La seule histoire
de Julian Barnes
GARANTI SANS SPOILER Petite liste de ce que j'ai lu... "J'ai lu quelques bons livres cet été-là, ainsi qu'un grand nombre de mauvais, et le les ai tous aimés." (Quatre saisons à Mohawk de Richard Russo)
La seule histoire
de Julian Barnes
La double vie de Jesús
d'Enrique Serna
J'avais choisi ce livre parce que je ne connaissais pas Enrique Serna, parce que je ne savais que peu de choses sur le Mexique actuel et parce que les phénomènes sociaux-politiques m'intéressent. Je n'ai pas été déçue. Enrique Serna s'est révélé être un grand écrivain, maitrisant parfaitement son art et capable de donner une réalité complète aussi bien à des personnages à peine aperçus dans leurs vies quotidiennes qu'à ceux dans la tête desquels on va entrer. Il montre aussi très bien les manipulations politiques et les renversement de croyances populaires. Il a su me donner l'impression que je voyais parfaitement la réalité mexicaine et que je la comprenais et pour couronner le tout, il a su modeler le tout dans un roman au suspens total qui met en scène une situation quasi-désespérée et une lutte dont il est parfaitement impossible de deviner l'issue. Il a même su mêler le tout d'une passion amoureuse convaincante alors que je suis a priori peu cliente de ce genre de récit.
Notre personnage principal, Jesus Pastrana, est adjoint à la mairie de Curenavaca -ville située à environ 90 km au sud de Mexico- chargé de la surveillance des comptes. Il est peu aimé de ses collègues et surnommé "Le Sacristain" (bien que sa foi ne soit pas particulièrement visible) dans un pays où la corruption est considérée comme une chose allant de soi et où les cartels règnent plus ou moins visiblement. Mais justement, les apparences doivent encore un peu être sauvegardées, ce qui permet à Jesus de faire quand même entendre sa voix. C'est un combat sans fin, du genre creuser un puits dans du sable. Mais Jesus est totalement incorruptible, il a une incroyable foi en son combat pour un assainissement de la vie politique et loin de se décourager, il veut être le candidat d'un parti ayant pignon sur rue (le réactionnaire PAD Parti d'Action Démocratique) et, une fois élu maire, faire le grand ménage dans la municipalité. Le parti en question, d'abord tenté par l'image de parfaite honnêteté que ce candidat pouvait leur apporter (ils en ont quelque peu besoin) se rend vite compte que, la sincérité de ses convictions étant totale, il sera ingérable et, graissage de pattes aidant, choisit un autre candidat pour le représenter. L'histoire pourrait s'arrêter là pour notre Sacristain réduit à l'impuissance si une main anonyme ne lui livrait le dossier d'un énorme scandale financier qui détruira le candidat qu'on lui a préféré...
En arrière-plan, la ville est tenue par deux cartels mafieux qui se déchirent sauvagement au grand malheur de la population et l'un des deux a réussi à soudoyer la municipalité actuelle qui le favorise honteusement tout en simulant de lutter contre les deux.
Parallèlement, la vie privée de Jesus n'est pas une totale réussite. Il a deux enfants qu'il adore mais cela ne fonctionne plus du tout avec son épouse qui, ayant épousé un adjoint municipal important, comptait bien jouir de tous les privilèges occultes qui devaient normalement accompagner le poste. Elle est extrêmement frustrée de tout ce dont Jesus les prive par son intransigeante honnêteté et ne lui pardonne pas son manque d'ambition. Ils se supportent de plus en plus difficilement mutuellement et une nuit où Jseus a quitté la maison pour se détendre après une scène particulièrement pénible, il se sent attiré par les prostitués travestis, les observe et en trouve une qui le séduit beaucoup. Au matin, il se sentira révélé à lui-même après cette première expérience homosexuelle et qui plus est, éperdument amoureux de cette prostituée-là. Ce serait une situation extrêmement délicate pour tout homme, on imagine ce que cela peut donner pour un homme politique en plein combat électoral qui tient beaucoup plus de la fosse aux lions que du duel au fleuret. D'autant que son nouvel amour n'est ni discrète, ni raisonnable.
"Maudit soit le jour où il était tombé amoureux d'une folle bipolaire !"
