Le banquier anarchiste
de Fernando Pessoa
978-2267048667
Ce très court roman de Fernando Pessoa se présente comme une discussion de fin de repas entre un banquier très prospère et un de ses amis. En fait de dialogue, le banquier parle longuement et l’ami, dans le rôle d’interviewer, ne fait qu’écouter et relancer la conversation quand besoin est. Le banquier explique qu’il a toujours été un anarchiste convaincu. Dès sa prime jeunesse, il a refusé de suivre les sentiers battus des règles communes et a tenu à soumettre toute loi et toute organisation à son propre jugement. Pour ce faire, il a rejoint des groupes et lu et étudié les auteurs anarchistes. C’est le cheminement de sa philosophie de la vie depuis sa jeunesse jusqu’à son présent de banquier prospère qu’il explique à son interlocuteur pour lui démontrer que tel qu’il est actuellement, il est encore plus anarchiste que dans sa jeunesse d’activiste et que même, il a atteint le summum en la matière.
Nous voyons à cette occasion que Fernando Pessoa connaît parfaitement les théories et penseurs anarchistes et qu’il sait de quoi il parle. Son raisonnement, spécieux par nature, a toutes les apparences de la plus parfaite logique et de la plus parfaite justesse. C’est un sophisme. Il interpelle, amuse, séduit… ou pas. En tout cas, il capte l’intérêt car on est curieux de savoir comment le plus parfait anarchiste pourrait se trouver être un banquier prospère… et il nous le dit. Il n’élude pas, ne biaise pas et n’a pas recours à la si commune langue de bois. C’est tout à fait bien fait. L’ironie court bien sûr tout au long du dialogue, mais on est forcé d’admettre sa cohérence interne. C’est intéressant. Mais on le sait, les banquiers gouvernent le monde et ont toujours su nous montrer les choses sous l’angle qui leur convenait. Fernando Pessoa, connu pour n’être jamais satisfait de ses œuvres, valida pourtant celle-là. Ce dialogue lui plaisait. Il m’a plu aussi. Je ne peux pas être plus royaliste que le roi. Oups ! Plus anarchiste que le banquier. Malgré des errements terriblement misogynes que je mettrai sur le compte de l'époque et d'un célibat pénible.
"Ecoute... Détruis tous les capitalistes du monde, mais sans détruire le capital. Vingt-quatre heures après, le capital, déjà passé dans d'autres mains, perpétuera sa tyrannie à travers celles-ci. Détruis au contraire, non plus les capitalistes, mais le capital, est-ce qu'il restera des capitalistes ? … Tu vois?"


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