19 septembre 2024

La couleur des sentiments

de Kathryn Stockett

*****


- Grand prix des Lectrices de Elle 2011

Ce roman dort dans ma PAL depuis des années et des années. La lecture en était déjà prévue pour les Pavés de l'été, mais l’année dernière! Ca ne s'était pas fait, mais cette année, en y ajoutant le Petit Bac, il fallait que j'agisse. Cette procrastination n'avait que trop duré. Et je l'ai fait, je l'ai lu mais, j’ai remis à plus tard la rédaction du billet, et un peu plus... je ratais le coche encore une fois! Cet excellent roman ne méritait vraiment ni cet excès d'ho(rr)eur ni cette indignité. Il est temps de conclure.

Jackson, Mississippi, début des années 60, la ségrégation raciale y bat encore son plein comme nulle part ailleurs et quoi que puissent dire les nouvelles lois. Martin Luther King n'a pas encore été tué, au contraire, il s’apprête à déclarer qu'il a un rêve, devant le Lincoln Memorial à Washington, D.C. Quelques voix noires commencent à s'élever, soutenues par quelques blancs aussi, mais pas à Jackson. A Jackson, vous seriez massacré pour la moindre apparence de sympathie pour cette cause. A Jackson, la ségrégation la plus stricte s'applique, qu'elle soit affirmée à coups de fusils ou de battes de baseball, ou qu'elle soit simplement appliquée dans les moindres détails de la vie quotidienne. Blanc et noirs ne peuvent partager ni lieux d'éducation ou de culte, ni hôpitaux, ni magasins, ni quartiers, ni bibliothèques où les livres pour noirs sont sévèrement censurés, ni vestiaires, ni toilettes, Il suffit d'être blanc pour faire partie des nantis, ou noir pour faire partie des domestiques, puisqu'on ne peut plus dire esclaves. Mais les "dames" blanches à la conscience tout à fait tranquille, sont dans le déni et se chargent de répandre la doxa selon laquelle tout cela est ce qui convient le mieux pour tout le monde. Parmi elles, Skeeter est à ce point innocente que, comme elle veut devenir écrivaine, lui vient l'idée de faire raconter par les bonnes noires, comment elles sont traitées chez les blancs qu'elles servent. Tout le monde sait bien qu'il ne faut pas faire ça, et Skeeter elle-même réalise peu à peu les risques que son initiative fait courir à toutes celles qui acceptent de collaborer avec elle, c'est le chômage définitif sans aides qu'on risque, l'attaque nocturne de sa maison et le lynchage, la mort peut-être. Mais les choses sont lancées, Le mouvement des Noirs se fait entendre au loin, en arrière plan, et surtout, une fois que les langues ont commencé à se délier, tout sort.

Parallèlement, mais moins fort, on aperçoit les autres oppressions, les petits garçons à qui on apprend dès six ans à tuer des animaux à mains nues, les filles dressées à séduire et à se vendre, les maris violents, l’homosexualité complètement taboue, la violence partout contre celles et ceux qui ne rentrent pas dans le moule (la scène du médecin lors de la fausse couche est une pure horreur).

Un roman vraiment indispensable qui parle d'humanité, de femmes faibles mais fortes, d'hommes qui, même bienveillants, renoncent rarement à jouir des avantages qu’ils ont, si abusifs soient-ils. Wikipédia m'apprend que "The help" (titre original) a été refusé par soixante agents littéraires sur une période de trois ans, avant d'être publié en 2009 mais qu'il a immédiatement été un énormissime succès (comment les éditeurs font-ils pour manquer à ce point de flair?) "En août 2011, les ventes totales, toutes éditions confondues, sont estimées à sept millions d'exemplaires." et ça continue.

Plaisamment présenté partout comme "Le premier roman de Kathryn Stocket", mes recherches ne m'ont pas permis de trouver qu'elle en ait publié d'autres.


PS : L'oiseau moqueur de Harper Lee est plusieurs fois évoqué (encore un qui se languit dans ma PAL)...

978-2330026691



15 septembre 2024

Billy Summers 

de Stephen King

*****


Pas d'horreur, ni de terreur dans ce roman de Stephen King, pas non plus de science fiction, pas de fantôme, et strictement aucun élément irrationnel. "Billy Summers" serait plutôt un thriller, mais un thriller lent.

Billy Summers ex-tireur d'élite de l'armée est devenu tueur à gages, l’un des meilleurs en fait, mais comme il éprouve le besoin de s'auto-justifier, il n'acceptera pas de contrat si vous ne lui avez pas d'abord assuré que la victime est "un méchant". Quelques anecdotes sur la vilenie de la cible sont aussi nécessaires qu'un salaire élevé. Après... Billy ne va pas non plus jusqu'à vérifier que ces anecdotes sont exactes, mais leur évocation suffit à calmer sa conscience. Billy qui a déjà une longue carrière derrière lui songe à prendre sa retraite et on lui propose justement une prime tellement mirobolante pour un nouveau contrat, qu'il estime que cela lui permettrait de le faire. Et il accepte, encaissant dès sa réponse donnée, un acompte somptueux.