Voilà, vous avez les ingrédients dont Enrique Serna a tiré ce formidable roman, passionnant, troublant, dangereux et crédible.
Éclats politiques :
"Car les deux partis avaient conclu un pacte très souple, leur permettant d'être des alliés réels et des adversaires pour la galerie, afin de mieux tromper des électeurs abrutis par la misère et la désinformation."
"Dans la politique mexicaine, il ne servait à rien de frapper aux portes : la seule manière d'avancer était de les enfoncer. (…) tout ce que tramaient ces requins avait un double fond."
"Jesus quitta la réunion écœuré et furieux, avec de sérieux doutes sur son avenir politique. Les gens imploraient la protection, il y avait quatre ou cinq exécutions quotidiennes, les tueurs rackettaient commerçants et restaurateurs, les fosses clandestines débordaient de cadavres et le souci majeur de cette élite de tartufes était de contrôler ce que les gens faisaient ou laissaient faire avec leur cul."
La bascule du souffle
de Herta Müller
L'univers de carton
Un guide du monde de Phoebus K. Dank
de Christopher Miller
Invasions divines – Philip K. Dick, une vie
de Lawrence Sutin
H. P. Lovecraft - Contre le monde, contre la vie
de Michel Houellebecq
Le maître du haut château
Philip K. Dick
Cette édition "J'ai Lu" de 2013 978-2290082324 présente un grand intérêt du fait de la postface de L. Queyssi très documentée et des deux chapitres que P.K. Dick avait rédigés pour une suite éventuelle. Cette suite n'a jamais vu le jour mais ces chapitres éclairent tout de même rétroactivement l'ouvrage que nous venons de terminer. La postface quant à elle est une mine de renseignements et permet de comprendre avec une toute autre précision ce roman étonnant.
Il s'agit d'une uchronie. Une bonne vingtaine d'années après la fin de la seconde guerre mondiale, Allemands et Japonais, qui ont remporté la victoire et anéanti toute opposition, se sont partagé le monde. L'est du globe jusqu'à et y compris la partie est des ex-USA, maintenant PSA : Etats pacifiques d'Amérique, est aux Japonais. L'Europe et la partie ouest des PSA est aux Allemands. Entre les deux, soit le centre de l'Amérique du Nord, est une sorte de no man's Land non revendiqué car « jugé sans intérêt » dit un personnage, on peut estimer aussi que cela évite aux deux vainqueurs d'avoir une frontière commune. Etre alliés est une chose, s'aimer en est une autre.
Nous sommes à San Francisco, donc zone nippone et c'est là que nous faisons connaissance de nos personnages et de la drôle de situation qui est la leur. Tout ce qui est important, distingué, chic et qui compte, est japonais. Les indigènes nord américains les admirent, les envient et les imitent car il n'y a nulle part dans le monde le moindre esprit de rebellion. Chacun tente d'être le plus japonais possible et le mieux vu possible par eux, tout en considérant qu'il leur sera toujours inférieur. C'est assez étonnant comme état d'esprit. Parmi les habitudes venues de l'Est et, peut-être au premier rang d'entre elles, l’usage du Yi King. Chacun consulte constamment ce livre des oracles au moindre doute, à la moindre inquiétude sur l'avenir ou sur une décision à prendre. Ses réponses sibyllines se prêtent bien sûr à toutes les situations. Le monde est hyper raciste, antisémite, homophobe, oppressif et vertical, le nazisme règne en maître incontesté. Il y a des esclaves. Les génocides ont réglé tous les conflits. Dans la partie plus apaisée, l' ambiance est délétère, une auto-surveillance de tous les instants est indispensable.
Dans ce monde difficile et stressé, circule un roman de science-fiction uchronique qui imagine un monde dans lequel les alliés, et non les forces de l'Axe, auraient gagné la guerre. Ce roman a été écrit par un écrivain qui habite une demeure fortifiée sur les hauts plateaux de crainte (justifiée) de se faire assassiner (c'est lui le Maître du titre). Dans les parties allemandes du monde, ce roman est interdit, dans les parties japonaises il ne l'est pas et est même un best-seller. Il captive ses lecteurs par l'originalité du point de vue tant la victoire nazie est indiscutée.
