Grossir le ciel
de Franck Bouysse
***+
Histoire de paysans taiseux, de derniers solitaires, Gus et Abel plus âgé, voisins dans Les Cévennes. "Un drôle de pays de brutes et de taiseux" . Leurs familles ont toujours été en désaccord, sans que Gus, que nous suivons tout au long du récit, sache pourquoi. Ici, "Des secrets de famille comme une bombe à retardement" minent le terrain. Ils se sont cependant rapprochés depuis qu'il ne reste plus qu'eux dans le voisinage, mais tout de même pas au points d'être familiers ni pleinement en confiance. Leur entente est plus pragmatique : services rendus et dus, bien utiles quand on est esseulé et pauvre, comme eux. Leur vie se resserre de plus en plus, isolés qu'ils sont mentalement autant que géographiquement, d'un monde qui leur devient de plus en plus étranger.
"Après être rentré, Gus s'était préparé une assiette avec le jambon coupé quelques heures auparavant, ainsi qu'un gros morceau de pain de maïs, puis il avait allumé la radio et mangé tranquillement, tout en écoutant des types qui parlaient de formes de vies inconnues se débattant dans des mondes sans correspondance avec le sien."
Même leurs relations avec le village voisin, lui-même en déclin, ne sont pas simples. Leur solitude se heurte au formalisme social de ceux qui, de leur côté, luttent pour se maintenir dans la société et pour qui ce n'est pas facile non plus. Le village a besoin de promoteurs, de nouveaux arrivants, mais ne veut pas y perdre son âme, se faire manger. Les commerçants se maintiennent comme ils peuvent, même l'épicière dont pourtant personne ne peut se passer. "C'était le genre de fille à s'occuper des affaires des autres avant les siennes, et à en inventer de nouvelles lorsqu'elle n'avait rien à se mettre sous la dent. En bonne commerçante, elle se sentit obligée de parler à Gus, et lui pas de répondre."
Gus se sent aussi largué par les "lois du marché" . "Le prix du chocolat avait encore augmenté ; ce n'était pas le cas du kilo de viande que lui achetait le marchand de bestiaux . Il y avait comme ça des mystères que Gus n'arriverait jamais à élucider, un principe de vases communicants qui ne communiquaient que dans un sens, et pas en sa faveur." Et pourtant, ces "lois du marché", sont peut-être à sa porte, plus mortelles que le loup... plus étranges aussi.
Vous prenez tous ces ingrédients, à peu près stables depuis longtemps, vous secouez un peu et...boum!
Mon seul bémol pour ce roman plutôt sympa: pas hyper original.
978-2253164180
Merci pour ta participation ! Un auteur que je n'ai encore jamais lu.
RépondreSupprimerC'était une première fois pour moi mais je pense que j'y reviendrai.
SupprimerPas lu celui-ci mais "Buveurs de vent" était très bien !
RépondreSupprimerAh, je note car comme dit plus haut, je relirai sûrement cet auteur.
Supprimerj'ai marché et bien aimé ce roman qui était le premier que je lisais de l'auteur. il m'a rappelé l'Epervier de Maheux de Carrière que j'avais aimé en son temps
RépondreSupprimerOui, un monde attachant mais menacé (dans tous les sens du terme, en l'occurrence ;-) )
Supprimer