentable affaire. Dommage qu'il soit lui aussi un peu taillé sur le même modèle dépressif. Je n'aurais pas détesté voir des personnages mentalement plus contrastés. Par contre, j'ai beaucoup aimé l'écriture:

"Tu as vingt cinq ans, le physique d'un lycéen, le foie d'un pilier de comptoir et tu écoutes Souchon. Tous les matins tu as l'impression de commencer une partie de scrabble avec sept consonnes."

Et globalement, le livre m'a intéressée. Je lirai le prochain roman de Nagui Zinet. On verra bien. Car il a beau déclarer en interview "L'écriture ne représente pour moi qu'une occupation du temps, ni plus ni moins importante que le football ou toute autre activité", je serais bien étonnée qu’il n’y ait pas de second livre.

978-2073071798

22 décembre 2024

Zazie dans le métro

de Raymond Queneau et 

Clément Oubrerie (dessins)

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"Zazie dans le métro", je l'avais lu trop jeune et à l'époque, ni compris, ni apprécié. Je le relis aujourd'hui où je ne suis plus trop jeune pour rien, mais dans une version bande dessinée, que nous devons à Clément Oubreri. Et du coup, j’ai révisé un peu le texte original pour comparer.

L'insupportable gamine est toujours là, et toujours aussi mal élevée. Elle débarque à Paris où son oncle Gabriel va la garder pendant trois jours, le temps que sa mère s'accorde quelques vacances avec un amour de passage. Elle préfère ne pas les ramener à la maison depuis qu'elle a dû tuer le père de la petite à coups de hache pour la protéger de ses avances. Bref, Zazie n'a pas eu une enfance rose et sereine, ce qui a fait d'elle la gamine dégourdie mais ingérable qu'elle est devenue. D'ailleurs, toute la famille est hors normes, Tonton Gabriel, taillé comme une armoire normande, n’est-il pas danseuse artistique, la nuit, dans un cabaret. Il a beaucoup d'amis/es ou connaissances (quand ce n’est pas carrément un car de touristes) que Zazie va être amenée à rencontrer, et ces trois jours à Paris vont encore sérieusement enrichir son expérience de la vie. A la fin de ses vacances, elle aura vieilli -de trois jours, comme tout le monde, me direz-vous. Mais pas que.

Pour l’instant, Gabriel, aidé de son ami Charles, voudrait bien lui faire visiter les monuments de Paris, mais cela ne l'intéresse guère (sans compter qu'ils les mélangent un peu tous). La seule chose qui intéresse Zazie, c'est le métro, dans lequel elle veut absolument monter, mais, manque de chance, c'est la grève, aucun métro ne roule.

C'est donc à pied et en taxi que se feront leurs déambulations. Déambulations au cours desquelles ils rencontreront toute une série de personnages extravagants, la palme allant à Pédro-Surplus alias inspecteur Bertin Poirée, alias Trouscaillon, changeant sans cesse d’identité, fou amnésique incapable de se souvenir qui il est, à moins que ce soit parce que "Prince de monde et de plusieurs territoires connexes, il lui plaît de parcourir son domaine sous diverses apparences"… Allez savoir.

Cette adaptation en BD de l’œuvre de Raymond Queneau est bien fidèle. On y retrouve le "néo-français" qui intéressait Queneau à cette époque, ce qui nous vaut des dialogues fleuris et bien sentis. (Oulipo pas loin)



Mais en attendant, la bande infernale écume Paris, ses flics à képi, ses restaurateurs infâmes



Queneau ne semblait pas les porter dans son cœur et nous fera même assister à une bataille rangée de première grandeur dont l'issue nécessitera l'intervention d'un étrange Deus ex Machina qui gardera toujours sa part de mystère. Sur ce point comme sur d'autres, le voile ne sera pas levé. Nous refermerons l'album loin d'avoir eu toutes les clés, comme c'était également le cas dans le roman.

Le dessin est parfaitement adapté, parfois clair et net, et à d'autres moments plus sombre et/ou confus, comme ce qui nous est raconté. Cette version BD du grand succès de Queneau est à mon sens, une réussite.