Premier gros succès de P.K. Dick, ce livre n'est peut-être pas aussi bien rédigé que le seront d'autres. . Je pense en particulier à l'idée de s’inspirer du style bref et coupé des haïkus pour évoquer la façon de penser d'un Japonais... je n'ai pas été convaincue par le procédé. Mais ce roman est par contre vraiment très habilement monté. Ainsi, on s'attendrait à ce que le monde évoqué par le Maître revienne à une peinture de notre monde, puisque les Alliés ont effectivement gagné. Eh bien il n'en est rien. C'est encore un autre monde qui apparaît et le lecteur ne peut s’empêcher de se demander combien d'autres variations sont possibles et cela le laisse songeur... Une autre mise en abyme apparaît. On l'a dit, les personnages utilisent le Yi King mais l'on apprendra plus tard que le Maître du haut plateau lui aussi, a utilisé le Yi King pour écrire son livre. Au point qu'il dit que c'est le Yi King qui a écrit son roman. Et pour rajouter encore un étage, nous apprendrons, nous, que P.K. Dick l’utilisait beaucoup alors qu'il écrivait ce livre.
Le complot contre l’Amérique
de Philip Roth
Le Judas de Léonard
de Leo Perutz
Leo Perutz excellait dans les romans historiques où il mâtinait à sa sauce les faits historiques, sans jamais les heurter ou les ridiculiser, pour en tirer des romans passionnants. Celui-ci est son dernier, publié à titre posthume après que Alexander Lernet-Holenia eut apporté la dernière main à l'ouvrage presque fini.
Nous sommes en 1498, Léonard de Vinci est en train de peindre La Cène pour un couvent de Milan, ou plutôt, il le devrait, car en fait, il ne peint plus depuis longtemps et partage son temps entre la contemplation de son œuvre inachevée et la fréquentation assidue des bouges de la ville... Le prieur du couvent qui désespère d'obtenir la livraison de sa fresque, vient s'en plaindre au Duc de Milan devant lequel, Léonard doit bien s'expliquer, ce qui permet au lecteur d'entrer de plain-pied dans l'action. Si Léonard ne peint plus, c'est qu'il lui faut un modèle pour le visage de Judas et qu'il n'en trouve pas... S'il fréquente les mauvais lieux, c'est dans l'espoir d'en découvrir un. Le Prieur ne peut que s'incliner.
Nous voici donc dans les estaminets où nous retrouvons un marchand allemand, Joachim Benhaim, qui vient de vendre deux très beaux chevaux au Duc et qui cherche à se restaurer. Dans cette auberge, il trouvera une compagnie bohème qui compte autant d'artistes, peintres, sculpteurs, poètes, que de voyous ; et d'ailleurs, se sont parfois les mêmes. Parmi eux, le plus dangereux est sans doute ce Mancino, qui trousse la rime mais loue aussi bien son poignard pour de basses œuvres. Il est amnésique, a été trouvé blessé et errant sur les routes, et ne sait plus rien de son passé. Il lui semble avoir été riche et puissant, et il semble à Joachim Benhaim l'avoir déjà vu avant... mais ils ne tirent rien de plus de ces vagues réminiscences. Seul, le lecteur en saura bientôt davantage grâce à une postface de l'auteur. Mais chaque chose en son temps.
A partir de là, nous allons nous attacher aux pas du marchand de chevaux, qui vend par ailleurs toute marchandise précieuse susceptible de lui valoir un bénéfice. Il est fort, intelligent et entreprenant, il a déjà beaucoup voyagé de par le monde et ses affaires se portent bien. Il décide d'ailleurs de profiter de son passage à Milan pour recouvrer une dette que son père y a laissée en attente depuis bien trop longtemps. 17 ducats, c'est une forte somme ! Quand il s 'enquiert auprès de ses nouveaux amis de l'adresse de son débiteur, ceux-ci éclatent de rire et la lui donnent tout en lui assurant qu'il ne pourra jamais recouvrer sa créance. Il soutient que personne n'abusera jamais ainsi de lui, chacun s'enflamme, et un pari est pris. Joachim Benhaim va consacrer le reste du roman à tâcher de récupérer ses 17 ducats, ce qui s'avère effectivement bien difficile.