On l'installe dans un bureau dans un immeuble face au palais de justice. Il devra abattre une crapule sur les quelques mètres qui sépareront le fourgon de l'entrée du tribunal. Comme on ne sait pas du tout à quelle date aura lieu le procès, il faut que Billy puisse attendre longtemps, devenir familier de tous dans cet immeuble surveillé, sans éveiller le moindre soupçon. Il sera prévenu au dernier moment. On lui a fait une "couverture", il sera un écrivain qui vient tous les jours à ce bureau pour ne pas se laisser distraire du roman qu'il doit absolument terminer rapidement. Cette couverture amuse les truands car Billy est plutôt un type un peu simple, mais il est connu pour sympathiser facilement avec tout le monde et c'est ainsi que le camouflage fonctionne parfaitement. La planque dure des semaines, des mois, il est devenu familier à tous et personne ne se méfie de lui. Pour occuper son temps libre et comme il dispose d’un ordinateur, Billy raconte un peu ses mémoires, puisqu'il est écrivain et à sa grande surprise, il se prend tout de suite au jeu et écrit pendant des heures avec beaucoup de facilité et de plaisir. Bientôt, il ne pourra plus envisager vivre sans écrire, chose que personne n'avait prévue, même pas lui. Et voilà que S. King se met à nous parler de l’écriture en même temps que de meurtres...

« Il a commencé à écrire du point de vue de Billy l’Idiot, mais c’est devenu autre chose (…) c’est peut-être ça l’effet de l’écriture lorsque ça compte vraiment. (…) Billy se met à taper sur les touches, lentement d’abord, puis en accélérant. Autour de lui l’été s’écoule. »

Il y a encore une chose qu'il faut savoir au sujet de Billy, c'est qu’au même titre qu'il a des réserves d'argent, d'armes ou de faux papiers dissimulées en divers endroits "en cas de coup dur imprévu", il a considéré depuis le début qu'il était bon que tout le monde sous-estime considérablement ses capacités intellectuelles. En fait, Billy Summers n'est pas du tout l'homme bas du QI que tout le monde suppose et cela lui donne une bonne mesure d'avance sur tous, amis ou ennemis.

La cible finit par arriver et Billy tire. Après, rien ne se passe plus comme prévu.

Un roman captivant qui m'a énormément plu, avec une excellente psychologie des personnages, une vie et un savoir faire propre à Stephen King qui peut nous faire croire à n'importe quoi avec une parfaite apparence de réalisme. Les personnages, qu’ils soient secondaires ou principaux, ont tous une vraie épaisseur et une vitalité frappante. On les "voit" tous. Une histoire qui prend son temps, nous installe bien confortablement et nous emmène où elle veut. On est vraiment encore une fois immergé dans ce monde qu'il a créé pour nous. C'est ça que Stephen King sait faire et c'est encore pleinement le cas cette fois. Ce titre, ce thriller lent, va faire partie de mes King préférés.

On parle d'une adaptation au cinéma et je n'arrive pas à savoir si elle est faite ou non. Di Caprio serait dans le rôle de Billy Summers. C'est ok pour moi. Il conviendrait parfaitement. Je ne suis pas du tout cinéphile, je ne sais pas si je verrai ce film mais à l'occasion, pourquoi pas? Par à l'occasion, je veux dire s'il passe sur une chaîne et que je ne suis pas obligée d'aller au cinéma. Je l'ai dit: je ne suis pas cinéphile, de toute façon, même quand j'aime les versions vidéo, je préfère toujours la lecture et mes images à moi.


Relevé :

« Dans le monde entier, des livres inachevés -des mémoires, des poèmes, des romans, des méthodes infaillibles pour maigrir ou devenir riche- attendent dans des tiroirs car ce travail est devenu trop lourd pour les personnes qui essaient de le porter, alors elles l’ont reposé. »


« Le temps passe. Il a un don pour ça. »

978-2226460332

 Attention!

Le Challenge des Pavés de l'été 

se terminera dimanche prochain!

Le 22/09 à minuit

Dépêchez-vous d'envoyer vos derniers liens. 😉

11 septembre 2024

L’eau du lac n'est jamais douce

de Giulia Caminito

****


Le récit nous est fait à la première personne par Gaïa qui nous raconte son enfance. Née dans la banlieue de Rome, dans une famille très pauvre d'un père ouvrier travaillant au noir dans le bâtiment. Elle a trois frères (merci la très proche Radio Vatican qui, non contente d'empoisonner tout le monde de ses ondes toxiques, veille à la non maîtrise du contrôle des naissances). Ils n'ont pas de logement et le livre commence par la scène épique que sa mère Antonia va faire dans les bureaux de la mairie pour tenter d'en arracher un pour sa famille. Loin de la soutenir dans ce combat difficile, GaÏa estime que sa mère se donne en spectacle et a honte.

