L'autodidacte, le boxeur et la reine du printemps
de Hernan Rivera Letelier
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Je découvre cet auteur chilien avec ce court roman d’inspiration fortement autobiographique. Une histoire somme toute banale, comme la vie, si ce n’est qu’elle aboutira à la naissance d’un écrivain.
Le récit est fait par l’autodidacte du titre qui vient d’arriver dans le village minier au bord du désert et de la pampa. Il a 20 ans, il sait tout juste lire et a découvert dans le même temps que "Depuis que j’avais appris à déchiffrer les premières lettres, j’éprouvais le besoin quasi physiologique de lire, lire tout ce qui était à portée de main. Lire. Lire comme un drogué. Puis, en commençant à écrire, ce besoin s’intensifia jusqu’à prendre l’habitude d’un nécessiteux qui ramasse et lit, assis par terre, le moindre bout de papier imprimé emporté par le vent."
Il n’a même jamais eu de livre jusqu’à sa très récente découverte de la bibliothèque. Pour vivre, il se fait embaucher dans la mine de salpêtre. C’est un travail très pénible et mal payé, mais il n’y a pas de choix. Pendant le transport, les maigres pauses et ses jours de congé, il lit. Il dort dans les baraquements des ouvriers, il mange dans une cantina. C’est là qu’il va rencontrer "la Reine du printemps" et en tomber fou amoureux, ce qui pour lui se traduit par une avalanche de poèmes et même finalement son chef-d’œuvre poétique. Evidemment il y aura une tierce personne, le boxeur du titre et tout cela finira mal ainsi que le veut la règle. Donc, comme je vous le disais, pas très original mais une très belle prose, une vie et un réalisme remarquables dus au fait que la vie de Hernan Rivera Letelier a beaucoup ressemblé à ce qu’il est en train de nous raconter. Remarquable également, un décor rare de ville minière de désert, de travail trop rude qui n’a de défouloir que dans l’alcool et les sports qui sont le seul espoir pour les plus doués de voir un jour leur vie s’améliorer au lieu de se détériorer rapidement dans cette vie trop dure qui détruit les êtres.
A la fin du livre, l’autodidacte, qui ne connaît que la poésie, découvre par hasard un roman* et son incroyable magie, le lit et le relit sans pouvoir s’en rassasier et acquiert
"… la conviction absolue que, si un livre déniché sur l’étagère la plus inaccessible d’une bibliothèque perdue dans le désert était capable de bouleverser -sauver- la vie d’un homme -un seul- rien que pour ça il valait la peine d’avoir été écrit. Et qu’il valait la peine d’écrire n’importe quel livre."
et le roman se termine sur sa décision :
"par dessus tout, je sentis dans mes tripes la certitude absolue que j’allais moi aussi écrire un roman. Mon sujet serait bien évidemment, le désert d’Acatama. (…) mon roman débuterait par la mort de la Reine Isabel".
Le premier roman de Hernan Rivera Letelier s’intitula «La Reine Isabel chantait des chansons d'amour" et évidemment, maintenant, j’ai envie de le lire. Le goût de la lecture, c’est une histoire sans fin. Et tant qu’à faire, je l’ai commandé en espagnol, histoire de voir si j’arrive à le lire. La V.O, c’est mieux pour goûter vraiment au style d’un écrivain.
* "Adan Buenosayres" de Leopoldo Marechal.
** Choup l'a lu aussi
Tu sais donner envie ! Quel joli titre...
RépondreSupprimer... mais on ne peut pas tout lire...
SupprimerJ'avais été attirée par le titre en librairie en fouinant côté romans chiliens, mais je n'ai pas encore pu mettre la main dessus à la bibli. Tu confirmes que ça vaut le détour en tout cas.
RépondreSupprimerOui, moi je l'ai eu à la bibli mais on le trouve aussi en solde il me semble, Momox etc.
SupprimerAh, je suis contente que tu aies choisi ce roman. Je l'avais repéré aussi (plutôt pour le côté social avec la mine) mais il n'est pas à la bibli (frustration). Je ne savais qu'il était aussi question de lecture... un point en plus ! J'ai ajouté un lien vers ton blog dans le récapitulatif du challenge Printemps latino au Chili.
RépondreSupprimerOk merci, je vais mettre le logo, je ne me souvenais plus qui faisait ce mois espagnol
SupprimerJe l'avais repéré aussi, mais pour de "mauvaises" raisons (son nombre de pages), et j'ai finalement opté pour un titre écrit par une femme (très court aussi !!). Mais je retiens qu'il vaut le détour, et pas que pour sa brièveté..
RépondreSupprimerOui, il mérite d'être lu. Quelle femme?
SupprimerMaria José Ferrada.
SupprimerMerci je vais voir
SupprimerMerci pour cette intéressante découverte !
RépondreSupprimerMerci de me lire :-)
SupprimerJe viens de le lire, et j'ai beaucoup aimé aussi! Le titre qui me tente maintenant c'est: Les trains vont au purgatoire.
RépondreSupprimerOui, moi aussi, ce premier titre m'a donné envie d'en lire d'autres. Un bon écrivain.
SupprimerJ'ai justement lu cet auteur pour le Printemps latino, mais avec un autre titre : La raconteuse de films qui se déroule dans le même décor d'une ville salpêtrière. Je te rejoins : c'est très joliment écrit mais pas follement original. Cependant, à te relire, j'ai bien envie de prolonger mon séjour dans ces contrées inhospitalières...
RépondreSupprimerPas étonnée pour le décor parce que je crois que c'est très autobiographique . J'apprécie chez lui le soin de la belle écriture, surtout s'il est vraiment autodidacte
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