Pour corser le tout, il aperçoit dès le premier jour une magnifique jeune fille, et c'est le coup de foudre !
Joachim pourra-t-il mener à bien ces deux affaires ?
Léonard finira-t-il bientôt la Cène ?
Je vous laisse le découvrir avec ce très plaisant roman qui n'a pas pris une ride.
Attention : Ne lisez pas la quatrième de couverture de l'édition Phebus qui en dit bien trop (quel gâchis!), ce qui n'était pas le cas de l'édition 10-18.
L'enfant
de Jules Vallès
Mémoires d'un révolté
On ne lit plus guère cette autobiographie romancée d’un personnage qui est loin d’être anodin: Jules Vallès. On ne la lit plus guère et on a tort. Si l’ambiance est datée, le trait est vif et sans détour et l’intérêt historique, psychologique et social énorme. C’est le genre de lecture un peu rébarbative mais très instructive à laquelle on peut/doit se livrer de temps en temps, soit en s’y jetant entièrement pour un bref moment, soit en en absorbant un quota quotidien en même temps que l’on se livre à une autre lecture purement récréative. On peut aussi l'écouter en audiolivre grâce à Litteratureaudio.com alors qu'on se livre à une autre occupation. Bref, quelle que soit la méthode employée, la lecture de Jules Vallès est utile, voire nécessaire. J’ai donc attaqué pour cette fois le premier tome de la trilogie autobiographique.
Jules Vallès met en scène un personnage fictif nommé Jacques Vingtras qui lui ressemble tant que nous ne discuterons pas davantage sur cette double identité de J.V. Cependant, s’il lui ressemble par les expériences et les sentiments, il en diffère assez par les stricts faits pour que l’on doive parler de roman plutôt que d’autobiographie. Il couvre ici la période qui va de la naissance à son départ de la maison familiale. Nous décrivant l’existence d’un fils de professeur élevé dans une famille où le «paraître», le sens de son rang social si difficile à tenir qu’il en devient l’enjeu d’une lutte permanente et d’une crispation sans merci sur ses signes extérieurs, dévore tant d’énergie qu’il n’en reste plus une miette pour les sentiments et particulièrement le naturel, la tendresse, l’affection.
Ce roman, suivant les découvertes du jeune Vingtras, se compose particulièrement et surtout au début, des portraits des gens de son entourage le plus proche pour aller s’élargissant puis passer du portrait au paysage puis au récit. Portraits assez brefs et saisis sur le vif. Très visuels et en même temps aussi sentimentaux que peuvent l’être les observations d’un enfant. Une des premières découvertes du petit Jacques/Jules est celle de la vie d’autres enfants. Il compare son éducation stricte et sans amour à celle des enfants d’ouvriers ou de paysans, sa vie jugulée à la leur, plus libre, libérée en tout cas des soucis du paraître, l’éducation tout en coups, brimades sadiques et interdits de sa mère, puis de son père à celle, peu contraignante et souvent affectueuse des autres enfants, qu’ils soient riches ou pauvres.
Il y a des accents de «Poil de carotte» ou de «Vipère au poing», mais avec ce regard social en plus, que Vallès a toujours su avoir et qui le caractérisera en tant qu’homme et citoyen.
Au passage Vallès fut incontestablement un des pionniers de la défense des droits de l’enfant à une époque (incroyable parce qu’apparemment pas si sauvage) où les enfants étaient souvent atrocement battus, où le sadisme trouvait en eux un exutoire permis et où toute la société détournait les yeux sans rien dire quand il arrivait qu’un père un peu excessif tue l’un des siens et ce, quel que soit le milieu social.
Ses rares bons souvenirs de l’époque sont liés soit à ses séjours – très courts ou un peu plus longs - hors de sa famille, soit aux livres et à ses premières lectures – ce qui est aussi une façon de séjourner ailleurs. Comme nous tous, les livres l’ont aidé, soutenu, aimé. Tout enfant, il voue un total respect à l’œuvre écrite et pas seulement à la scolaire instigation paternelle car le respect que son père affiche pour les livres est pleine de contraintes elle aussi. Mais Jules/Jacques saura d’instinct apprivoiser le difficile et profiter du plaisant. Et vous, moi, le lecteur, reconnaîtront là sans faillir leur semblable, leur frère.