9782070610143


17 décembre 2024


Ouagadougou pressé

de Roukiata Ouedraogo 

et

Aude Massot (Dessins)

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Clairement autobiographique (le nom et l'allure de la personnage principale sont celles de l'auteur), cet album si gai va nous montrer un peu le mode de vie des Africains, qu'ils soient en France ou au Burkina Faso. Monde très éloigné de moi qui suis plutôt nordique (et bien moins gaie, je l’avoue) et monde qui m'a charmée et amusée, même si j'ai bien compris que je ne m'y acclimaterais pas. Roukiata Ouedraogo et Aude Massot, la dessinatrice, nous emmènent dans le 18ème, autour de la station Château rouge, quartier à forte population africaine, car c'est là que se rend son personnage Roukiata, alias Petit Modèle. Et plus exactement dans le salon de coiffure de sa tante 


car elle va bientôt retourner en visite à Ouagadougou et elle veut épater toutes ses anciennes copines. Cette plongée à Château Rouge nous met tout de suite dans l'ambiance, avec le parler des habitants, les mini-commerces de rues, les mamas qui vendent leurs plats cuisinés etc. Et les couleurs! Le gris ne règne pas dans ce quartier si vivant.

Petit Modèle prépare donc son départ et ce n'est pas une mince affaire car Ougadougou toute entier ne semble être qu'une grande famille tant elle voit débarquer de proches ayant un colis à lui confier pour qu'elle l'apporte à leur famille. Tous ces préparatifs sont l’occasion d’évocations de souvenirs et pour nous, l’occasion d'assister à des scènes de vie typiques et drôles. On découvre des personnages étonnants et hauts en couleurs. La langue de bois n'est pas au menu. On a au contraire les oreilles réjouies d'un parler très imagé et fleuri. Et nous voilà revivant avec elle ces scènes cocasses ou/et émouvantes. Par exemple, la première anecdote que nous découvrons : Idriss le frère de Rouki, va passer à la radio en France, il téléphone à sa mère pour lui dire de l'écouter mais elle a donné la radio qu'il lui avait envoyée parce qu'elle n'avait pas d'emplacement pour mettre les piles! C'était une solaire, mais personne là-bas ne sait s'en servir. A la recherche d'un poste de radio en état de marche, la famille et les proches, de plus en plus nombreux au fil de la progression, vont jusqu’au ministère mais ce sera en vain. 

Nous verrons ensuite comment Roukiata ado a dû gérer un père qui tentait de la surveiller... comment ses copines et elle géraient les sorties, les garçons. A quoi il faut s'attendre quand on appelle un taxi, etc. 


Puis son arrivée en France, pleine de rêves quant à son avenir (dont certains se sont réalisés)

Et tout cela nous amène au moment ou enfin, tous les (nombreux bagages bouclés) elle est à l'aéroport et va prendre son envol, dans tous les sens du terme grâce à une jolie fin surprise.

Beaucoup d’humour, de chaleur humaine, mais surtout une gaieté qui ne se dément pas quels que soient les obstacle rencontrés. Un sourire permanent, une fraicheur et de simplicité qui vous fera du bien. Et en arrière plan au pays, enfin un islam vivant, qui fout la paix aux femmes, ne brime personne et laisse les gens vivre. Ça fait longtemps qu'on ne nous en avait pas montré. 

Le dessin lui aussi est simple, gai et plaisant. Vous en avez des exemples ci-dessus. Il colle parfaitement à l’album.


‎ 978-2377317752

12 décembre 2024

Le Bal 

d’Irène Némirovsky

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L'éditeur présente ce livre comme "une critique impitoyable, très virulente des nouveaux riches" mais ce n'est pas ainsi que je l'ai pris. D'ailleurs pourquoi critiquerait-on les nouveaux riches plus que les anciens? Y aurait-il un honneur particulier à avoir hérité d'une fortune familiale plutôt que de l'avoir bâtie soi-même? Y a-t-il même un honneur à être riche? Bref, vous le voyez, je n'étais pas du tout sur la même longueur d'ondes, alors reprenons.