« Je la juge et ne lui pardonne pas. »

Bientôt le père tombe d'un échafaudage, reste paralysé, et, n'étant pas déclaré, n'a droit a aucune aide. Antonia se met à faire des ménages avec une efficacité féroce et pointilleuse. Antonia est une femme dure et fière qui n'a qu'une idée en tête: faire vivre sa famille, bien élever ses enfants.

« Celle qui tient seule les murs quand tout s’écroule, celle qui nous sort sur son dos de la maison en flammes. »

Son combat numéro un reste l'obtention si difficile en ces temps de passe-droits et de dessous de table, d'un logement décent. Elle finit par en obtenir un, mais pas à Rome même, dans sa banlieue, près du lac du titre, ce qui vaudra à Gaïa de nombreuses heures dans les transports pour aller étudier. Car Gaïa étudie, et pas trop mal, elle se sort mieux que ses frères de ce qui concerne l'école, si ce n'est des relations sociales.

Nous verrons ainsi grandir la petite fille, devenant une jeune fille dure comme sa mère, tendue vers un but qui est de réussir par les études et se heurtant à l'entrée dans les études supérieures au mur de la Reproduction mis en lumière par P. Bourdieu. On ne pouvait pas mieux l’illustrer.

Si au départ, à part la gène occasionnée par son reniement de sa mère dans les bureaux du logement, le lecteur se sent plein d'empathie pour cette gamine qui a un démarrage si difficile dans la vie, il prend peu à peu quelques distances en découvrant l'égoïsme et l'insensibilité, puis la violence que ces conditions difficiles ont développés en elle. On la plaint et on admire sa ténacité. Comme on dit, il faut qu’elle aille tout arracher avec les dents, mais on l'aime moins. Son frère deviendra un ouvrier militant anarchiste, sans qu'elle comprenne ses idéaux, sa mère mettra en elle tous ses espoirs de progression sociale sans qu'elle lui en soit reconnaissante, Gaïa ne conçoit que son propre point de vue et son propre intérêt et s’il comprend parfaitement comment ses conditions de vie difficiles et son héritage maternel l'ont amenée là, le lecteur prend néanmoins ses distances avec la personnalité dure et égoïste qui voit ainsi le jour. Sa mère, bien qu’incapable de déléguer ne serait-ce qu’un peu de ses pauvres pouvoirs pour s’en faire une alliée, poursuit elle aussi bille en tête. Deux parcours parallèles qui auraient eu besoin de se fondre pour n’en faire qu’un.

C’est un récit âpre et sans douceur. Jamais rien n’est facile pour Gaïa, sans même que les mieux nantis qui l’entourent ne s’en rendent compte. Non, rien n'est doux dans cette histoire qui est finalement l'histoire de la malédiction qu'est la misère.

978-2351788875


07 septembre 2024

 L'oreille interne 

de Robert Silverberg

***


Quatrième de couverture:

"David Selig, Juif new-yorkais d'une quarantaine d'années, se considère comme un raté. Il est pourtant télépathe et pourrait profiter de ce don pour faire fortune, conquérir - et garder ! - les plus belles femmes... Mais non, rien à faire, il estime être un monstre tout juste bon à faire le nègre sur des devoirs d'étudiants, incapable de réussir sa vie. La dernière preuve en date : ce talent qu'il déteste tant, mais qui est finalement son seul lien avec le reste de l'humanité, est en train de le quitter ! Apeuré à l'idée de se retrouver seul avec lui-même, Selig nous conte sa misérable existence."

Ce qu'i faut savoir en ce qui concerne ce roman, c'est qu'en dehors du fait que le narrateur est télépathe, il n'y a rien qui le rattache au domaine de la Science Fiction ou de la fantasy. Il n'est pas mauvais non plus de savoir qu'il n'y a ni aventures, ni suspens, ni même action. Nous dirons que c'est un roman psychologique. Nous suivons le personnage principal qui nous raconte comment à la suite d'on ne sait quel caprice de la génétique, il est né avec un don supposé ne pas exister: il lit dans les pensées des humains proches de lui aussi clairement qu'il les voit de ses yeux. Tout de suite, il a le réflexe de dissimuler son don. D’abord, pour ne pas être jugé « différent » et rejeté par ses camarades, puis plus tard, de crainte de devenir cobaye pour scientifiques. 

On pense tout de suite que c'est un sacré avantage, et c'en est un, effectivement, mais passé l'insouciance de l'enfance, notre télépathe opte pour une vision dépressive du monde et de sa "différence" et loin d'utiliser son don au mieux de ses besoins ou désirs, il sombre dans l'auto-apitoiement de l’homme inadapté car différent et refuse d'en tirer partie. Il végète ainsi dans une vie qui lui assure juste les revenus nécessaires à sa survie à New-York (il se fait payer par des étudiants pour leur faire leurs devoirs même les plus ardus en leur garantissant au moins un B). David est très cultivé et Silverberg voit là l'occasion de nous refiler quelques uns de ses propres devoirs de fac (Kafka, Euripide etc.) in extenso. Personnellement, je les ai lus sans déplaisir (je suis du genre que tout intéresse), mais franchement, ça n'avait rien à faire dans un roman de SF. Ça n'avait aucun rapport avec le reste et on ne peut pas dire que ça ne ralentissait pas le rythme déjà bien pépère.

