La Montagne magique
de Thomas Mann
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978-2253237594
La montagne était magique, magique aussi le séjour au sanatorium entre vie et mort, hors du monde qui basculait dans la Grande Boucherie, et magicien, l’auteur.
Hans Castorp se tient en équilibre à son sommet. C’est un tout jeune adulte qui vient d’obtenir son diplôme d’ingénieur et qui est sur le point de commencer sa carrière dans l’entreprise d’un ami de la famille. Commencer sa carrière, commencer sa vie … mais sa carrière, il ne l’a pas choisie par intérêt réel, plutôt un concours de circonstances, et puis, il en faut bien une. De même sa vie, bientôt, on lui trouvera une fiancée. Il se contente de suivre son cours et pourtant, quelque chose le trouble. Il sent, sans parvenir à identifier le problème, que quelque chose ne tourne pas exactement rond. Mais quoi ?
Il y a des œuvres littéraires, comme celle-ci que leur réputation précède de très loin et dont on a entendu parler de tout temps semble-t-il, au moins depuis qu’on s’intéresse aux livres, et bien avant qu’éventuellement, on s’aventure à les lire ; il en est ainsi de La Montagne magique. Tout impressionne dans ce bouquin, sa réputation, mondiale, colossale, son auteur, Prix Nobel, carrière internationale bien avant la mondialisation, et même son ampleur : 1133 pages dans la version poche que j’ai lue. Tout cela a de quoi vous fasciner, vous attirer, mais aussi, vous tenir à l’écart. Et à l’écart, je m’en suis bien tenue pendant quelques décennies…
Seulement voilà, tout à fait indépendamment, il se trouve que j’adore toutes les histoires qui se déroulent dans un microcosme, hôtel, pension de famille, sanatorium, etc. Il se trouve aussi que j'ai lu l’excellent Banquet des Empouses d’Olga Tokarczuk qui est un immense clin d’œil à la Montagne magique, et que cela m’amène à me dire encore une fois, qu’il est bien dommage que je n’aie toujours pas lu l’original… mais je n’ose toujours pas. Mais peu auparavant, Le Magicien de Colm Tóibín était sorti en format poche. 672 pages, un gros livre là encore, mais d’un accès facile et qui se dévore, alors je l’ai lu et une fois terminé, il m’a semblé que Thomas Mann n’était plus le monstre sacré inaccessible qu’il était avant. Il m’a semblé que je pouvais, au moins partiellement, le comprendre. L’homme, du moins, alors son œuvre… qui sait ? Et c’est là que je me suis souvenu comment je lisais les gros ouvrages rébarbatifs au temps lointain de mes études : dose quotidienne obligatoire sans aucune exception entourée de lectures plus récréatives. La Montagne étant toujours aussi impressionnante, alors j’ai fixé la dose quotidienne très bas : 15 à 20 pages. Et pour la récréation, ça a été Le journal d’un assaSynth
Avouez que je ne risquais pas de confondre.
Et j’ai lu.
Longtemps.
Sans jamais déroger. Et j’y ai pris du plaisir, et de l’ennui aussi. Parfois, c'est très long (les disputes de Settembrini et Naphta!). D’innombrables scènes se sont gravées dans ma mémoire, les tables du réfectoire, les radiographies, les excursions en carriole, le pantalon jaune de Settembrini, l’impuissance niée des médecins, la sottise des uns, la méchanceté des autres (mais souvent les mêmes), la misère des rôles sociaux (le soldat, l’ingénieur), les rapport de richesse (en avoir ou pas), les séances de spiritisme, les vieilles luttes inépuisables entre la droite et la gauche, le duel etc. etc. La Montagne magique, c’est tellement de choses! Thomas Mann a réussi à tant y mettre ! A parler de tout, mais sans en parler. Tout est allusion, tours de passe-passe est transpositions dans ce roman. Le Magicien montre en cachant. Comme l’épouse qui avait amené T. Mann a séjourner dans un sanatorium, a été transposée en cousin (changement de sexe),sans doute la captivante Madame Chauchat n’a-t-elle pas été inspirée par une belle dame… et quand Settembrini intime à son élève de ne jamais céder à son goût pour le «charme oriental passif» et de lutter au contraire contre ce penchant découvert au lycée, sans doute n'évoque-t-il pas seulement l’indolence, les yeux en amande et les pommettes hautes des deux séducteurs.
L'éditeur a beaucoup fait mousser sa nouvelle traduction de Claire de Oliveira qui serait bien meilleure que celle de Maurice Betz qui datait de 1931. Il se trouve que je disposais des deux versions et que je me suis souvent amusée à comparer des passages de l'un et de l'autre et il se trouve aussi que j'ai bien aimé les deux. Je ne suis pas tombée sur de grosses différences et c'est tant mieux, on part tout de même du même texte. Je trouvais parfois l'une plus habile que l'autre, mais ce n'était pas toujours la même. Toutefois, cette modernisation a eu le mérite de remettre ce chef-d’œuvre sur le devant de la scène. Tant mieux.


 
Je l'ai lu, il y a longtemps. Comme toi, j'ai longtemps été intimidée par l'œuvre et l'auteur. Le cadre du sanatorium, en revanche, ne faisait pas partie des critères attractifs... Contre toute attente, et en dépit de certains passages où je me suis ennuyée, j'ai apprécié le roman. Mais, c'est souvent le cas avec les monuments littéraires. Il y a des moments grandioses et d'autres un peu pénibles. Mais quelle satisfaction quand on arrive au bout !
RépondreSupprimerPeut être en mesure préparant comme tu l'as fait? Trop tard pour ce RV mais un jour peut-être
RépondreSupprimerJ'ai bien aimé comment tu t'y es prise pour grimper la montagne
Bravo, tu as relevé le défi haut la main ... je ne peut pas en dire autant de mézigue... mais je retenterai sans doute un jour !
RépondreSupprimerBonsoir Sibylline, j'ai lu ce chef d'oeuvre il y a plus de 40 ans grâce au conseil de ma maman. Je ne l'ai pas regretté. Tout le monde devrait l'avoir lu au moins une fois dans sa vie même s'il y a des passages pas faciles. Bonne soirée.
RépondreSupprimerWow, bravo pour cette lecture qui, moi, continue à me tenir à distance... Ah c'est sûr qu'il n'y avait pas de risque de la confondre avec l'intrigue de l'AssaSynth.^^
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