Publié en 1929, alors qu'Irène Nemirovsky avait 26 ans, ce court roman raconte une anecdote qui a la charge explosive d'une caisse de bâtons de dynamite. Ce qui va se jouer sous nos yeux avec une totale cruauté réunit paradoxalement toutes les caractéristiques de l’anecdote et celles de la grande métaphore. Ce drame familial a valeur de peinture sociale et psychologique et lance ramifications et conséquences dans toutes les directions.

Les Kampf sont un couple très ambitieux qui, partis de pas grand chose et même de la pauvreté, ont accédé à la vraie fortune grâce au talent et à la chance du mari dans les jeux de Bourse. Ils ont maintenant pignon sur rue et se sont empressé de couper tous les ponts avec leur ancienne vie. Ils ont emménagé dans les beaux quartiers et dissimulent leur vie antérieure sous le voile commode de séjours changeants dans des résidences "dans le Sud". Il leur reste à faire leur entrée dans le "beau monde" où leur fortune ne suffit pas à se faire inviter. Aussi ont-ils l'idée de donner un grand bal luxueux, afin d'attirer l'attention sur eux et de commencer à se faire connaître. Ils prévoient 200 invités! Pas moins. Il leur faut frapper les esprits. Ils ont attendu longtemps cette fortune et ils n'entendent plus perdre de temps.

Le récit nous est fait à hauteur de leur fille qui, adolescente, ignore bien à quel point elle ressemble/ra à sa mère dont elle subit les rebuffades incessantes. La mère craint que leurs origines modestes ne transparaissent par leur fille, aussi met-elle tout en œuvre pour lui faire donner tout le vernis nécessaire et est-elle plus que très exigeante, la reprenant sans cesse.

La jeune-fille, de son côté, n'a que 14 ans et rêve plus de prince charmant que de fortune, bien que les deux soient totalement liés dans ses rêveries. L'amour y prend la plus grande place, mais dans un décor luxueux qui lui semble une évidence. Aussi, quand elle entend parler de ce bal et qu'elle passe la soirée à rédiger les enveloppes d'invitations avec ses parents en écoutant leurs projets, n'a-t-elle plus qu'une idée en tête : sy montrer. Mais sa mère la remet bien vite à sa place. Elle-même accède enfin à un évènement mondain si ardemment désiré depuis des lustres, ce n'est certes pas pour s'y montrer affublée d'une fille déjà grande qui montrera à tous son âge. La gamine ulcérée ne peut accepter cette frustration et commettra l'irréparable.

C'est énorme! C'est affreux! C'est un régal! On est horrifié et amusé en même temps/ On condamne tout le monde et on les plaint tous. L'anxiété, le désir, l'envie, l'ambition impitoyable s'expriment avec une force sans nuance. La personnalité de tous les personnages est bien montrée, même si on les voit peu, et chacun ne pense clairement qu'à lui-même et est prêt à y sacrifier tous les autres.

Irène Némirovsky sait faire naitre des émotions fortes chez ses lecteurs. Elle en joue et nous fait rire et compatir en même temps. Une réussite totale au point de vue psychologique autant qu'à celui du suspens et de la capture du lecteur. Se lit vite mais ne sera pas vite oublié !

9782246151340

07 décembre 2024

La Marque Jaune 

d’Edgar P. Jacobs 

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Ayant réalisé il y a peu que Jacobs et ses Blake & Mortimer n’étaient pas du tout représentés sur mon blog, j’ai entrepris d’en relire et commenter un pour combler cette lacune, et mon choix s’est porté, de façon assez prévisible j’en conviens, sur « La Marque jaune », l’album le plus connu et réputé le meilleur. C’est le sixième tome et la série avait dix ans à sa sortie. Le sixième tome, mais la troisième aventure seulement, car la première, « Le secret de l’Espadon » avait occupé trois tomes et la deuxième, « Le mystère de la grande pyramide », deux. Maintenant, les personnages sont bien rodés, graphisme et caractères.