Nous voyons notre David Selig qui après avoir passé la première partie de sa vie à médire du don inespéré qui lui était échu, va passer le moment que nous lisons avec lui à constater avec terreur et regret son affaiblissement, puis le reste de sa vie à regretter sa disparition. Et nous, on pense à tout ce qu’il aurait pu faire… Soupir.

Bref, notre télépathe aurait mieux fait de mieux saisir les vertus du carpe diem.

Donc, ce roman de la première période Silverberg est plutôt un roman psychologique qu'un roman de SF. Il n'est d'ailleurs pas désagréable à lire. Tout cela est plutôt bien vu et bien raconté. Le style est séduisant Franchement, je l'ai lu sans déplaisir, mais il y a quand même tromperie sur la marchandise



978-2070319374

03 septembre 2024

L’île du Point Némo

de Jean-Marie Blas de Roblès

*****

480 pages, pas 500 ! 😛

« Tout se passe, dit-elle en préambule, comme s’il n’y avait qu’une seule histoire à raconter, un seul récit dont certains pans ressurgissent par bribes, se complètent ou se nient au fur et à mesure qu’ils affleurent à la mémoire. La longue approche en hélice d’un cœur sombre qui ne se laisse deviner que par la récurrence de motifs obstinés et mystérieux. »


COM-PLE-TE-MENT foutraque, ce roman ne saurait manquer de séduire les esprits aventureux et légèrement déjantés (et pas bégueules car certaines scènes sont carrément offshore).

On s'en aperçoit dès les premières lignes. Rien ne colle. Holmes n'est pas Sherlock et le monde tout autour n'est ni celui d'aujourd'hui, ni celui d'hier, ni celui de demain. Alors on reconsidère la lecture qu'on vient de commencer et on reprend.


Nous sommes dans un univers steampunk qui s’accommoderait on ne peut mieux d'un traitement en bande dessinée. Martial Canterel à la fortune illimitée et ne perdant jamais son esprit hautement clairvoyant bien qu''il soit en permanence drogué jusqu'aux yeux, s’attelle à un mystère hautement incompréhensible. Des pieds droits dépourvus de leurs corps sont retrouvés en Angleterre. Ils portent tous une chaussure luxueuse de marque tout aussi totalement inconnue que leurs précédents propriétaires : Martyrio. C’est pour obtenir ses lumières sur ce troublant mystère que Holmes est venu consulter Canterel, mais voilà que le mythique diamant jaune de Lady MacRae a été volé en son coffre réputé inexpugnable et que la dame (anciennement liée -très- à Martial) demande leur aide pour le retrouver. Et c’est ce qui jette nos héros dans une aventure tout à fait hors normes et imprévisible

Pour être imprévisible, elle le sera. Nous ferons le tour du monde à pied, en voiture, en car, train, aéronef, bateau, sous-marin et j’en oublie. Nous travaillerons des heures dans une usine chinoise délocalisée en France pour goûter aux méthodes non orthodoxes du riche Wang, Nous irons découvrir le pouvoir des lectures à haute voix dans les manufactures de cigares cubains. Nous traverserons les steppes en train et seront attaqués par des brigands sanguinaires mais néanmoins philosophes. Nous chercherons le Point Némo (le trouverons-nous?). Nous serons roulés, trahis ou sauvés. Nous naviguerons. Il y aura une mutinerie à bord, il y aura des explosions, des amours tragiques, des femmes qui dorment trop et trop profondément, des hommes qui boivent trop. Des scènes problématiques, voire gênantes. Des gens très riches, des gens très pauvres, de l’héroïsme, de l’abus de faiblesse, de la révolte, de la surexploitation d’humains, des vilénies abjectes, de l’héroïsme d’une pureté exceptionnelle, de l’amour sans limite, de la haine illimitée… Il y aura tout et même, trop. Trop de tout dans une totale démesure.

Ça sent le Jules Vernes, le Ponson du Terrail, le Connan Doyle, le Dumas, le Eugène Sue, le Lovecraft etc. Il y a des clins d’œil dans tous les sens. Toutes les envolées romancées les plus audacieuses ont leur écho ici. Bref, un joyeux foutoir qui cache une structure romanesque complexe mais totalement maîtrisée.

J’adore. Mais ça ne peut pas plaire à tout le monde. C’est normal, et ça n’est pas un problème.