A côté de cela, Vallès sait nous montrer l’existence terrible de toute une caste: les enseignants: soumis d’une manière elle aussi maintenant incroyable au bon vouloir et au sadisme non seulement des parents d’élèves mais tout autant, voire plus encore, de leur hiérarchie et de leurs collègues. La seule voie de salut –et encore n’est-il que relatif- est le recours à une cruauté égale. Et peu à peu, cette orientation donnée à leur personnalité ne peut plus se désamorcer et devient leur personnalité présente autant dans leur intimité que dans leur vie professionnelle. Vallès sait montrer les liens ambigus que la bourgeoisie, le pouvoir a toujours entretenus avec les éducateurs de ses enfants. C’est encore le cas maintenant, mais peut être ce 19ème siècle a-t-il été le moment où la situation a atteint son paroxysme dans la cruauté. C’est du moins le sentiment qu’on a en lisant ce premier tome.
Rigolo ou non, je vous le dis tout de suite, vous ne pouvez pas vous en dispenser. C’est comme ça. Faut y aller ! Et je vous parlerai bientôt du second tome.
Une seule citation qui augurera de la suite:
Son père : «Mon enfant, il ne faut pas jeter le pain, c’est dur à gagner.»
Trilogie de Jacques Vingtras
L'Enfant (1879)
Le Bachelier (1881)
L'Insurgé (1886)er.
Le Premier qui pleure a perdu
de Sherman Alexie
Ados et +
Illustrations : Ellen Forney
Dur, et drôle, parce que la vie est comme ça...
Ce livre « pour ados » (et qui devrait beaucoup les intéresser) intéressera également beaucoup les adultes qui sauront que cet ouvrage est pour une énorme part autobiographique et qui découvriront grâce à lui qui est Sherman Alexie, amérindien sorti du ghetto, euh, pardon, de la réserve, et ayant réussi à mener des études qui lui ont évité la misère et l'alcoolisme qui guettent ses coreligionnaires avec tant d'avidité.
Ce roman n'est pas donné comme une autobiographie, il relate la vie difficile d'Arnold Spirit, le héros qui, à 14 ans, raconte ce qu'il a vécu jusqu'ici et ce qu'il vit maintenant qu'il a quitté la réserve spokane pour rejoindre un lycée où il est le seul indien. Cependant, c'est bien la jeunesse de S. Alexie, simplifiée et édulcorée qui y est racontée. C'était lui, le bébé hydrocéphale qui dût subir tout de suite une intervention chirurgicale qui seule pouvait lui permettre de survivre. Il aurait pu conserver un handicap mental majeur, la suite montrera qu'il n'en fut rien, même s'il eut par ailleurs d'autres séquelles (épilepsie, entre autres).
Proie des moqueries et maltraitances des autres enfants pour son aspect (trop grosse tête) et ses crises, il ne dut sa survie qu'à son meilleur ami, un voyou encore plus dur que les autres, mais qui l'avait pris sous son aile. Cependant, l'école montre à Arnold que dans ce domaine-là au moins, il serait plutôt le premier que le dernier et c'est ainsi qu'il réalisera que la seule façon pour lui d'échapper au sort misérable et honteux qu'il voit être le lot des adultes de la réserve, est de quitter les lieux et aller faire ses études au lycée des blancs, même si leur niveau au départ dépasse beaucoup le sien, même si des kilomètres l'en séparent (ni cantine, ni internat) et que la voiture familiale n'a pas souvent d'essence, même s'il n'y est pas le bienvenu et même si, comble de tout, les autres indiens ne lui pardonnent jamais cet abandon qu'ils prennent pour une marque de mépris envers eux...
Et j'oubliai ! Les dessins ! Juste parfaits de Ellen Forney (j'ai cru un moment que c'était Alexie qui les avait faits.)
A lire vraiment, vraiment, vraiment, pour savoir que s'en sortir nécessite souvent de très gros efforts et que rien n'est évident. Se rappeler que le courage est une vertu et qu'elle se cultive, que se plaindre et accuser le sort ou les autres ne sert à rien ; et en rire, parce que Sherman Alexie, c'est toujours de l'humour, même dans les pires moments.