Et voilà le capitaine Francis Blake et le professeur Philip Mortimer à nouveau réunis à Londres où le capitaine vient d’être chargé de la graaaande affaire du moment : mettre fin aux agissement de la mystérieuse Marque Jaune qui multiplie les vols les plus invraisemblables dans la capitale anglaise, au nez et à la barbe de la police impuissante. Scotland Yard reste sans la moindre espèce de piste. Ca commence comme ça :

Lisez ce texte ! On ne fait pas plus ringard ! Mais quel charme des histoires à l’ancienne ! Bref, on se lance, pour voir carrément les joyaux de la couronne disparaître de la Tour de Londres, et encore un point d’exclamation ! C’est qu’on retrouve son âme d’enfant, et c’est avec le plus grand sérieux qu’on découvre les invraisemblables aventures de nos deux compères. De son côté, la Marque jaune poursuit ses exploits, manifeste des talents vraiment surnaturels, et se met maintenant à enlever d’éminents savants, pile ceux que Blake vient de rencontrer. Ça tombe bien, on est en pays de connaissance.

L’enquête démarre. Le coupable n’est pas trop difficile à trouver, c’est un peu réac, les textes sont un peu longs et serrés, mais qu’importe ! C’est le charme de Londres, des Clubs et du Tea Time. C’est notre enfance et donc, forcément, il y a un peu de nostalgie.

Et puis il y a le dessin. Excellent. La ligne claire comme Hergé (lui et Edgar P. Jacobs se connaissaient bien), les décors soignés, le mouvement par l’envol du vêtement… en toute élégance.

C’est aussi un monde totalement sans femmes. On se demande d’où tous ces beaux messieurs ont bien pu sortir, ou plutôt non, on ne se le demande même pas parce que c’est comme ça. C’est bien connu, les femmes ne participent à aucune aventure, aucune décision, aucun pouvoir. D’ailleurs on ne les voit même pas. De tout l’album, on les aperçoit à peine à l’arrière plan dans une foule, ou brièvement en secrétaire ou servante, effacées -dans tous les sens du terme-, tandis que de beaux jeunes gens ou de fiers vieillards menaient des vies passionnantes. C’est ça aussi, qu’on a avalé avec nos lectures d’enfance. Il faut bien le dire.

978-2870971703


03 décembre 2024

L'appel du coucou

de Robert Galbraith - J.K. Rowling

****+


J’avais découvert les aventures de Cormoran Strike avec le deuxième volume, "Le ver à soie" et je l’avais bien apprécié, aussi j’ai tout de suite eu l’intention de les lire -ou audiolire- tous, mais de préférence dans l’ordre. Et me voici avec "L'appel du coucou ", le premier tome.

Donc, en tant que premier tome, nous découvrons le détective privé Cormoran Strike et sa nouvelle secrétaire, Robin. Ces deux-là ne se connaissent pas encore et sont en train de se découvrir tout autant que nous. Robin est une secrétaire haut de gamme, promise à une belle carrière pour laquelle elle est en train de proposer ses services et de choisir, mais Robin a un secret : depuis toujours, elle rêve d’être détective ! Aussi, quand le hasard la met à faire un remplacement dans l’agence déficitaire de Strike, elle y voit comme un signe et plus les jours passent, plus il lui est difficile de se résoudre à rejoindre la vie bien plus confortable mais aussi bien plus ennuyeuse que lui proposent plusieurs entreprises. Mais Strike est loin d’avoir les moyens de s’offrir une bonne secrétaire…

Au même moment, entre deux affaires sordides et banales, voilà que débarque le richissime John Bristow, frère de la mannequin-vedette Lula Landry qui vient de se défenestrer de son luxueux appartement londonien. Bristow, on l’a deviné, ne croit pas à la thèse du suicide (il est le seul) et il vient déverser pas mal d’argent sur le bureau de Strike pour lui faire entamer une enquête sérieuse sur cette mort, d’autant qu’il se trouve que le détective a autrefois été l’ami d’enfance de son frère mort accidentellement à cette époque-là. Aucun élément ne vient contredire la thèse du suicide adoptée par la police, mais la somme proposée est si importante que Strike quelque peu aux abois, financièrement, ne peut refuser. Bien sûr, il finira par découvrir qu’en effet… tout n’est pas clair dans ce suicide si évident et que, s’il y a eu crime, ce ne sont pas les suspects qui manquent.

Tout comme "Le ver à soie" nous emmenait mettre notre nez dans le monde littéraire, "l’appel du coucou" nous introduit dans celui de la mode qui n’est pas mal non plus. Le titre tient au fait que Lula et ses frères, sont des enfants adoptés. Comme le coucou, ils ont grandi dans un nid qui n’était pas celui de leurs parents biologiques.