"Des solutions, Professeur, lesquelles? Continuer à faire comme si Dieu n'était pas mort depuis deux cents ans? Comme si les sciences pouvaient se suffire à elles-mêmes pour convoquer une éthique? Comme si les états offraient encore une once d'espérance? Comme si le capitalisme, le marxisme ou les autres idéologies globales n'avaient pas montré leur incapacité à assurer le bonheur des peuples? Comme si l'écologie pouvait être autre chose qu'une simple prise de conscience individuelle? Comme si la guerre et la paix ne s'étaient pas dissoutes en une malveillance continue?"

978-2843049309



01 septembre 2024

 Alors, attention!

Parce que si on continue comme ça,

on va avoir moins de pavés que l'an dernier...  


Je dis ça, je dis rien...  😉

Clic!

30 août 2024

Les 39 Marches

de John Buchan

***


Ce qu'il faut savoir, c'est que ce roman est paru en 1915. Il ne faudra donc pas s'étonner de toute la charge rétro qu'il véhicule et encore, John Buchan était-il un diplomate, il a donc appris à parler sans heurter personne, aussi ses réflexions ne sont-elles jamais outrancières. Le colonialisme occupe tout l'arrière plan, mais pas le devant de la vitrine. Il a par ailleurs bel et bien fréquenté le monde des espions de son époque, qui n'avait sans doute pas grand chose à voir avec celui d'aujourd'hui. John Buchan est même devenu un personnage de tout premier plan puisqu'il fut gouverneur général du Canada, ce qui n’est pas rien. Mais c'est l'auteur de romans d'espionnage qui nous intéresse aujourd’hui. Son héros Richard Hannay, de retour d'Afrique du Sud et de la guerre des Boers, sera finalement le personnage principal de six romans et personnage secondaire d'un septième. "Les 39 marches" est le premier et le plus connu, d'autant qu' Alfred Hitchcock en a fait un film à succès.

Ici, Richard Hannay commence par s'ennuyer beaucoup dans cette vieille Angleterre, et songe sérieusement à repartir vers des pays plus excitants lorsqu'une énigme mortelle vient le chercher à domicile en la personne d'un voisin qui lui raconte une invraisemblable histoire d'espionnage et d'Angleterre en danger que son rapide et brutal assassinat va rendre plus crédible.

Hannay n'est pas homme à rester simple spectateur d'une affaire pareille, d'autant qu'il a réussi à trouver ce que les assassins étaient venus chercher mais qui leur a échappé... un carnet noir aussi plein d'indices et de révélations qu'indéchiffrable! C'en est trop! notre héros passe à l'attaque ET à la défense du pays.

S'en suit une longue course-poursuite dans les beaux paysages d’Écosse (patrie de Buchan comme de son héros), chaque étape correspondant à la fois à un chapitre et à une attaque déjouée par le vaillant Hannay.

Ça se laisse lire, mais je n'en ferais pas mon livre de chevet. C'est à la fois aventureux et d'une grande naïveté. Le niveau 0,5 de la psychologie de personnages. Sans doute dans un souci de réalisme, Buchan insiste bien à nous expliquer comment faire pour se mettre vraiment dans la peau du personnage pour qui on entend se faire passer. Petite leçon d'espionnage à l'ancienne, comme si on risquait d'en avoir l'usage. En même temps, quand on n’est que quatre ou cinq sur des kilomètres de lande sauvage… mais si, ça marche quand même.

Il faut savoir aussi que c'est un monde absolument sans femmes. Elles n'existent pas, n'ont aucun rôle. On en aperçoit parfois une à l'arrière plan, dans un emploi totalement subalterne, généralement pour donner à manger.

J'ai noté aussi plusieurs remarques très francophiles, étonnantes chez un britannique mais rappelons nous que John Buchan a fait sa carrière diplomatique au Canada, c'est plein de Français, ce pays-là.

Les 39 marches est diffusé gratuitement sur les liseuses mais il y a eu plusieurs version papier (dont une dont l’illustration donnait la solution, faut le faire !) et si vous vous sentez l'envie d’enchaîner plusieurs aventures de Richard Hannay, les éditions Omnibus les avaient réunies en un volume. On trouve encore facilement versions single ou compilations chez les soldeurs.


Citation: 

" C'était, je crois, l'homme le plus brave du monde, car il tremblait toujours de peur, et cependant, il ne reculait devant rien."



Série Richard Hannay

The Thirty-Nine Steps (1915) Les 39 Marches

Greenmantle (1916) Le Prophète au manteau vert ou Le Manteau vert

Mr Standfast (1919) La Troisième Aventure de Monsieur Constance

The Three Hostages (1924) Les Trois Otages

The Courts of the Morning (1929) Le Camp du matin (apparition)

The Island of Sheep (1936), L'Île aux moutons

Sick Heart River (1941), aussi titré Mountain Meadow aux États-Unis.



9782277300960

26 août 2024

L'origine des larmes

de Jean-Paul Dubois

*****


Quel roman! Un gros coup de cœur pour moi, je vais tenter de vous dire pourquoi.