Encore une fois j’ai passé un excellent moment, même si au début les explications sont un peu longues (mais faut dire que la situation est complexe et que les personnages sont nombreux). Encore une fois mon suspect numéro un était innocent. Caramba ! Encore raté !

Dès que je voudrai me payer une lecture récréative, je passerai au tome 3. Dans quel microcosme m’entraînera-t-il ? Vais-je enfin réussir à démasquer un assassin ? Nous le saurons au prochain épisode.


Série Les Enquêtes de Cormoran Strike

 L'Appel du Coucou ( The Cuckoo's Calling, 2013)

 Le Ver à soie (The Silkworm, 2014)

 La Carrière du mal (Career of Evil, 2015)

 Blanc mortel (Lethal White, 2018)

 Sang trouble (Troubled Blood, 2020)

 Sang d'encre (The Ink Black Heart, 2022)

 Pas encore traduit : The Running Grave, 2023

978-2253001713

29 novembre 2024

Olivia Sturgess 1914-2004 

de Floc'h & Rivière François 

**+


Je me suis terriblement ennuyée à la lecture de cet album de quand même 72 pages. (C’est long quand on s’ennuie.) Mais bon, je vais essayer d’en parler quand même et de votre côté vous allez essayer de vous souvenir que ce n’est qu’un avis subjectif. Je précise parce que je ne vais pas dire grand-chose de positif.

Tout d’abord, parus entre 1977 et 1984 dans Pilote Mensuel, soit la dernière période de Pilote et certes pas la meilleure, il y avait eu trois aventures, réunies ensuite en albums :

- Le Rendez-vous de Sevenoaks

- Le Dossier Harding

- À la recherche de Sir Malcolm

Dans un style revendiqué très british, ces aventures mettaient en scène deux personnages récurrents : l’écrivaine Olivia Sturgess et son ami, le critique littéraire Francis Albany. Cela se passait au milieu du 20ème siècle et on y parlait beaucoup d’Agatha Christie. Les énigmes étaient résolues par notre duo littéraire et l’intérêt résidait justement dans le décor social et les personnages littéraires réels qui étaient rencontrés et évoqués.

Paru vingt ans plus tard (quand même!) ce quatrième album entreprend de nous raconter la vie d’un des personnages, Olivia Sturgess (comment ça, vous aviez deviné?) à la façon d’un documentaire le plus réaliste possible… et cela est ennuyeux comme un documentaire, et encore, je suis injuste, on en fait maintenant de passionnants. Nous voyons Olivia grandir puis mener sa carrière d’écrivaine, vieillir… Les pages se tournent lentement et on se demande quand l’histoire va commencer, sans réaliser tout de suite qu’il n’y en aura pas d’autre que celle qu’on a déjà sous les yeux. La biographie fictive mais pas plus passionnante pour autant, est suivie de dossiers iconographiques évoquant des documents d’archive ou des photos… Voilà, voilà… soupir…

Je n’ai pas encore parlé du graphisme, alors allons-y, c’est le règne de la ligne claire à fond, mais une ligne claire raide. On pense plus à «Blake & Mortimer » qu’à Tintin, mais c’est moins bien que Blake et Morty. Beaucoup de cases se dispensent de tout décor. Pour tout arranger, la mise en scène est hyper statique, avec un texte plan-plan, comme le montre bien cette page. 

 C’est comme ça tout le temps. C’est d’un ennui ! (Mais je l’ai déjà dit, passons.)

Et le lecteur se demande pourquoi, mais pourquoi ! on lui a fait lire ça (et acheter, surtout!).

Je n’ai pas la réponse.

978-2205043471 



25 novembre 2024

Papa part maman ment mémé meurt

de Fabienne Yvert

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Petit exercice de style en trois mouvements, très réussi. Ce tout petit livre abrite un jeu de prose poétique et une leçon de vie. Leçon non pas donnée doctement, mais que nous tirerons nous-mêmes de ce qui nous est exposé. La narratrice, la fille de la maison, que nous prenons d’abord pour une petite fille mais dont sa mère dit qu’elle se veut artiste, donc, au moins une étudiante. Il y a aussi un frère, mais juste à l’arrière-plan, flou.

Les phrases, brèves, imagées, à fort pouvoir évocateur, disent des faits -réels ou non- et n’engendrent que des émotions. (On sent que l'auteur a aimé jouer de cette dualité faits-émotions). Avalanche de mots chacun choisi avec soin, dès la couverture


(C'est moi qui ai souligné)

Phrases distribuées en très courts paragraphes que le lecteur avale sans souffler.

Paragraphes partagés en trois chapitres, Papa, Maman, Mémé qu’on n’avait pas vue jusqu’alors et qui n’apparaît que le temps de disparaître. Trois périodes de la vie à forte charge émotionnelle que la plupart traversent ou ont traversés, où les émotions s’enflent d’une telle violence qu’elles prennent le dessus, emportant prévisions et projets comme fétus de paille. On peut essayer de se protéger, mais rien n’y fait. Nous sommes avant tout des êtres sensibles. Et pas seulement dans les grands moments de la vie d’ailleurs, mais par exemple, rien qu’en lisant ce petit bouquin qui nous a remués comme il voulait.

Ça peut être joué au théâtre, et d’ailleurs, ça l’a été.

Fabienne Yvert a publié plusieurs autres livres (toujours courts, me semble-t-il), mais je ne la connaissais pas.

978-2913886070


21 novembre 2024

 Depuis le 16 Novembre, date de son arrestation à l'aéroport.


Partagez, diffusez, ça ne doit pas passer inaperçu. Merci


Nez-de-Cuir

de Jean de La Varende

Adaptation Jean Dufaux

Dessin Jacques Terpant

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Voici une bande dessinée prise beaucoup par hasard à la bibliothèque parce que la voir m’avait remis en mémoire ce roman oublié de Jean de La Varende. Ayant réalisé que je ne me souvenais même plus exactement de l’histoire, j’ai voulu me rafraîchir la mémoire tout en découvrant ce que des auteurs de BD du 21ème siècle avaient pu en faire.

L’histoire, tout d’abord. Des gueules cassées, la Grande Guerre n’est pas la première à en avoir produit, elles ont été le vilain fruit de toutes les guerres, depuis la nuit des temps. Celle dont nous allons parler ici est le résultat d’une bataille napoléonienne où le sémillant officier Roger de Tainchebraye ferraillait héroïquement comme il se doit. Las, un coup de sabre fort malveillant emporta la totalité de son nez, tandis que plusieurs autres l’envoyaient frôler les portes de l’autre monde. Frôler, seulement et le Comte ayant survécu doit maintenant entamer une autre vie où nul ne pourrait supporter la vue de son visage. C’est un Comte dont l’amputation est « masquée » par un nez de cuir qui regagne ses terres en Pays d’Ouche et, persuadé de ne plus jamais pouvoir être aimé, comble sa solitude en multipliant à l’infini les conquêtes féminines sans lendemain, jusqu’à ce que bien sûr, sa route ne croise celle d’une toute jeune femme dont la fraîcheur et l’innocence lui feront rendre les armes. Mais comment tout cela peut-il se terminer ?

Publié en 1936, ce roman censé rapporter l’histoire d’un grand-oncle de l’auteur est d’un romantisme tragique et débridé, comme on peut l’imaginer. Pour tout dire, le titre intégral est "Nez-de-Cuir, gentilhomme d'amour". Ça ne s’invente pas. Il connut le succès à sa parution où la résilience n’était pas encore de mode et où l’on aimait voir des héros nimbés ad æternam d’un drame douloureux (mais noble) et de belles histoires d’amour tragiques. Et, disons-le, ce n’est pas mal fait avec une analyse psychologique qui se tient (et même finesse des relations entre le Comte et le Marquis de Brives), mais une absence totale de vision sociétale. 

En ce qui concerne la bande dessinée, elle est hyper classique, bien dessinée bien que sans doute un peu figée, mais sans surprise, ni fantaisie sans même parler d’originalité. Vraiment, je ne vois pas ce que je pourrais en dire. Elle ne m’a pas plus choquée qu’enthousiasmée. Excusez ma tiédeur, je préfère les BD moins classiques.

9782754825337