Paul passe devant le juge. Il a tiré deux balles de revolver dans le crâne du cadavre de son père qu'il venait de faire rapatrier de Montréal à Toulouse où il habite. Thomas Lanski était certes déjà mort, mais c'est interdit quand même et c’est pourquoi Paul est dans ce tribunal. Regrette-t-il son geste? Oui et non. Non, car il n'a pas de remords, oui parce que ne s'en étant pas trouvé soulagé, il commence à penser que cela ne valait pas tous ces embêtements qui lui arrivent maintenant. En tête des embêtements, une obligation de soins psychiatriques à raison d'une séance mensuelle pendant un an. Et c'est ainsi qu'entre en scène Frédéric Guzman psychiatre, assez représentatif de la profession me semble-t-il bien que je n'aie pas encore eu l'occasion d'en fréquenter personnellement. Mais comment vivre en notre 21ème siècle sans en avoir jamais vus et écoutés sur nos ondes et écrans?

Ce psychiatre va obliger Paul à se raconter sur son enfance avec ce père tant haï. Nous découvrons alors que c'est surtout une enfance sans mère, celle-ci étant morte lors de l'accouchement qui vit également le décès du frère jumeau que Paul aurait dû avoir. A la suite de cette naissance calamiteuse (mais pas par chagrin), le père a effacé toute trace des deux morts au point que Paul n'a jamais trouvé une seule photo de sa mère et ignore même où elle a été enterrée et où était sa famille.

Guzman exige sa livre de chair à chaque séance en choisissant lui-même les sujets. Les points sensibles, évidemment. Paul, qui par nature n'est guère porté aux épanchements et que ces séances font énormément souffrir, se demande s'il ne ferait pas mieux d'accepter la prison ferme plutôt que la "thérapie". Mais il est difficile de choisir l'enfermement, le bruit et la promiscuité quand on est un introverti hyper-solitaire, chef d'entreprise et libre de tous ses choix.

Les séances mensuelles avec le docteur Guzman se poursuivent donc, toujours plus invasives et déstabilisantes, détruisant le fragile équilibre, anormal certes, mais équilibre tout de même sur lequel reposait la vie de Paul. Le psychiatre, persuadé de son bon droit et même de son savoir-faire, poursuit son œuvre sans jamais se remettre en question. Et l'histoire se déroule.

Dans ce roman, une légère uchronie nous a portés en 2031. La dégradation du climat nous vaut une pluie permanente, illimitée. Le développement des IA aurait par ailleurs pu apporter une aide précieuse à Paul qui l'avait d'ailleurs trouvée tout seul, mais le psychiatre n'a que mépris pour ce substitut et n'en tient pas compte… Il pleut toujours. Ces larmes du ciel sont le décor de cette histoire dont le noyau est la mort, celle de la mère à sa naissance, celle du père qui l’a amené là, celle pour laquelle l’entreprise dont il a vécu fabrique des housses mortuaires

Au fil des séances, nous saurons tout de l’enfance de Paul traumatique au-delà de ce que l'on aurait pu imaginer et nous découvrirons en fait plusieurs origines des larmes. Nous le verrons lutter contre la sape que causent les séances («ce protocole introspectif et intrusif»), tenter de compenser la destruction de ses structures de sécurité, au profit de plus saines selon le docteur qui a clairement sous-estimé la fragilité de l'édifice et ne se doute de rien, au profit d'un trou béant que nul amour de chien ou amitié d’IA ne viendront colmater, selon ce que voit le lecteur...

« Il n’y a rien à retirer de tout ça. Que de la peine. »

Une histoire triste donc, mais on aime les histoires tristes également, non ? quand elles sont aussi belles, aussi bien racontées et nous disent des choses sur le monde et son fonctionnement.


PS : Lecture interrompue par plusieurs consultations de Google pour des mots inconnus (« trognies » ?) ou des personnages. J’adore ça.



978-2823620795

22 août 2024


Retour à Reims

de Didier Eribon

****+


Quatrième de couverture :

"Après la mort de son père, Didier Eribon retourne à Reims, sa ville natale, et retrouve son milieu d'origine, avec lequel il avait plus ou moins rompu trente ans auparavant. Il décide alors de se plonger dans son passé et de retracer l'histoire de sa famille. Évoquant le monde ouvrier de son enfance, restituant son ascension sociale, il mêle à chaque étape de ce récit intime et bouleversant les éléments d'une réflexion sur les classes, le système scolaire, la fabrication des identités, la sexualité, la politique, le vote, la démocratie...Réinscrivant ainsi les trajectoires individuelles dans les déterminismes collectifs, Didier Eribon s'interroge sur la multiplicité des formes de la domination et donc de la résistance. Un grand livre de sociologie et de théorie critique."

Je souligne ces derniers mots pour ceux qui sont plutôt à la recherche d’anecdotes.

Dans cet ouvrage, Didier Eribon se choisit lui-même comme objet d'étude en tant qu'élément social car il est parfaitement conscient qu’ "En réalité, je croyais choisir et j'étais choisi ou plutôt capté par ce qui m'attendait"

En revenant sur ses souvenirs d'enfance, il explique en quoi, homosexuel issu d'un milieu ouvrier homophobe, il a dû pour devenir le professeur d’université qu''il est maintenant, lutter contre tous (famille, milieu social, système scolaire (eh oui), système social dans son ensemble) pour faire des études, mais également pour accéder à une vie sexuelle qui lui convienne. Les deux éléments étant pourtant officiellement un droit indiscutable de chacun en France, il nous montre comment il est en réalité très difficile de les obtenir; et quand il dit "très difficile", il faut comprendre "presque impossible". Et pire même, que si par extraordinaire on parvient à obtenir les diplômes convoités, rien n'est fait pour autant car "un tel diplôme ne revêt pas la même valeur et n'offre pas les mêmes possibilités selon le capital social dont on dispose et selon le volume d'information nécessaire aux stratégies de reconversion du titre en débouché professionnel. dans ces situations, l'aide de la famille, les relations, les réseaux de connaissances etc., tout concourt à donner au diplôme sa véritable valeur sur le marché du travail." Comment se peut-il qu'il en soit ainsi alors que tout le discours officiel et conscient clame le contraire? C'est ce qu'il étudie et met en lumière.

Il ne considère pas ses souvenirs comme des anecdotes personnelles, bien qu'ils le soient aussi, mais comme des indices amenant à découvrir et mettre en lumière des mécanismes sociétaux. Et leur puissance ! C'est en cela que son livre n'est pas un énième épanchement sur le thème "ma vie est si intéressante, écoutez tous!" mais un vrai moment d'étude et d'amélioration de notre compréhension de notre vécu. Je dis "notre" parce qu'il est évident que la société est une et que nous y vivons tous et que ce qui s'y passe ne touche pas seulement certains de ses éléments et pas d'autres. C'est un tout et ce que nous observons avec ce livre ne concerne évidemment pas que les enfants issus de milieux pauvres ou les homosexuels. Il est important pour chacun d'avoir une vue claire de ce qui est autour de lui et de ce qui s'y passe. Didier Eribon développera d'ailleurs ses thèses dans un ouvrage suivant: "La société comme verdict" .

Quant à ce retour à Reims, comme c'est facile à deviner pour peu qu'on y songe un moment, il fut difficile à écrire. Didier Eribon l'avait entamé peu après la mort de son père mais "abandonné quelques semaines plus tard tant il m'avait paru impossible de poursuivre ce travail" . Un peu de temps ayant passé et fait son œuvre, il s'est un jour senti prêt à le reprendre. Non seulement prêt mais cela était devenu une nécessité. Il avait pris un recul suffisant. "Je savais qu'un tel projet _ écrire sur le retour _ ne peut se mener à bien qu'à travers la médiation, je devrais dire le filtre des références culturelles: littéraires, théoriques, politiques."

A lire.

Wodka l'a lu

9782081396005



18 août 2024

Un Océan d'amour 

de Wilfrid Lupano (scenario)

Grégory Panaccione (Dessins)

*****


Je ne peux résister à l'envie de vous montrer ci-dessus la magnifique quatrième de couverture pleinement représentative de l'humour iconoclaste de nos auteurs de ce tout aussi magnifique roman graphique dont vous avez sûrement déjà entendu parler: "Un océan d'amour" .


C'est l'histoire d'un petit marin breton et de sa bigoudène d'épouse.

Le petit marin à grosses lunettes est patron pêcheur, c'est à dire qu'il possède un petit bateau de pêche et emploie un matelot avec lequel il part chaque jour jeter ses filets au large, mais depuis un moment déjà, la pêche est maigre...

 Comme il passe la journée en mer, la Bigoudène lui prépare un repas à emporter qui inclut toujours une boite des excellentes sardines à l'huile justement nommées "Délicieuses". (Problème: le marin ne les aime pas et balance chaque jour la boite dans la cale de son bateau.) Le soir, son épouse vient attendre sur le port le retour du marin.

Un beau jour, le petit bateau est carrément pris dans les filets d'un navire usine qui ne s'en aperçoit même pas et l'emmène vers d'autres cieux. Finalement, ils parviennent à mettre le canot de sauvetage à l'eau et le matelot part, mais pas le petit Capitaine qui refuse d'abandonner son navire. Le matelot parvient à regagner le port où la Bigoudène se désole et explique ce qui s'est passé. La Bretonne têtue comme le sont les Bretons met alors tout en œuvre pour retrouver sa moitié. La voie officielle d'abord qui permet de retrouver le navire usine qui se dirige vers Macao, mais le petit bateau s'est décroché.. L’épouse éplorée se tourne alors vers les voies plus aléatoires comme la medium qui carbure au chouchen et lit dans les crêpes, ou les dévotions à la vierge. Les deux dernières lui indiquant plutôt Cuba comme but de ses recherches. Qu'à cela ne tienne, la Bigoudène casse sa tirelire et se paie une traversée vers Cuba (c'est long mais elle a trop peur de l'avion). Elle ira chercher son marin!

Et les voilà partis tous les deux par des voies et dans des directions différentes.

En suivant le petit Capitaine, qui sera sauvé de la famine par son stock de boîtes de sardines, nous découvrirons d'abord l'appauvrissement drastique des zones de pêche traditionnelle puis les différentes nuisances marines dont le gigantisme rend l’impact colossal et l'espoir de pouvoir lutter contre eux faible. Il rencontrera la pêche-usine, le porte containers qui dégaze sans vergogne en pleine mer et les océans de plastiques. Il sauvera un goéland (pollué lui aussi) et ils deviendront amis. Son chemin croisera celui de douaniers tropicaux pas trop scrupuleux et de pirates qui le sont encore moins. La Bigoudène de son côté fera découvrir la dentelle au crochet à la jet set du paquebot ainsi que les crêpes et la gavotte. Elle sera même amenée à rencontrer Castro!


225 pages d'un roman graphique sans un seul mot (quelle économie de frais de traduction!) et qui dit pourtant tout ce qu’il y a à dire. Le dessin est hyper expressif et emporte l'adhésion. 

Un message écologique et humain qu’on tarde trop à entendre et qui parlera à tous les âges. Une totale réussite que cette jolie histoire désespérée mais qui croit encore à l'amour. Alors un seul conseil : Allez vous régaler !


978-2756062105

  

14 août 2024

Le bonheur en Allemagne

de Michel Tournier

***+


Fils de germanistes germanophiles, petit-fils de germanistes germanophiles et germaniste germanophile lui-même, Michel Tournier n'est pas vraiment né à la bonne époque puisqu’il a surtout connu les guerres franco-allemandes, destructrices, meurtrières et même massacrantes, ce qui n'est pas le meilleur moment pour les échanges culturels. Néanmoins, c'est à l'université de Tübingen qu'il a suivi ses cours de philosophie, juste après guerre, dans une Allemagne qui tente de se relever des ruines auxquelles l'a réduite le nazisme. Il ne parviendra pourtant jamais à être reçu à l’agrégation, ce qui l’amené à se détourner de la philosophie… pour la littérature. (c’était notre séquence « naissance d’un écrivain »)

"« J'ai découvert la philosophie à seize ans, et j'ai abandonné toute ambition littéraire pour m'y consacrer. Mais à vingt-cinq ans, j'ai renoncé à la carrière universitaire, car, au lieu d'être reçu dans les premiers à l'agrégation de philosophie, comme j'y comptais bien, j'ai été rejeté dans les derniers !», avoua-t-il avec humour.

Publié en 2004, cet ouvrage de moins de 100 pages en caractères plutôt gros comprend six textes. On devine qu'ils sont courts. Ont-ils été rédigés pour l'occasion ou extraits de carnets plus anciens, j’opterais pour la seconde hypothèse, mais sans le savoir vraiment. Ils s'agit d'extraits autobiographiques qui prennent leur intérêt de la grande connaissance et de la relation spéciale que l'auteur avait avec l'Allemagne.

Le premier texte présente son enfance puis sa jeunesse en lien avec l'Allemagne. Ses souvenirs sont intéressants par les nombreux renseignements qu'ils véhiculent. On le voit également s'attribuer un goût pour les femmes athlétiques et énoncer quelques contre-vérités sur les jeunes athlètes de l'Est.

Le deuxième texte est une intéressante page d'Histoire, celle de Bismarck et des relations entre nos deux pays au long de ce détonnant vingtième siècle.

Le troisième texte évoque la Suisse qu'il aime également, sa position politique et les séjours qu'il y a faits.

Le quatrième texte raconte ses relations très amicales avec François Mitterrand et les visites que celui-ci lui rendait à domicile. Il évoque ce que le Président pensait de la RDA.

Le cinquième texte raconte le discours qu'il a fait à Weimar pour le 240ème anniversaire de Goethe.

Le sixième texte évoque l'histoire de la Prusse qui arrive à ses 246 ans d'existence et nous offre cette déclaration qui à elle seule justifierait la lecture de l'ouvrage:

"Car dans un véritable socialisme, le travail n'est pas une marchandise _ comme le veut Marx sous l'influence du mercantilisme anglais _ mais un devoir moral. La place assignée à chacun dans le corps social répond à une vocation assumée librement et de façon désintéressée. Le seul socialiste digne de ce nom serait l'Allemand Auguste Bebel (1840-1913), parce qu'il concevait la communauté des travailleurs comme un tout organique, où les femmes libérées des sujétions sexuelles, joueraient un rôle éminent."


Un petit ouvrage intéressant pour ceux qui s'intéressent à l'Allemagne ou à Michel Tournier et que vous ne mettrez pas trop longtemps à lire. Néanmoins, je dois dire que je demeure perturbée et rebutée par ce que l'on sait maintenant des pulsions de celui qui "s'avançait masqué" et que j'ai beau tenter d'en faire abstraction, je n'y parviens pas. Je regrette.


‎ 978-207030799